Bref.
Alors dans cet article, on lit des choses censées (à mon avis évidemment, vous êtes sur mon blog je vous rappelle), telles Patty Kelly, professeur d’anthropologie à l’Université George Washington pour laquelle « la prostitution fait partie de notre culture et elle devrait être dépénalisée », ou encore l’éditorialiste canadien Jeet Heer pour qui « la prostitution est un travail comme un autre et qu’il devrait être légalisé ». Dans l’article original, on apprend même que cette dépénalisation pourrait faire disparaître la « misère », économique ou axiologique, qui entoure la profession. Bah ouais, on a beau leur expliquer aux pignoles abolitionnistes, que tant que la prostitution ne sera pas un métier comme un autre, on le verra difficilement comme un métier comme un autre, CQFD, mais ça n’adhère pas à leurs circuits neuronaux, va comprendre…
Ensuite, on en vient aux joyeusetés pas vraiment rigolotes, du genre de celles de cette journaliste, Barbara Kay, n’ayant pas peur (en même temps, elle est peut-être morte de honte en relisant, j’en sais rien) d’écrire : « Les prostituées font quelque chose qui relève de l’inhumain, pour satisfaire des instincts qui, dans un monde vraiment ‘meilleur’, pourraient être canalisés dans des relations plus dignes et fécondes ». On remarquera ici l’opposition entre la relation tarifée, forcément « stérile » et l’autre « féconde » (fruitful), bonne et vieille antienne qui veut que la sexualité brute soit quelque chose de forcément dangereux et qu’il faille la canaliser un maximum avec des lois, des décrets, des bibles et des leçons de morales pour que le monde tourne rond. J’adore. Reminder : demander à Barbara ce qu’elle pense de la vente de gamètes, a priori ya pas plus fécond comme relation digne.
Ensuite, deuxième couche (la première était-elle sèche ?) : « Vendre son corps n’est pas un comportement dont on peut être fier, car la structure psychologique du genre humain veut que l’estime de soi chez la femme soit indissociable de son comportement sexuel ». AHAHAHAH, heureusement que je n’avais rien dans la bouche à ce moment-là (du genre, par exemple, un donut), car j’aurais bien pu m’étouffer (on vous le répète jamais assez : l’Internet c’est DANGEREUX). La messe est dite : l’estime de soi chez la femme est indissociablement lié à son comportement sexuel. Merci Barbara, mais la femme c’est qui chérie ? J’imagine que c’est toi, sinon, ton crédit crédibilité là, il en prendrait un sacré coup.
Cette notion d’estime de soi revient ensuite sous la plume de Roger Matthews, professeur de criminologie à la London South Bank University (‘tention là sérieux plus personne rigole ‘kay ?), venant de publier Prostitution, Politics and Policy, soit le compte-rendu de 20 années de recherche et d’étude sur le phénomène de la prostitution (‘tention, bis, la science !). Pour Roger, donc, « derrière l’apparente indépendance et autonomie [de la prostitution] se cache un grand nombre de femmes qui ont perdu toutes leurs illusions et qui finissent peu à peu par perdre l’estime de soi ». Oh qu’il est beau le scientifique qui cherche les choses vraies qui se cachent derrière les fausses (ça me fait penser à ma copine Michela Marzano tiens, pour qui « on ne pense jamais vraiment en vrai ce qu’on croit penser pour de vrai » - en substance, évidemment, dans les livres de Marzano, c’est achtement plus compliqué et argumenté rassurez-vous, tamponné CNRS tout ça bien comme il faut).
Pis après, bah, c’est l’avis de l’Eglise et JPII qui répond à BXVI, en lui disant qu’il n’est pas tant question d’ « offense à la dignité » que de « grave péché contre soi-même », euh merde c’est l’inverse mais bon : on s’en fout non ?