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L’essor du modèle « Originate du Distribute » dans les BFI françaises

Publié le 17 septembre 2013 par Sia Conseil

L’essor du modèle « Originate du Distribute » dans les BFI françaises Suite aux crises financières, à la crise de liquidité et face au contexte règlementaire actuel, les BFI françaises,à défaut de revoir complètement leur business model, réduisent certaines de leurs activités trop consommatrices en liquidité ou capital et mettent en place une nouvelle stratégie.

Le modèle traditionnel Originate and Hold [1] (cf. schéma « Evolution du business model ») n’étant plus adapté au contexte actuel, les BFI basculent vers un nouveau business model : le modèle Originate to Distribute [2]. Ce modèle, développé aux Etats-Unis dans les années 1980, permet de répondre à ces exigences et a été mis en place dans la plupart des BFI françaises courant 2012.

Faisons un point, un an après, sur l’évolution du business model et les impacts du modèle Originate to Distribute sur les BFI l’ayant adoptée et les conséquences sur le marché.

L’évolution du business model

Dans le modèle traditionnel, Originate and Hold, la banque octroie un financement vanille ou structuré et conserve le risque sur son bilan jusqu’à la maturité du crédit.

Dans le modèle intermédiaire, Originate and Distribute, la banque continue à initier et octroyer des financements, mais au lieu de porter l’intégralité du risque sur son bilan jusqu’à la maturité du crédit, elle en cède une partie à d’autres banques ou à des investisseurs.

Dans le nouveau modèle de financement, Originate to Distribute, avant d’originer les financements, la banque recherche d’abord des investisseurs avec qui elle va les « co-originer » ou « co-initier ». L’objectif affiché par les BFI françaises les plus en pointe dans ce nouveau modèle est de transférer 80% de leurs créances aux investisseurs, les 20% restants étant portés sur le bilan de la banque. Ces investisseurs sont pour la plupart des fonds de placement, des compagnies d’assurance, des asset managers etc. qui cherchent des sources de revenu à long terme et peu risquées.

Ce modèle permet ainsi d’alléger le bilan de la banque en transférant une grande partie du risque aux investisseurs, tout en distribuant la même enveloppe de crédits (et donc en conservant a priori le même montant de commissions).

Ce modèle a pour conséquence une évolution de positionnement vis-à-vis du client illustré sur le schéma ci-dessous : les banques ont d’avantage recours à la désintermédiation en réduisant le montant des prêts directs aux entreprises et en développant leur position d’intermédiaires entre emprunteurs et investisseurs.

Les implications internes : une exigence de suivi des emprunteurs et des investisseurs

Afin de ne pas recréer les conditions qui ont conduit à la crise des subprimes aux Etats Unis en 2007, il est essentiel que les investisseurs maîtrisent tous les aspects de la dette qu’ils financent. Ainsi, la banque doit s’engager à évaluer le risque de crédit, sélectionner les emprunteurs et suivre le risque tout au long de la vie du financement. Elle doit donc se comporter comme si elle détenait le crédit en totalité même si la plus grande partie du risque et du financement sont transférés aux investisseurs.

La banque doit également s’assurer que la stratégie Originate to Distribute réponde aussi bien à ses intérêts propres qu’aux intérêts des investisseurs. Elle doit donc chercher à structurer les partenariats avec les investisseurs afin de mettre en place des solutions adaptées aux différentes parties : segmentation en fonction des besoins, des profils de risque, de la classe d’actifs et des opportunités recherchées.

Les conséquences du modèle sur le marché des financements

Aujourd’hui les obligations des entreprises moyennes apportent un retour sur investissement d’environ 2 à 2,5%. Au vu de la demande de ROI des investisseurs, une augmentation du coĂťt des financements pour les emprunteurs est attendue car les banques européennes pratiquent des taux inférieurs aux banques américaines et asiatiques. Les solutions de financement choisies par les entreprises pourraient ainsi évoluer.

Par ailleurs, ce modèle pourrait réduire certains types de financements car moins favorables à celui-ci (i.e. moins intéressants pour les investisseurs). D’une part, les financements très complexes et structurés difficiles à placer auprès des investisseurs car le risque ne peut être suivi facilement. D’autre part, les financements consommateurs en liquidité et capital tels que les financements de projets aéronautiques ou maritimes qui nécessitent du capital à long terme.

Les inconvénients du modèle

Le modèle Originate to Distribute permet essentiellement de réduire le bilan de la banque mais entrainera également très probablement une réduction des commissions car les investisseurs exigent de la rentabilité or pour rester compétitifs (notamment vis-à-vis des banques étrangères) les commissions ne pourront augmenter significativement.

Par ailleurs, les investisseurs ont une appétence limitée pour la dette dans leur portefeuille. En effet, suivre correctement la dette nécessite d’avoir des équipes Back Office et Middle Office, et des outils appropriés. Ces conditions sont peu vérifiées par ces nouveaux investisseurs et coĂťteuses à mettre en place.

Enfin, la dette est souvent utilisée comme collatéral pour le refinancement, une réduction de la dette dans le portefeuille des banques pourrait par conséquent impliquer une pénurie de collatéral, lequel pourrait devenir une ressource rare.

Le modèle Originate to Distribute sert donc de plan d’adaptation pour les BFI françaises permettant de répondre à des nouvelles exigences règlementaires, de liquidité et de capital. Les banques l’appliquant renforcent désormais leur rôle d’intermédiaire entre les emprunteurs et les investisseurs. Les implications du modèle sont nombreuses en termes de financements et de risques et entrainent donc des enjeux d’organisation interne de métier et de transformation des applications de financement. Si ces transformations sont lancées dans toutes les banques elles sont loin d’être terminées, d’une part, étant donnée la complexité des transformations, et d’autre part, du fait des contraintes externes non encore stabilisées à commencer par les nombreuses réglementations.

Sia Partners


[1] : Octroyer et détenir
[2] : Octroyer en vue de céder


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