Ça y est, le Ministère de l’Éducation Nationale met enfin en place une Charte de la laïcité "à l’école", c’est-à-dire en fait dans tous les établissements du 2nd degré, publics ou privés sous contrat. Cette charte qui sera affichée "de manière à être lisible par tous" et jointe au règlement intérieur, a pour vocation "de rappeler les règles qui nous permettent de vivre ensemble dans l’espace scolaire, mais surtout d’aider chacun à comprendre le sens de ces règles, à se les approprier et à les respecter" dit le ministre. Cette charte en 15 articles est donc avant tout un acte de pédagogie ; c’est la 2e en date après celle des services publics.
"Rappeler les règles" est en effet le terme juste puisque l’article 14 reprend la loi de 2004 interdisant les tenues ou signes religieux à l’école. D’autres articles plus novateurs élargissent le champs de la laïcité et rappellent que ce principe est une ouverture et un progrès : la construction d’un libre arbitre et d’une personnalité, la liberté de conscience, l’égalité filles-garçons… L’article 13 rappelle aussi que les règles de la république française – et donc de son école – sont au-dessus des règles religieuses.
Mais pour qui a été élève dans les années 70 ou 80, tous ces articles ont quelque chose d’ubuesque. En ces temps anciens que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre, nul besoin d’une loi ou d’une charte de la laïcité pour la bonne et simple raison qu’il n’y avait aucun problème, aucune remise en cause. En fait ces 15 articles sont révélateurs en creux des attaques contre la laïcité – et plus généralement contre les valeurs de la république française – à l’école, lieu d’éducation et donc lieu de pouvoir : port de tenues dictées par la religion, refus de participer aux cours de gym, remise en cause du contenu des enseignements en biologie ou en histoire, prosélytisme, repli identitaire, demande communautariste de viande halal dans les cantines par exemple…
Car ne nous voilons pas la face, même si cette charte – comme la loi de 2004 – concerne toutes les religions, elle répond à des attaques venues pour l’essentiel de la communauté musulmane, travaillée au corps par des mouvements intégristes et/ou islamistes. Le résultat est cet article hallucinant : "Aucun élève ne peut invoquer une conviction religieuse ou politique pour contester à un enseignant le droit de traiter une question au programme" ! On en est là ! On pourrait d’ailleurs aussi afficher cette charte à l’université. Et après on s’étonne que les français soient réticents à l’idée d’aller aider des rebelles syriens qui hurlent "allah ouakbar" à tout bout de champs… Mais ceci est un autre sujet… La France en tous cas n’est pas le seul pays à faire face à ces problèmes : il y a aussi le Québec [Pour un Québec laïque et pluraliste] ou la Belgique [Inscrire la laïcité dans la constitution ?].
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