Magazine France
Il n'a pas déclaré la guerre à la Syrie. La France ne fait plus de guerre seule depuis longtemps, avant même le siècle d'avant le précédent.
La France donc, cette semaine, a évité une guerre en Syrie qui, d'ailleurs, n'avait jamais été annoncée ni promise. Elle pouvait se concentrer sur les 34 travaux industriels de Montebourg, s'effrayer de ces avis d'imposition qui encombrent nos boites aux lettres, ou de l'ennemi de l'intérieur, le Front national. Contre la réforme des retraites, l'atonie de l'opposition était stupéfiante.
Adieu la Syrie
Le jour où la France, comme l'Europe, a dû abandonner la Syrie à son triste sort date d'il y a peu, deux ans déjà. Alain Juppé, alors ministre des affaires étrangères, échoue à convaincre ses interlocuteurs onusiens d'intervenir contre le régime de Bachar el-Assad. La répression contre les manifestants était déjà vive.
Le monde, en tout cas celui qui pouvait faire quelque chose, a laissé les Syriens se débrouiller.
Puis, un massacre chimique, en avril. Et un autre, en août. Des images, les Etats Unis, la France, le Royaume Uni croient pouvoir saisir ce drame, l'émotion et l'écoeurement pour enfin faire craquer Russie et Chine. D'autres se lancent avec autant d'ardeur contre toute intervention. Tous les arguments sont bons. Ils s'effraient. Ils ont été rassurés. Deux ans plus tard, la Syrie reste un merdier que l'on laissera aux Syriens. L'opposition islamiste terrifie, l'opposition démocratique indiffère. Lundi, la Russie rebondit sur une idée américaine ou polonaise, elle suggère à la Syrie de placer son (immense) stock d'armement chimique (qui officiellement n'existait pas) à un contrôle international. Bachar El Assad accourt et applaudit. Il accepte tout et sans conditions.
Le gars était si innocent de ce massacre du 21 août qui le stressait au point de tout lâcher, ou presque.
Car la pression, le risque d'une intervention militaire franco-américaine, malgré l'absence de validation onusienne et parlementaire, étaient suffisamment inquiétantes pour que ce boucher s'empresse de tout céder, sauf l'essentiel: vendredi, l'ONU reçoit la demande syrienne d'adhésion à la convention sur les armes chimiques. On sourit. L'empressement de cet Etat "innocent" de tout et de rien, du plus grave et du plus dramatique, à "régulariser sa situation internationale" pose quelques questions: les menaces d'intervention occidentale étaient donc bien sérieuses. A moins que la culpabilité ne fut encore plus grave. Samedi, Russie, Etats-Unis et Syrie confirment leur adhésion à un règlement pacifique après quelques heures de négociations à Genève.
La Syrie officielle, en fin de cette triste semaine, semblait donc obtenir la clémence internationale, France exceptée, et éviter une quelconque sanction. En France, ce "lâche", très "lâche" soulagement nous marquera longtemps.
Vendredi, on apprenait de l'ONU que les preuves du massacre chimique du 21 août étaient "accablantes". Il reste à prouver que Bachar el Assad, si empressé de se rallier au désarmement anti-chimique, était coupable.
Sur ce dossier international, Hollande singerait Mitterrand. Hier, Sarkozy agissait comme Bush, avant de penser sur le tard qu'il pouvait être de Gaulle et terminer comme Le Pen.
Bonjour les impôts
En France, l'actualité échauffée était tout autre: ça couinait sur les impôts. Il y avait encore quelque éditocrates pour s'effrayer de prochaines hausses. On nous matraquait qu'Hollande nous matraquait. La manoeuvre était facile. Pierre Moscovici était pourtant ravi, ce mercredi, en confirmant que 80% des "efforts" pour rétablir le budget de la Fraaaaaaance seront donc des "économies" de dépenses publiques - . Laurent Mauduit, pour Mediapart, pouvait enfin s'étrangler contre la "révolution conservatrice" de Pierre Moscovici. Le problème de l'outrance est qu'elle décrédibilise la critique dans son ensemble.
Car nous pouvions être critiques contre cette équipe Hollande. Mais certainement pas contre un projet de loi de finances pas même encore présenté. La chose sera faite le 25 septembre. Quelques mesures ont été annoncées. Aurélie Filippetti (Culture) promet une baisse de TVA sur les salles de cinéma. Quelques niches sont convaincues de suppression. Il y a aussi, et surtout, le dégel du barème de l'impôt sur le revenu - soulagement pour 16 millions de foyers -; la (malheureuse) hausse de TVA votée l'an dernier, un nouveau rabot sur le quotient familial, la fin d'une défiscalisation des frais de mutuelle pour ces salariés qui en ont une.
Mardi, les manifestations contre la réforme Ayrault des retraites est un échec. De gauche à droite, nous n'avions pourtant pas épargné le projet de critiques. Même le MJS avait appelé à descendre dans la rue, aux côtés de la quasi-totalité des syndicats de salariés, et les forces du Front de Gauche. Mais les mots d'ordre étaient trop confus, les slogans contradictoires. La manif fait flop. A Bruxelles, un sous-commissaire ose clamer que la France manque de "réformes". Ayrault lui répond d'un court coup de boule verbal:
Mercredi, Najat Vallaud-Belkacem s'agace de ces sites de désinformation contre l'IVG. Et contre ces pharmaciens qui ne supportent pas qu'on puisse vendre des tests de grossesses hors de leurs murs.
Jeudi matin, Arnaud Montebourg présente 34 chantiers industriels. L'initiative est belle, ce futur semble déjà si proche - Avion électrique, Satellite à propulsion électrique, Dirigeable pour les charges lourdes, etc.
L'autre sujet de cette nouvelle Sarkofrance était l'effroi provoqué par quelques sondages et la une du Monde, vendredi. Le quotidien du soir nous promettait la conquête du pouvoir par le Front National, la Berezina aux prochaines municipales. A l'Elysée et ailleurs, on s'inquiète à peine, mais leur responsabilité est énorme. Aussi énorme que celle d'une opposition de gauche qui ne sait convaincre. Si tout allait bien et vite, la protestation xénophobe et rageuse n'aurait pas à s'exprimer ainsi. Si cette "Vrauche" si critique réussissait quelque chose, si l'ex-droite républicaine jusqu'à François Fillon lui-même ne lui faisait la course, ce même FN n'aurait pas si grande audience sondagière. Que le président d'un groupuscule des jeunesses de la droite populaire (sic!), Pierre Gentillet - retenez son nom - clame sur Twitter: "La laïcité chez Peillon c'est de prénommer ses enfants : Salomé, Maya, Elie et Izaak", ne nous étonne plus. Une certaine droite est pourrie de l'intérieur.
La montée du Front national est un triple échec, du PS "au pouvoir", de l'UMP frontisée, et de la gauche tétanisée.
La France, nous confirme l'INSEE ce jeudi, compte 14% de pauvres, près de 9 millions de personnes dont la moitié vivant avec moins de 790 euros par mois. A Davos, quelques experts surpayés classe la France moins compétitive que l'Arabie Saoudite ou Singapour. Ils ont fait un "gros" sondages chez quelques patrons. Mais n'ont pu évaluer le degré de liberté ni les pratiques du travail, "faute de données suffisantes". Cette intoxication est l'une des nuisance du monde moderne, une autre saloperie en col blanc.
Les entreprises du CAC 40 devraient reverser 38 milliards d'euros de dividendes cette année.
A bon entendeur...
Crédit illustration: DoZone Parody