Tribune libre de Jean Dumà.
Lorsque les coeurs commencèrent à se momifier, quand la civilisation occidentale devint incohérente à force de bruit, à l’amorce de l’usure et de la fin -puisque tout en a une, les hommes durent justifier leurs rites et leurs survie jouissive par quelque raison fumeuse. Ils inventèrent alors le christianisme. A défaut de vivre, comme des retraités s’inventent toutes sortes de jeux pour éviter de fixer la mort, les vieillards occidentaux se construisirent une maison, une structure apparemment solide. Hélas, comme tous les trucs en « isme », le christianisme n’est qu’un mensonge supplémentaire dans le grand théâtre humain, une vaste construction mentale d’auto-justification.
Dans ses dérivés socio-prolétariennes ou bourgeo-élitiste, dans la projection progressiste ou le passéisme conservateur, la fumisterie du « christianisme » n’est qu’un déguisement crétin, un bidonnage babeliforme du moi qui s’impose, un bricolage socio-structrant, sur la base d’une ancienne croyance pratique et identitaire.
En vérité, le christianisme est aussi faux qu’un cercle rotarien, aussi mensonger qu’une accolade diplomatique.
Car seul existe de toute éternité le Christ, Jésus-le-Dieu-Fait-Homme, le juif errant sur les routes de Galilée et de Judée. Seul compte le Dieu Incarné suant dans ses sandales et dormant la tête sur une pierre au hasard de la mission, le Serviteur souffrant à qui des romains d’occupation tiraient la barbe. Seuls éclairent les yeux de Jésus, seuls sont fiables ses paroles. Sur Lui seul peut s’élever une civilisation, Lui, ressuscité le troisième jour.
Face à Lui, les lois sont mineures, risibles, interprétables. Devant Son regard, les trucs en « isme » deviennent ridicules, insignifiants. Et, à l’inverse, la Résurrection -sans qui notre foi est vaine- fait éclater nos petites constructions intérieurs, nos certitudes urbaines et les assises de nos préjugés sociaux.
Ainsi, se réclamer du christianisme au XXIème siécle est vain, inutile, insensé. Seul compte pour chacun et pour tous le Christ, Dieu incarné, créateur, aimant et animant, qui dépasse toute construction, tout cadre.
Et quand des mouvements imbéciles se veulent a-confessionnels par peur de crier le nom du Dieu incarné, quand ces mêmes se targuent de réciter Camus l’absurde, Verlaine le criminel ou Kipling le franc-maçon, dans leurs rassemblements assis -par peur de crier la résurrection ?-, j’avoue que je hais le crypto-christianisme plus que tout au monde, parce qu’il est glacé, insensé, réversible, et qu’il me paraît être une autre mise à mort de Jésus-Christ.