Du pain et des jeux (3)

Après la Deuxième guerre mondiale, on a pris grand soin de distinguer entre Allemands et Nazis. Comme il n’était pas concevable d’imputer à un peuple tout entier les horreurs de cette époque, on s’est efforcé de les attribuer au seul régime et à ses suppôts. Il convient cependant de ne pas oublier qu’Hitler ne s’est pas emparé du pouvoir mais y est parvenu en toute légalité à la suite d’élections démocratiques.
Il a eu l’habileté de donner à son peuple des jeux. Qui n’aurait pas été emporté par ces grandes messes païennes où, sur des places monumentales, parmi d’immenses oriflammes rouges frappées de svastikas, des centaines de milliers d’Allemands acclamaient bras tendu des troupes casquées et bottées défilant au pas de l’oie, au son de fanfares joyeuses ? On soulevait ainsi l’enthousiasme des foules qui, gorgées de rêve, en oubliaient la réalité. Et le danger d’une telle confusion, c’est que, les yeux aveuglés par le rêve, on martyrise la réalité.
Je ne veux bien sûr établir aucune analogie entre cette époque maudite et notre situation politique. Mais qu’avons nous vu récemment dans le pays de Montesquieu et des droits de l’homme ?
- le Président de la République tente de contourner une décision de la plus haute autorité judiciaire de la France, le Conseil Constitutionnel.
- le même qui, en mars 2007, disait : « Je ne passerai jamais sous silence les atteintes aux droits de l’homme au nom de nos intérêts économiques », fraternise avec des Poutine, Kadhafi, Hu Jintao, Moubarak, Ben Ali et autres.
- des policiers chinois interviennent à Paris sans réaction de notre police.
- un Kényan se pend après avoir appris le rejet définitif de sa demande de droit d’asile. Il y a quelque 60 ans, M. Sarkozy père, fuyant sa terre natale sous le joug communiste, avait, heureusement pour lui, été mieux accueilli).
- des immigrés en situation irrégulière, face à nos policiers, préfèrent sauter par la fenêtre ou dans la Marne.
- d’autres immigrés, moins désespérés, sont reconduits en avion par des fonctionnaires de police motivés par la promesse de beaux voyages.
Combien de jeux, olympiques ou non, de fictions baptisées télé-réalité, de compétitions sportives, de publicités édéniques, de loteries, de lotos, d’euro-millions, de qui veut gagner, de qui veut prendre sa place, de millionnaires, de tiercés, de gazettes télévisées vantant les mimosas de la côte d‘Azur ou le dernier sabotier d’Auvergne, va-t-on nous asséner pour nous faire oublier le prix du pain et cette sinistre réalité !