Qui a étendu ses bras au large
en agitant les nageoires de ses pieds
les yeux fixés dans l’obscurité de sa respiration,
qui s’est plongé au fond de la pupille
d’un mérou dans son antre
oubliant l’air, qui a attaché
au mât une toile et calculé
sa route et sa dérive, qui a ramé
debout sur de longs bateaux : ceux-là savent
que les eaux ont des visages.
Et sur les visages affleurent
tempêtes, bonaces, courants
et le saut des poissons qui rêvent de voler.
*
Chi ha steso braccia al largo
battendo le pinne dei piedi
gli occhi assorti nel buio del respiro,
chi si è immerso nel fondo di pupilla
di una cernia intanata
dimenticando l’aria, chi ha legato
all’albero una tela e ha combinato
la rotta e la deriva, chi ha remato
in pieidi a legni lunghi : questi sanno
che le acque hanno volti.
E sopra i volti affiorano
burrasche, bonacce, correnti
e il salto dei pesci che sognano il volo.
***
Erri De Luca (né en 1950 à Naples) – Oeuvre sur l’eau (Opera sull’acqua, 2002) – Traduit de l’italien par Danièle Valin