À l’occasion du conflit syrien, le président français nous offre une magnifique démonstration de ce qu’il ne faut pas faire quand on n’y connaît rien, qu’on est mal entouré et mal conseillé et qu’on agit exclusivement pour des buts personnels assez grossiers.
L’observation attentive de ce qui s’est passé sur les deux dernières semaines ne laisse aucun doute : François Hollande n’a aucun talent de leader et confirme son charisme d’abribus éteint.
Le développement du conflit syrien, qui dure tout de même depuis deux ans, est de toute façon d’une tout autre nature que ce qui pouvait attendre le petit François au Mali. D’une part, la situation géographique de la Syrie la place au milieu d’un écheveau d’alliances complexes et antagonistes ; entre l’Europe, la Russie, la Chine, les États-Unis, l’Irak, l’Iran, la Turquie, le Liban, Israël, et l’Arabie Saoudite, on saisit sans mal que la zone soit une poudrière. À ces alliances étrangères, il faut ajouter une dynamique intérieure épineuse qui mêle le politique au religieux et les factions aux ethnies. Enfin, la Syrie jouant aussi un rôle dans le transit pétrolier, ceci ajoute au tableau quelques éléments de conflit potentiel supplémentaire.
Le brave François a donc déboulé au milieu de ce conflit, outillé de l’expérience solide acquise sur le terrain du Conseil Général de Corrèze, entouré de pointures en matière de Défense et d’affaires étrangères comme Le Drian et Fabius. On imagine sans mal les grands moments de certitudes solides qui régnèrent lorsqu’il s’est agi d’écrire les plus belles prises de positions du Président, exprimant publiquement la nécessité d’intervenir suite à l’usage d’armes chimiques. Deux ans après le début du conflit, plusieurs mois après les premiers doutes sur l’utilisation de ces armes … On ne peut que douter de la spontanéité de l’indignation, dont les stocks sont au plus bas depuis un moment en la matière.
La suite, tout le monde l’a vue se dérouler comme en accéléré, avec le sérieux et la dignité d’un film de Buster Keaton auquel n’aurait manqué qu’un ragtime endiablé : Hollande qui s’indigne, Obama qui embraye, Hollande qui veut intervenir en Syrie, vite, vite, Obama qui veut intervenir, vite, vite, Cameron qui veut intervenir, vite, vite, Cameron qui demande son avis au parlement britannique qui refuse, Cameron qui s’écrase, Obama qui hésite, Hollande qui persiste, Obama qui va demander l’avis du Congrès, Hollande qui continue sur sa lancée, Obama qui compte fébrilement ses soutiens, Hollande qui commence à sentir que toute l’affaire est mal engagée, Poutine qui dit niet, Hollande qui s’acharne, Poutine qui maintient et qui traite Kerry de menteur, Obama qui se sent un peu seul, même en comptant Hollande, qui, finalement, hésite.
Précipitation, agitation, gesticulation : impossible de ne pas voir, comme la plupart des personnes un tant soit peu sérieuses, que les beaux discours de Hollande et d’Obama, bellicistes, semblent construits pour occuper leurs opinions publiques. Dans l’un et l’autre pays, les cotes de popularités sont basses, les résultats des politiques menées sont désastreux, et les perspectives franchement pas reluisantes. Tentant le tout pour le tout, les deux socialistes tentent l’action pour l’action, même si cela doit se traduire par plus de morts syriens et de nouveaux morts français et américains.
De la même façon, Hollande et le gouvernement Ayrault auront bien tenté d’épater la galerie avec la publication d’un rapport d’analyse « déclassifié » dans lequel s’étalent quelques affirmations étayées exclusivement par le poids du papier et le sérieux des entêtes officielles, rapport avec lequel ils n’auront convaincu personne, à l’exception peut-être des journalistes, avides de sujets. Pour le moment, personne n’est capable de prouver que les armes chimiques furent utilisées par Assad ou ses opposants. Et plus à propos, personne n’est capable d’expliquer de façon claire pourquoi on devrait subitement débarquer en Syrie alors que les massacres s’y déroulent depuis deux ans sans qu’il ait été jugé bon, auparavant, d’intervenir.
Moyennant quoi, Hollande — qui était, pour rappel, le premier à brailler sur l’impérieuse nécessité d’un vote parlementaire avant toute intervention en Irak — tente maintenant de se sortir de son mauvais pas en expliquant vouloir attendre le rapport de l’ONU. Accessoirement, tout honnête homme aura bien du mal à prendre ce fameux rapport pour argent comptant, si l’on veut bien se rappeler ce qui fut fait des précédentes affirmations de Carla del Ponte, membre de la commission d’enquête des Nations Unies en mai dernier, pas du tout politiquement correctes.
Et la reptation ridicule du président Hollande est d’autant plus amusante qu’elle démontre toute l’hypocrisie qui agite, encore une fois, le Camp du Bien : qu’il est piquant de le découvrir ainsi ouvertement pour la Guerre ! Qu’il est rigolo de voir de frétillants abrutis écolos fermer leurs petits poings et réclamer une intervention (armée), alors que ce sont ceux-là même qui n’ont que principe de précaution à la bouche lorsqu’il s’agit de tout et n’importe quoi ! N’ont-ils pas conscience de l’obscénité de leur position quand d’un côté ils prétendent lutter contre les OGM mais sont de l’autre pour l’utilisation d’explosifs sophistiqués, de plomb et d’uranium appauvri sur des populations déjà lourdement mutilées ? Que sont intéressants les éléments de langage et les mensonges éhontés d’une porte-parlote du gouvernement, prétendant que la Syrie aurait signé des accords de non-utilisation des armes chimiques ! Quelle cohérence géniale de la minustre des droits de la femme se retrouvant subitement du même côté que des rebelles islamistes pas trop réputés pour leur souplesse vis-à-vis du droit des femmes !
Mais en attendant, où est la légitimité d’une telle action ? Elle ne provient ni de l’ONU, ni même d’un humanisme qui aurait honte de se faire appeler à l’aide comme prétexte, après deux ans de combats dans la région. Elle ne provient d’aucune preuve claire, d’aucun raisonnement logique, d’aucune raison supérieure qui justifierait à elle seule que le Camp du Bien puisse se retrouver, subitement, du même côté que des terroristes. Elle ne provient de rien de concret. Il n’y a pas de légitimité.
Il n’y a pas plus de moyens : avec une dette colossale et un déficit toujours plus gros, la France n’a absolument pas le début du financement de ce genre de galipettes méditerranéennes, qui pourrait de surcroît se solder lourdement ; rien n’interdit d’imaginer le Charles-De-Gaulle, coulé par un des derniers joujoux russes livrés aux Syriens. Voilà qui ferait un joli tableau de chasse pour Hollande.
Et surtout, le pauvre président n’a même pas le soutien de son peuple : les Français sont majoritairement contre cette intervention.
Il faut se rendre à l’évidence : Hollande a démontré avoir atteint, très largement, son niveau de compétence maximale lorsqu’il était à la tête de la Corrèze. La laissant endettée jusqu’au cou, il a pris les commandes du pays pour achever de l’enfoncer dans l’ornière dans laquelle le précédent président l’avait propulsée.
Le petit rond-de-cuir socialiste, déjà mal-à-l’aise avec un petit Conseil Général, n’aurait jamais dû se lancer dans la géopolitique internationale : en croyant faire une bonne affaire de politique intérieure, ce benêt pourrait nous déclencher la troisième guerre mondiale.