Envoyé pour trois mois à Shenzhen, en Chine, pour superviser un studio de dessin animé, le Canadien Guy Delisle raconte par le menu les rapports parfois incongrus, souvent drôles, toujours enrichissants qu’il entretint tout au long de son séjour avec ses collègues et amis, malgré la barrière de la langue et avec un style unique, incisif et observateur. On retrouve déjà dans ces pages le Delisle au trait sûr et incroyablement expressif de Aline et les autres, le dessin nuancé et souple au service d’un journal sans complaisance où le narrateur expose ses découvertes, ses doutes et ses incompréhensions avec beaucoup de tendresse. Un guide de voyage atypique en somme, qui donne furieusement envie de lire le prochain.
J’aime beaucoup les romans graphiques, vous le savez, d’autant plus lorsque ceux-ci parlent de voyage, d’évasion ou de cultures étrangères. J’ai lu pas mal de choses de ce type, notamment sur le Japon mais jamais sur la Chine. C’était donc une totale découverte, non seulement du mode de vie du pays mais aussi et surtout de l’auteur, Guy Delisle. Dans Shenzhen, celui-ci raconte les 3 mois qu’il passé dans la petite ville du même nom et où il ne se passe rien. D’ailleurs, il mentionne dans son récit sa crainte de pas trouver assez de contenu pour réaliser cette BD tant il s’ennuie. Car le pauvre aura passer le plus claire de son temps sur place seul, à parfois ne pas parler à qui que ce soit.
Pourquoi ? tout simplement parce que Shenzen est une ville sans intérêt (les villes proches comme Canton semblent, d’après l’auteur, bien plus accueillantes et intéressantes) ou très peu de chinois parle anglais (du moins à l’époque du récit, en 1997). On imagine facilement toute la difficulté que cela représente de se trouver seul, dans un pays inconnu dont on ne parle pas la langue. L’honnêteté avec laquelle Guy Delisle partage son expérience rend le livre très touchant.
Malgré tout l’auteur réusit à nous parler de son quotidien à travers de nombreuses anecdotes personnelles et d’observations parfois très drôles (notamment pour tout ce qui touche à la nourriture). On y apprend pas mal de choses sur la culture chinoise mais aussi sur le métier d’animateur graphique.
On ressent à travers ses dessins et son récit toute la solitude dont il est victime mais aussi ses interrogations sur la liberté.