Nous sommes au Sud-Est de la Mayenne. Les mauvaises langues vont vous dire qu’il n’y a rien à voir et que nous sommes vraiment dans la France rurale (ça c’est pas faux) et sans intérêt : détrompez-vous, il y a des choses à visiter et même de belles. Bien sûr, cela ne vaut pas le Val d’Orcia en Toscane ; mais ce site veut aussi vous montrer des monuments dignes d’intérêt proche de chez vous.
Au milieu d’un paysage agreste où alternent les champs de maïs et de vaches, les villages endormis à demi désertés, se situe Evron, petite ville sans histoire, du moins actuellement. Au centre de la ville se dresse Notre-Dame de l’Epine, basilique et église abbatiale de l’abbaye attenante.
Le monument a de l’âge : près de mille ans pour la crypte, dont il ne reste qu’un tas de pierres à peu près informe et infirme. A la fin du 10ème siècle, les moines débutent la construction d’une vaste église romane (70 mètres x 25 mètres tout de même) qu’ils mettent plus d’un siècle à achever. De cette période, il subsiste une partie de la nef, constituée de murs épais, de travées puissantes, de voutes en berceau et de lourds piliers. Il nous reste également la tour porche qui a davantage l’aspect d’un donjon fortifié que d’un clocher, les ouvertures ayant été réduites en meurtrières quelques siècles après son érection en vue de résister à un futur siège. On n’est jamais assez prudent !
La basilique subit par la suite de profonds remaniements qui n’ont néanmoins pas altéré son équilibre global. Le chœur est entièrement reconstruit au 13ème siècle, en pleine période gothique. Datent également de cette époque le déambulatoire et ses chapelles rayonnantes. Les larges vitraux, posés au XIVème siècle, permettent à la lumière de surgir dans l’édifice. Par manque de fonds, le problème ne date décidément pas d’aujourd’hui, la nef gothique n’a pu être achevée. Moralité, elle reste prolongée par la nef romane… qui a une hauteur de voûte bien moindre, ce qui donne un aspect étonnant à la basilique vue de côté.
Depuis, rien n’a changé, mise à part la flèche, abattue au début du XXème siècle pour cause de décrépitude avancée, le mobilier liturgique et les aménagements intérieurs, notamment de superbes grilles ajoutées au XVIIIème siècle et des autels latéraux, pas toujours réussis d’ailleurs, sentant bon leur XIXème siècle.
Malgré une construction s’étirant sur plusieurs siècles, l’ensemble est harmonieux et les ruptures de style sont bien intégrées. A noter enfin, la porte d’entrée de la basilique fracturée par la troupe au moment des inventaires en 1906 a été conservée en l’état dans l’église et est exposée au fond de la nef romane.
Juste à côté de la basilique se dresse la chapelle Saint-Crespin. Du fait des constructions gothiques, elle est désormais accolée à l’abbatiale. Au XIIème siècle, un noble de retour de Saint-Jacques-de-Compostelle fait édifier une chapelle à côté de l’abbatiale. Il fait décorer son œuvre avec des motifs byzantins. Cette chapelle existe toujours en l’état, avec une nef unique, un chevet en cul de four et des fresques antiques, malheureusement mal restaurées au XIXème siècle.
Les bâtiments de l’abbaye sont quant à eux reconstruits au XVIIIème siècle. De la place de la ville, ils ne sont que peu visibles. Néanmoins, j’ai pu accéder aux jardins en passant par la cour d’un établissement d’enseignement. Et cela vaut l’escapade. Le jardin est joli, pas exceptionnel non plus, il ne faut pas exagérer, en revanche la perspective sur les bâtiments conventuels est superbe.
Voilà, si vous passez dans le coin, rendez-vous-y. Prenez une petite heure pour visiter tout ça, vous ne le regretterez pas. Vous pouvez également faire un crochet par le village de Sainte-Suzanne, village fortifié de toute beauté situé à quelques kilomètres d’Evron.
C’était la petite suggestion du jour !