Le patron de Porsche aurait été victime d’espionnage économique selon Der Spiegel et Focus grâce à un simple babyphone, alors que l’enteprise est en plein rachat de Volkswagen. Décryptage des enjeux…
Le babyphone en question a été découvert par un service de sécurité dans un canapé, pendant que le Pdg de Porsche séjournait au Ritz-Carlton de Wolfsbourg en novembre 2007, juste avant une réunion du conseil de surveillance de VW. Mais cette affaire d’espionnage économique ne concerne pas uniquement Wendelin Wiedeking puisque qu’on apprend également que Uwe Hück [chef du CE de Porsche] et Wolfgang Bernhard [ancien membre du directoire de Volkswagen] ont été tous deux placé sur écoute téléphonique. Porsche a déposé plainte et l’enquête est en cours…
Le contexte sensible que travers actuellement Porsche nous renseigne sur les raisons supposées de ces écoutes. En effet, la Holding de Porsche détient aujourd’hui 31% de Volkswagen et prépare depuis plusieurs mois une prise de participation majoritaire, comme on peut le voir sur ce schéma [objectifs en bleu]:
Les syndicats de Volkswagen opposent une résistance farouche à la prise de contrôle de Porsche, par l’intermédiaire du puissant IG Metall qui regroupe 90% des salariés de l’entreprise. Outre les craintes de restructuration entraînant des licenciements, la question de la représentativité au conseil de surveillance leur pose problème, puisque les représentants des deux entreprises obtiendraient le même nombre siège alors même que Porsche compte seulement 12.000 salariés contre 326.000 chez VW. Sur ce point, le conseil des prud’hommes de Stuttgart a tranché en faveur de Porsche en approuvant la structure de la holding.
Le land de Basse Saxe, présidé par Christian Wulff, détient 20,3% du capital de Volkswagen et est également réfractaire à ce rapprochement. En fait, historiquement implantée dans la Basse Saxe, les statuts de Volkswagen étaient particuliers et octroyaient aux salariés, au gouvernement ainsi qu’au Land un droit de veto sur toutes les décisions stratégiques. Cette loi dite “Volkswagen” plafonnait les droits de vote des actionnaires à 20% et empêchait ainsi toute offre de rachat hostile. Elle a été jugé contraire aux principes de libre circulation des capitaux et donc anti-concurrentielle par la Cour Européenne en octobre 2007.
Les dirigeants de Porsche, à la manoeuvre en coulisse, ont accompagné les décisions des prud’hommes et de la cour européenne pour arriver à prendre le contrôle de VW. L’enjeu est d’autant plus crucial que [1] Volkswagen compte pour 4/5 du bénéfice de Porsche Automobil Holding, [2] que le constructeur est en passe de détrôner GM en Chine et [3] que son intégration dans le groupe lui permettrait de se prémunir contre des sanctions européennes dûes à son bilan CO2.
Depuis l’assemblée générale VW du 24 avril, Porsche est autorisé à exercer un rôle majoritaire et n’a donc techniquement plus de limites dans l’exercice de sa stratégie. Mais syndicats et politiques veulent conserver leur minorité de blocage par tous les moyens et déposeront une nouvelle plainte si Porsche réhausse sa participation à 50%. Dans cette lutte de pouvoir acharnée, auraient-ils laissé leur principes déontologiques de côté pour acquérir des informations stratégiques dans la plus grande discrétion ?