Les Perroquets de la place d’Arezzo

Par Mathylde

"Le perroquet fait semblant de discourir, comme l’amant. II roucoule des vocables connus, éprouvés mais que veut-il manifester ? Lorsqu’il emploie des mots, le son compte plus que le sens. Quelle langue parlent donc les perroquets sous les termes français, anglais ou espagnols qu’ils emploient ? Quelle est leur intention ? Que sous-entendent-ils ? Les peintres répondent le désir."

Le nouveau roman d’Eric-Emmanuel Schmitt,  aussi régulier dans la publication de ses textes que sa compatriote Amélie Nothomb, est assez imposant. Car pour faire le tour des formes que peuvent prendre le désir et les manifestations de l’amour, tant physiques que spirituelles, il y a besoin d’un certain nombre de pages…

Organisé comme un roman choral, polyphonique, ce texte fait se succéder plusieurs voix, tour à tour féminines ou masculines, jeunes ou mûres. Au début, le lecteur peut être un peu surpris face à la pluralité des personnages et se pose vite la question de savoir ce qui peut bien les rassembler. Ces personnages, mus par leur envie d’aimer, par leur passion, par leur attrait pour une sexualité atypique, vivent  sous l’oeil attentif de dizaines de perroquets vivant sur une place bruxelloise, la place d’Arezzo, exerçant sur eux un magnétisme érotique qui bouleverse leur existence pour leur bonheur… mais aussi pour le pire parfois !

Bien que ce roman soit assez conséquent, il se lit relativement vite et le lecteur est vite entraîné dans cette mécanique du désir. A son tour, il se jette sur son pavé, avide de connaître les pérégrinations amoureuses des habitants du quartier.

Schmitt maîtrise incontestablement la construction de son texte : les chapitres sont assez courts et font alterner les points de vue, donnant envie de lire plus vite pour connaître l’évolution des relations entre les personnages, tout en étant relié au même mystère : un corbeau (mais cette fois, ce n’est pas un oiseau !) envoie à chaque personnage, ou presque, un billet doux tenant en cette phrase : "Ce mot simplement pour te signaler que je t’aime. Signé : tu sais qui."

Corbeaux, perroquets et colombes se mêlent, métaphores des méandres du désir, semant un peu de suspens dans ce roman de la rentrée littéraire.

Le personnage de Baptiste, l’écrivain, est particulièrement intéressant et son encyclopédie de l’amour, qu’on peut lire à la fin du roman, assez drôle et bien trouvée !

Eric-Emmanuel Schmitt, Les Perroquets de la place d’Arezzo, Albin Michel, Août 2013