Ce type est dangereux.
Pas seulement parce qu’il se tient exagérément raide.
Pas juste à cause de ses yeux, léthargiques, paupières mi-closes, qui laissent apparaitre le blanc vitreux de l’œil.
Plus tout à fait blanc. Jaune, injecté de sang.
Il a de la folie dans ce regard là.
Une absence, une fixité, quelque chose qui s’est déconnecté, un synapse qui joue la fille de l’air.
L’air mauvais, le genre dur et sans pitié.
Bouche béante, 5 secondes, immobile. Sans un tremblement, terrifiant.
Peut-être baille-t-il, tout simplement, mais c’est un abime sans fond qui s’impose, sans gêne.
Soudain, il bouge, et c’est pire.
Mouvement saccadé, roulement de hanche à la Aldo Malcione sur le retour.
Il vient juste à coté de moi, s’adosser au mur, sa carcasse sèche doit être trop lourde à porter.
Il n’a que la peau sur les os; seuls les bras sont étonnement musclés. Idéal pour filer une sacrée raclée.
Alors certes, l’habit ne fait pas le moine.
N’empêche. J’ai changé de trottoir.
Ce type est malheureux.
Pas seulement parce qu’il a perdu toute envie.
Pas juste à cause de son gosse, son sang, sa raison de vivre.
Défiguré. Dans le coma, plus tout à fait vivant.
A l’aube de sa mort.
La nuit à pleurer, à s’en dessécher les yeux. La nuit à haïr, à pester contre le monde entier.
Une nuit entière à flirter avec la folie, à lutter contre cette envie de meurtre.
Il a erré toute la matinée autour du lieu de l’accident.
Il a marché, il se demande encore comment, jusqu’au carrefour, celui juste après l’école.
Trois heures qu’il est là, plutôt qu’au chevet de son fils.
Une nuit et trois heures à se demander pourquoi.
Alors qu’une vie n’y suffirait pas.
Juste, s’adosser, là, contre le mur froid.
Attendre que ça passe, prier pour que le temps fasse machine arrière.
Si seulement, il était arrivé à l’heure.
Si seulement …
Voila, comme promis, et suite à vos encouragement, petit texte publié.
J’en avais publié un autre, au début de ce blog, j’avais oublié ! Crac et Le temps qui passe.
Merci de m’avoir lue !