Au La Bruyère, tombez sous le charme du couple Giraudeau-Boisselier...

Publié le 15 septembre 2013 par Fousdetheatre.com @FousdeTheatre

Voici une jolie pièce en trois actes, aux couleurs multiples, habilement composée par Renaud Meyer, narrant l'histoire d'amour à l'issue tragique de Zelda et Scott Fitzgerald (auteur de Gatsby le Magnifique), couple mythique aux excès et frasques célèbres dans la Jet Set des années folles. Au rythme d'airs de jazz joués live, Sara Giraudeau et Julien Boisselier se glissent avec gourmandise et sincérité dans les habits de ces deux-là. Leur fraîcheur, leur authenticité, leur complicité, nous ont séduits et touchés.

Le rideau se lève sur les jeunes mariés, dansant, buvant, faisant l'amour, la fête, dans un grand hôtel new yorkais à l'occasion de l'anniversaire de Zelda auquel des dizaines, des centaines de personnes ont été conviées. Parmi elles Ernest Hemingway, ami et confident des Fitzgerald. Période d'insouciance, de succès pour Scott, de bonheur pour le couple... Nous les retrouvons ensuite sur la Riviera, quelques années plus tard, à l'automne de leur histoire. L'alcool a fait des ravages. Scott cherche en vain l'inspiration, est devenu irascible. Sa muse Zelda multiplie les aventures extra conjugales. Les premiers signes de schizophrénie apparaissent. Les disputes sont permanentes. La troisième partie, enfin, donne à voir Zelda internée en clinique psychiatrique, totalement déconnectée de la réalité, communiquant avec les fleurs.

S'appuyant scrupuleusement sur la bio des protagonistes, du rire au drame, émouvant, enlevé, sans fioriture mais soigneusement dialogué (en dépit d'un début de dispute façon Les Feux de l'Amour à l'acte 2, dieu merci vite corrigé...), le texte de Renaud Meyer a tous les ingrédients nécessaires pour produire un moment de théâtre populaire de qualité, nous éclairant sur deux êtres hors du commun, décrivant au passage la vie culturelle et les moeurs d'alors. L'auteur signe d'ailleurs une mise en scène à l'image de sa prose. Plaisante, légère, fluide, plutôt élégante (chose rare sur un plateau, la scène de lit se révèle par exemple très réussie) et enfin émouvante, grâce à trois interprètes qu'il a parfaitement su choisir et diriger.

Car ils sont trois, en effet, sur la scène du La Bruyère. Jean-Paul Bordes incarne avec une prestance certaine l'ami Hemingway. Intelligent, mesuré, subtil, son jeu offre une appréciable dimension à un second rôle important. Nous évoquions les deux autres en introduction. Julien Boisselier est un Scott tour à tour frivole, amoureux, sexy, soucieux, malheureux, torturé, avec à chaque fois la même justesse. Nous sommes heureux de le voir exploiter l'ensemble de ses possibilités au théâtre. Le couple qu'il forme avec Sara Giraudeau se révèle d'une évidence réjouissante. Beau et émouvant. L'actrice confirme elle aussi, spectacle après spectacle, son indéniable talent. Frêle d'apparence mais pétillante, tonique, et capable d'envolées étonnantes. Elle nous retourne totalement lors de son monologue de fin au cours duquel, ayant psychologiquement basculé de l'autre côté, elle se croit danseuse, sortant d'une boîte à musique, s'adressant à des tournesols. Une prestation qui devrait faire parler.

Enfin tout ce petit monde brûle les planches avec bonheur, et ce bonheur est communicatif.

Alors n'hésitez pas.

Jusqu'à la fin décembre.

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Photo : Lot