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La recomposition à Gauche passera-t'elle par Lyon?

Publié le 20 septembre 2013 par Sof
La recomposition à Gauche passera-t'elle par Lyon?

C'est un petit évènement aux répercutions immenses qui vient de se produire ce matin à Lyon. Une décision hautement symbolique d'une digue qui se rompt enfin dans l'union sacrée des socialistes.

Cela faisait plusieurs semaines que Nathalie Perrin-Gilbert, Maire du premier arrondissement de Lyon, ex-protégée de Gerard Collomb, avait pris ses distances avec l'édile de la capitale des Gaules, distances qui s'orientent vers un affrontement de plus en plus ouvert tant l'icône des barons locaux refuse toute remise en cause de sa ligne et de sa gestion (comme l'a bien montré la campagne législative 2012 en dissidence face à Philippe Meirieu). Ces derniers mois, dans un contexte politique à la fois hyper-centralisé autour de la citadelle Collomb et hautement éparpillé entre différentes formations de droite comme de gauche hésitant sur leur stratégie pour les municipales, tant l'ogre fait peur, le GRAM (Groupe de Réflexion et d'Actions Métropolitaines), créé par des socialistes en rupture avec la ligne sociale-libérale autour de Nathalie Perrin-Gilbert avait entrepris des contacts avec toutes les forces de gauche de la métropole, affirmant ainsi son assurance à vouloir aller jusqu'au bout de sa démarche. Avant l'été, la rue de Solférino avait lancé un coup de semonce annonçant par la voix de Christophe Borgel, le secrétaire aux élections du Parti Socialiste que Perrin-Gilbert ne pourrait rester au PS si elle assumait sa dissidence jusqu'au bout (oubliant par-là même une situation identique aux législatives sans qu'aucune sanction n'ait été lancée contre le Maire de Lyon soutenant le dissident Thierry Braillard face à Philippe Meirieu investi par le PS avec comme suppléante... Nathalie Perrin-Gilbert!). Ce matin l'on peut entrevoir que des municipales annoncées de partout comme mineures sur le plan national auront des répercutions pour toute la suite du quinquennat et pour le rapport de forces politique du pays.

Les élus GRAM, parmi lesquels des fondateurs du PS lyonnais, ont en effet annoncé leur mise en disponibilité du Parti Socialiste. Clamant leur attachement aux valeurs socialistes, ils avaient déjà annoncé que démissionner aurait signifié donner la légitimité à Gerard Collomb, quand ils considèrent que, comme François Hollande, le Maire de Lyon a glissé sur sa droite. Ils obligent ainsi le parti d'Harlem Desir à prendre ses responsabilités en excluant des porteurs d'une ligne de gauche tout en favorisant un baron local ayant pactisé avec le Centre sur la Métropole et annoncé à qui mieux mieux ses distances avec un certain nombre de lignes du parti. Solférino devra choisir entre le risque de perdre son élu local le plus important et d'afficher encore plus clairement sa ligne sociale-libérale.

Que signifie cette déclaration sur le plan politique national? Tout d'abord que dans la deuxième ville socialiste, notoirement ingagnable pour la droite, survient la première rupture de ban d'élus socialistes depuis la prise du pouvoir national de 2012. Une première alerte avait eu lieu avec la démission du parti d'un conseiller régional du Nord Pas-de-calais, puis d'élus perpignanais ou des Bouches du Rhône pendant que Jean-Noël Guerini et d'autres repris de justice n'étaient pas exclus. Face au désarrois des français et aux coups de boutoir du Front de gauche et de Jean-Luc Melenchon clamant la nécessaire majorité alternative à gauche, les élus socialistes serraient les rangs en avalant les couleuvres. Difficile d'admettre une telle rupture avec un parti auquel on a tant donné depuis si longtemps. Même situation chez les écologistes, divisés entre militants favorables au départ du gouvernement et les élus de la ligne "réaliste" prônant la stratégie des petits pas et du "je t'aime moi non plus". Même cause, mêmes effets, Eva joly décidait contre vents et marées de participer à la Marche pour la 6° République organisée par le Front de gauche en mai. Ces "départs", si elles sont encore contenues, ne peuvent que s'accélérer avec l'approche du scrutin municipal qui va mettre au jour les tiraillements entre la ligne politique largement discréditée du gouvernement et le peuple de gauche que les candidats devront regarder les yeux dans les yeux. L'image de la digue est pertinente: une fois survenues les premières fissures, l'édifice s'effondrera de plus en plus rapidement. Or nous y sommes.

Ensuite, outre de crédibiliser l'option de l'alternative politique de gauche (contre le désormais fameux "vous êtes un homme seul monsieur melenchon" déclamé par Cahuzac en début d'année), cela complique la position des "légitimistes" parmi les communistes et les écologistes soucieux de conserver leurs postes. Dans sa dernière note de blog, Jean-Luc Melenchon se fâche et réaffirme, démonstration à l'appui, le caractère suicidaire de suivre les solfériniens dans les villes à dimension politique (+ de 20.000 habitants) en rappelant son expérience des campagnes électorales pour étayer le choix de son curseur. A Lyon où la direction communiste n'a guère l'intention de se ranger derrière un éventuel vote d'autonomie des militants à qui elle veut "faire comprendre", l'on s'oriente donc vers une liste Collomb-PCF face à une liste GRAM-Front de Gauche-EELV et les listes de la droite. Situation cocasse qui indique le choix à contre-courant de certains communistes. A Paris la situation est proche, avec une liste autonome écologistes, une liste Front de Gauche et un Ian Brossat (souhaitant l'autonomie) au PCF en opposition avec son premier secrétaire (qui veut l'alliance au premier tour). L'enjeu des solfériniens de faire éclater le Front de Gauche est en passe de réussir... partiellement puisque l'"hydre rouge" risque de voir une nouvelle tête repousser. Les solfériniens auront réussi une contre performance de rassembler leurs opposants en y adjoignant des socialistes en rupture.

Les derniers évènements en provenance de la planète EELV indiquent que les tensions commencent à se cristalliser dans chacun des partis de gauche entre les apparatchiks et la base. Les dirigeants écologistes seraient ainsi en passe de sacrifier un courageux secrétaire national qui a depuis sa prise de fonction toujours allié sérieux et pragmatisme, acceptant le premier d'entamer des rencontres avec les pestiférés du PG au printemps tout en critiquant le langage "cru et dru". Dans ce contexte l'on voit très mal les militants maintenir leur présence au gouvernement devant la multiplication des signes de crispation du pouvoir solférinien sur le productivisme, seuls réflexes grégaires dont ils sont capables face à une crise qu'ils ne savent comment maîtriser.

Comment dans ce contexte hautement important, expliquer le tapis rouge des grands organes de presse pour le Front National et le silence sur ces évènements majeurs puisque le pouvoir est officiellement à Gauche? Sans parler de déontologie, le moindre sérieux serait d'analyser les incidences de cette recomposition d'alliances sur la majorité et sur les deux scrutins à venir. La vague est partie et il va sans dire que si la campagne municipale lyonnaise se déroule sur le même ton que la campagne législative Braillard/Meirieu, les répercutions nationales seront terribles et pourraient emporter le gouvernement avec elles. Sans même parler d'une victoire de l'Alliance des Gauches dans la Capitale des Gaulles...


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