Il n’est plus possible de se taire sur ce qui se passe en Syrie. Je veux dire, vous l’aurez compris, sur les mensonges dont le Capital se sert tous les jours pour justifier une intervention armée dont vous, citoyens désargentés, allez payer les frais.
On nous avait dit que le méchant Saddam Hussein avait des armes de destruction massive. Personne ne les a jamais trouvées, même pas le général qui avait brandi une fiole de poison devant les députés de l’ONU. Et qu’est devenu l’Irak, depuis que l’Occident l’a libéré d’un tyran et lui a apporté la démocratie ? Je vous laisse le soin de compter le nombre des victimes des attentats quotidiens…
On nous avait dit que Kadhafi avait bombardé sa population qui réclamait un peu de liberté. Un médecin libyen, exilé à Genève, était monté à la tribune de l’ONU et avait parlé de 6.000 morts. On connaît la suite. L’Otan a bombardé et détruit ce pays, rasant des villes et faisant plus de 70.000 morts. On sait aujourd’hui que ce médecin n’avait d’autres preuves que les dires invérifiables de ses amis restés en Libye, lesquels, depuis, sont devenus ministres dans le nouveau régime qu’ils ont contribué à mettre sur pied par leurs mensonges. Et qu’est devenue la Libye aujourd’hui, ce pays le plus riche d’Afrique qui vivait de son pétrole ? C’est devenu un pays arriéré où des factions diverses se massacrent entre elles, tandis que le groupe Total exploite à son profit les puits de pétrole.
Et maintenant, que nous dit-on à propos de la Syrie ? Toujours la même chose, à savoir qu’un affreux dictateur est entrain de massacrer ses opposants. Ce dictateur serait tellement mauvais qu’il aurait sciemment gazé sa propre population, n’épargnant même pas les enfants. L’Occident généreux, une nouvelle fois, se propose d’aller rétablir la démocratie dans cette région du monde.
Les exemples précédents de l’Irak exsangue et de la Libye anéantie nous demandent pourtant de garder la tête froide et de réfléchir avant de donner notre assentiment à une intervention armée qui risquerait bien de dégénérer en conflit généralisé (car la Syrie n’est pas seule, elle, étant secondée par l’Iran et la Russie).
On nous dit que la Syrie possède des armes chimiques. C’est vraisemblable, toutes les armées en ont. Bachar el Assad, cependant, avait dit qu’il ne les utiliserait jamais contre son peuple (ce qui veut dire aussi qu’il pourrait les utiliser contre une agression étrangère si celle-ci devait avoir lieu, car il n’a jamais signé aucune convention de non-utilisation pas plus qu’Israël d’ailleurs). Aurait-il menti ? Rien n’est impossible. Pourtant, quel intérêt aurait-il eu d’utiliser de telles armes chimiques alors que d’une part son armée était en train de remporter la victoire (chaque jour des zones occupées par les soi-disant rebelles – en réalité un ramassis d’intégristes étrangers armés et payés par l’Occident- étaient reconquises) et que d’autre part des enquêteurs de l’ONU étaient justement présents à Damas. Je veux bien admettre qu’Assad soit un dictateur, mais il n’est pas fou et il a prouvé par le passé qu’il savait se montrer très prudent. Quel intérêt aurait-il eu d’utiliser des armes chimiques à dix kilomètres des enquêteurs internationaux ? Surtout que ces derniers venaient suite aux déclarations de Carla del Ponte elle-même, qui avait assuré que c’étaient les rebelles qui s’étaient rendus responsables, précédemment, de tels actes. L’armée régulière avait en effet découvert des armes chimiques bien dissimulées dans des tunnels qui étaient sous contrôle des djihadistes, armes chimiques qui comme par hasard provenaient d’Arabie, de Turquie et d’Europe.
Bref, les inspecteurs de l’ONU étaient à Damas pour enquêter sur les décès suspects qui avaient déjà eu lieu précédemment. Ils étaient donc à deux doigts de révéler au monde entier que l’Occident avait fourni des armes chimiques à des intégristes enragés et que ceux –ci n’avaient pas hésité à s’en servir. Et voilà que fort à propos survient une nouvelle attaque chimique, immédiatement imputée au régime, celle-là. On parle de 300 morts, de 1.300, de 1.600, les chiffres varient, ce qui prouve bien que rien n’est vraiment sûr ni vérifié. Bref, le monde entier s’alarme (ou plus exactement la presse occidentale, qui appartient aux industriels et aux vendeurs de canons, ne l’oublions pas, alarme le monde entier). L’ordre est donc donné aux inspecteurs de l’ONU de délaisser l’enquête en court et de se rendre sur les lieux du nouveau massacre, survenu comme par hasard au meilleur moment.
Qu’Assad en soit le commanditaire me semble fort improbable car il avait tout à perdre en agissant de la sorte. Par contre, pour ce qui est du camp adverse…
Qu’il y ait eu des mort et même beaucoup, cela ne fait aucun doute. Qu’on ait utilisé des armes chimiques, cela semble évident. Que le gaz ait été du sarin (bien connu de tous à cause de son utilisation lors de la guerre de 14-18), comme on tente de le faire croire pour émouvoir l’opinion, parait au contraire fort peu probable. En effet, les symptômes dont souffrent les victimes ne correspondent pas aux symptômes occasionnés par le sarin.
A ce propos, je tiens à signaler l’incohérence des articles publiés lors des premières attaques chimiques (celles que l’on a déjà tenté d’attribuer au régime d’Assad, mais qui selon Carla del Ponte provenaient bien du camp des « rebelles »). J’ai lu que les médecins avaient administré jusqu’à quinze doses d’atropine pour maintenir les victimes en vie. Or, tout citoyen ordinaire qui comme moi a effectué autrefois son service militaire sait qu’au-delà de deux doses, l’atropine est mortelle. C’est pour cela qu’on nous recommandait bien, si on devait jamais administrer une dose à un soldat blessé, de laisser l’ampoule vide bien en vue sur son uniforme, afin qu’une fois celui-ci transporté à l’hôpital, un médecin n’aille pas lui en administrer deux doses supplémentaires, ce qui l’aurait tué immanquablement. Tout cela pour dire que ces articles qui sont supposés recueillir les propos des médecins qui soignent les rebelles ne sont qu’un tissu de mensonges.
Mais revenons à ce qui nous occupe, à savoir la dernière attaque chimique qui a eu lieu, celle pour laquelle Obama et Hollande veulent punir Assad au nom de la morale. On remarquera qu’on nous a surtout montré des enfants. Aucun adulte n’aurait donc été touché ? Où étaient les parents de ces enfants quand les gaz les ont frappés ? Ce sont des questions que je me suis posées mais auxquelles je n’avais pas de réponse. La réponse, horrible, on la trouve peut-être ici :
http://www.voltairenet.org/article180127.html
http://www.comite-valmy.org/spip.php?article3874
Qu’ajouter après cela ? Ces articles sont-ils mensongers ? C’est possible, mais jusqu’à preuve du contraire je les tiens pour plus véridiques que ceux que l’on trouve dans notre presse. En effet, comme je l’ai déjà dit, Assad n’aurait eu aucun intérêt à utiliser des armes chimiques alors que son armée était tout doucement en train de gagner la guerre. Par contre l’opposition avait tout intérêt à arrêter l’avancée de cette armée en obligeant la communauté internationale à intervenir. Or on sentait Obama assez hésitant sur ce sujet. Malheureusement, il avait prononcé il y a un an une phrase qui se retourne maintenant contre lui. Il avait dit que l’usage d’armes chimiques constituerait une ligne rouge à ne pas franchir. Il suffisait donc de fabriquer des preuves, d’utiliser des enfants pour cela afin d’émouvoir la planète entière et d’imputer le crime au régime syrien.
Hollande et Cameron, sans même attendre les résultats de l’enquête de l’ONU, décident de partir en guerre. Cameron, cependant, est désavoué par son parlement. Du coup, Obama, qui hésite mais qui n’a pas le choix (car le lobby des armes et le lobby israélien le poussent à passer à l’action), se résigne à intervenir, mais il renvoie la responsabilité de l’attaque à son propre parlement. Hollande se retrouve donc seul, mais fidèle à ses convictions puisqu’il avait déjà annoncé lors de sa campagne électorale qu’il ferait de la chute de Bachar el Asad une priorité de son quinquennat. On ne parlait pourtant pas encore à l’époque d’armes chimiques. En quoi la politique d’Assad menaçait-elle la France ? Je ne dis pas que son régime soit le meilleur qui soit, mais au moins permettait-il aux pratiquants de nombreuses religions différentes de cohabiter en harmonie. Au lieu de cela l’Occident a attisé la haine entre sunnites et chiites, il a armé et entraîné des enragés de Dieu venus des quatre coins de la planète et il leur a demandé de mener cette guerre à sa place. Ceux-ci n’y parvenant finalement pas, il faudra bien intervenir directement. Et pour cela, il faut bien manipuler l’opinion.
Mais on pourrait légitimement se demander en quoi l’utilisation de gaz est plus horrible que l’agent orange répandu au Vietnam par les Américains ou que les bombes à uranium appauvri utilisées en Irak et en Libye, lesquelles ont contaminé nos propres soldats et qui continuent à contaminer la population de ces pays (voir le nombre effroyable d’enfants qui naissent handicapés). Est-il plus grave de mourir à cause du gaz que de sauter sur une des mines qu’Israël a généreusement laissées derrière lui au Liban ? Tout cela est fort relatif. D’autant que les Américains eux-mêmes avaient fourni à Saddam Hussein tout le gaz qu’il voulait quand il s’agissait de le déverser sur l’Iran (le plus grand crime de ces ennemis des USA étant d’avoir destitué le Shah et d’avoir repris possession de leurs puits de pétrole). Bref, tout cela est fort relatif et on voit que lorsqu’on veut substituer la morale au droit (en attaquant sans accord de l’ONU sous un prétexte humanitaire) il s’agit toujours de la morale du plus fort.