Jean-Louis Servan-Schreiber, dans son livre "L'art du temps" (1983, Fayard), nous a gratifié de quelques vérités qui sont toujours d'actualité. Je n'ai pas résisté à la tentation de vous livrer une synthèse de sa pensée en 25 points clés.
- Le paradoxe du temps, c’est que rares sont ceux qui estiment en avoir suffisamment, alors que chacun dispose de sa totalité.
- Essayer de faire la même chose en moins de temps.
- Faire plusieurs choses en même temps.
- Le temps c’est de l’argent, mais la réciproque est tout aussi vraie.
- Lorsque nous consommons, nous tenons compte du prix mais rarement du temps de consommation. Combien de résidences secondaires, de disques, de livres, etc. sont-ils véritablement utilisés ?
- Nous réfléchissons bien plus à l’emploi de notre argent, renouvelable, qu’à celui de notre temps, irremplaçable.
- Nous consacrons des miettes de temps à une multitude de plaisirs, au lieu de profiter à loisir des rares qui nous conviennent vraiment.
- Voici quelques voleurs de temps externes : les appels téléphoniques, les collègues qui viennent vous faire la conversation ou exposer leurs problèmes, la politique de la porte ouverte, les visiteurs qui débarquent à l’improviste, le personnel incompétent, les chefs, les sorties d’affaires, les réunions trop fréquentes ou mal préparées, l’entretien et la réparation de machines, les rendez-vous pour les enfants, les tâches domestiques, les enfants, etc.
- 9. Voici quelques voleurs internes : les objectifs confus et changeants, l’absence de plan de travail quotidien, les travaux encore en cours, l’absence de dates limites imposées, la tendance à en faire trop, le perfectionnisme, le manque d’ordre, la délégation insuffisante, l’attention excessive aux détails, le retard à traiter les conflits, la résistance au changement, les intérêts dispersés et trop nombreux, l’inaptitude à dire non, une mauvaise communication, de mauvaises décisions, la manque de forme, etc.
- Les quatre injonctions de Kahler vis à vis de l’action, qui occasionnent souvent des pertes de temps : les « dépêche-toi », les « sois parfait », les fais-moi plaisir » et les « sois fort ».
- Sérénité constante, disponibilité aux autres, multiples intérêts, les vrais maîtres du temps, parce qu’ils savent prendre du recul, y ajoutent l’humour.
- Le maître du temps a fait siennes les notions clés suivantes : Il sait à tout moment à quoi il veut utiliser son temps. Il a développé son instinct et son expérience du temps que prend [réellement] chaque acte ou phase de sa vie. Il ne vit qu’un seul temps (professionnel ou personnel, de routine ou d’exception), le sien. Il désencombre sa mémoire du « quoi » au profit du « comment » et du « pourquoi », car il dispose de mémoires annexes qui lui permettent de ne rien oublier. Il concentre sa réflexion chaque jour sur l’usage qu’il fait de son temps en fonction des objectifs qu’il souhaite atteindre.
- Devancer le temps en pensée nous dote de trois pouvoirs distincts : prévoir, vouloir, se préparer.
- Chaque temps a son importance. Voici quelques types de temps : le temps du corps, le temps des loisirs, le temps du plaisir, le temps de la consommation, le temps des voyages, le temps du repos, le temps de l’amour, le temps des autres, le temps de la famille, le temps de la lecture, le temps de développement, le temps de la création, le temps de la méditation, le temps de la régression, le temps de la solitude.
- 15. De nos jours, si l’on veut être parmi les meilleurs en quoi que ce soit, il faut accepter, par manque de temps, d’être parmi les moins bons en bien d’autres domaines.
- Pour se faire un ami du temps, il convient de la traiter comme il se doit avec un ami : en lui consacrant du temps.
- Un emploi du temps ne se gère pas, il se cisèle. Il est plus raisonnable de déléguer sa carte de crédit que son agenda.
- La maîtrise du temps commence avec la maîtrise de la mémoire.
- Utilisez des fiches. Il m’arrive d’en écrire 30 à 40 par jour.
- Longtemps j’ai admiré les hommes pressés. Jusqu’à ce que je réalise qu’ils n’étaient que stressés. Ce que je redoute le plus dans le stress, ce n’est pas qu’il tue, c’est qu’il empêche de goûter la vie.
- De même qu’on éteint un incendie de forêt par un contre-feu il faut, pour lutter contre le manque de temps, consacrer du temps à la réflexion sur l’emploi de son temps : donner du temps au temps.
- Il est impossible d’éliminer les perturbations du temps, mais il est essentiel de pouvoir d’emblée les situer par rapport à son programme.
- Si vous n’arrivez pas à commencer ce que vous aviez prévu de faire, ne faites rien ! Mais vraiment rien. Restez assis les mains sur les genoux, les yeux clos, essayez de faire le vide dans la tête. Tenir le coup jusqu’à ce qu’on se sente en état de véritable inaction, mentale et physique. Rouvrir les yeux et commencer à entreprendre immédiatement ce qu’on devait faire.
- En conclusion, l’application quotidienne de ces quelques principes m’a apporté ceci : je travaille à peine moins (les 35 heures, c’est tellement bien que je les pratique deux fois par semaine) ; je me concentre sur l’essentiel ; je ne suis pas stressé ; je profite de la vie ; j’ai besoin de faire des progrès (toujours améliorer ses techniques).
- Deux citation sur le temps que Servan-Schreiber a épinglées. Claudel a dit : « Ce n’est point le temps qui manque, c’est nous qui lui manquons. » La Bruyère a écrit : « Le regret qu’on les hommes du mauvais emploi du temps qu’ils ont déjà vécu ne les conduit pas toujours à faire meilleur usage de celui qui leur reste à vivre. »
Jean-Louis Servan-Schreiber (né le 31 octobre 1937), est essayiste, patron de presse et journaliste. Créateur de L’Expansion en 1967 et de Radio Classique, il a fait de Psychologies magazine un succès. Il a lancé, en 2010 le magazine CLÉS dont le thème est "trouver du sens, retrouver du temps", pour nous aider à mieux comprendre le XXIe siècle.Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont deux en particulier sont consacrés à la gestion du temps, avec des titres évocateurs :
- L'Art du Temps (1983), Fayard.
- Le nouvel art du Temps (2000), Albin Michel.