Election municipale à Marseille : scrutin sous tension

Publié le 12 septembre 2013 par Délis

Marseille 2013 capitale de la culture ! A dire vrai on l’aurait sans doute oublié si le site officiel de la cité phocéenne ne conservait pas en Une un bandeau publicitaire rappelant l’information. La nouvelle flambée de violence constatée depuis le début de l’année est devenue le principal sujet d’inquiétude du Ministre de l’Intérieur Manuel Valls et des élus locaux. C’est dans ce contexte hautement sensible que se lance la campagne municipale qui doit décider, au printemps prochain, si l’increvable Jean-Claude Gaudin (UMP, 73 ans, maire depuis 1995) doit rester en poste ou si le temps de l’alternance est venu dans cette ville que l’on surnommait jusqu’à peu « le Chicago des années 1930 ».

Deux ans après l’élection de François Hollande et les élections législatives, la ville de Marseille  bouillonne, aujourd’hui plus encore qu’à la normale, même si l’attention médiatique semble faire oublier que 2013 est encore loin des taux de mortalité constatés dans les années 1980 où Marseille enregistrait près d’un assassinat par…semaine.

Politiquement, la bataille s’annonce serrée, comme ce fut le cas lors du dernier scrutin municipal où Jean-Claude Gaudin, maire sortant, l’avait emporté par moins de 5 000 voix d’avance et 50,42% des suffrages. En 2012, là encore, l’avance du candidat UMP (Nicolas Sarkozy) ne s’était mesurée qu’au microscope électoral avec environ 6 000 suffrages d’avance sur François Hollande. En 2008, comme en 2012, Marseille avait voté pour l’UMP, démontrant ainsi que son centre de gravité penchait à droite, bien aidé en cela par un Front National en forte progression (8,76% pour Stéphane Ravier en 2008 et 21,22% pour Marine Le Pen au 1er tour de la présidentielle 2012).

Alors que les candidats sont en passe d’entamer la campagne, un premier sondage vient établir un état des lieux de l’opinion. L’enquête publiée par l’Ifop  est particulièrement intéressante et révèle des lignes de forces qui devraient marquer ce scrutin qui, comme à Paris et Lyon, s’opère par secteurs, chacun rassemblant ici deux arrondissements. Ainsi, ce sondage, s’il n’est pas méthodologiquement identique à une élection simulée, permet de saisir la complexité de la situation et la tension qui agite le Vieux Port.

A gauche, l’enquête démontre que les sympathisants du Parti Socialiste sont en balance entre la Ministre de l’Exclusion, Marie-Arlette Carlotti (25%) et Samia Ghali (24%). Élément intéressant, ces deux candidates aux primaires  sont celles qui ont été les plus virulentes sur la question de la violence, la Ministre n’hésitant à parler de « système mafieux » sur la Canebière alors que Samia Ghali avait émergé il y a un an en réclamant l’intervention de l’armée à Marseille. On notera cependant qu’un sondage OpinionWay pour Public Sénat fait état d’une percée de Patrick Mennucci qui se situe à 17% des intentions de vote des marseillais contre 13% pour Carlotti.

Pour le 1er tour, le sondage Ifop permet également de mesurer l’avance que conserve, à ce stade, Jean-Claude Gaudin : 34% soit 13 pts devant le candidat PS qui serait classé 3e derrière le candidat FN, Stéphane Ravier (25%). Au second tour le maire actuel l’emporterait avec 40% des voix contre 38% pour le PS (39/39 en juillet) malgré une triangulaire annoncée et un FN renforcé comme jamais (22%).

En effet, l’information principale de ce sondage est sans doute ici, car le FN démontre qu’il progresse encore à Marseille et notamment chez les personnes âgées (32% au 1er tour) et chez les artisans (39%) même si pour cette frange de la population l’échantillon semble un peu léger comme l’indique l’Ifop. Une progression rendue possible notamment grâce à des prises à droite (20% des électeurs Gaudin de 2008 se reporteraient sur le candidat Ravier).

Marseille est emblématique d’un scrutin où la Gauche arrive dans la position du défenseur qui sait qu’il ne pourra tout défendre même si la droite ne semble pas en mesure de s’octroyer de nombreuses villes de plus de 150 000 habitants. Non, ce scrutin devrait être celui qui permet au FN de franchir une étape cruciale dans sa mue version Marine Le Pen. Loin d’une vague bleue marine, le FN devrait parvenir à se maintenir dans de très nombreuses villes (barrière à 10% des scrutins exprimés) et donc à consolider son implantation, à densifier son maillage local, élément clef qui fait encore défaut au parti à la flamme. Autour d’Hénin-Beaumont (Rouvroy, Evin-Malmaison, Wingles, etc.), dans le Var (Gogolin, Le Luc) ou dans les Bouches du Rhône (Tarascon, Sainte-Marie de la mer, Miramas) le FN peut même espérer s’emparer de la Mairie…D’autant que les leaders de droite, notamment François Fillon, ne semblent pas tous convaincus de la stratégie à adopter en cas de duel PS-FN au second tour.