Une double page simplement magique !
Si vous ne connaissez pas la super BD Burlesque Girrrl de François Amoretti, je vous encourage vivement à lire ma critique du premier tome. Sinon cet article va vous gâcher le plaisir car il est impossible de parler du second et dernier tome de la série sans dévoiler la fin du premier !!
La suite de l'histoire
L'histoire de Violette et Peter et leur groupe de musique rockabilly m'avait beaucoup plu. La complexité des émotions, la justesse du trait, la pudeur malgré un sujet sensuel et surtout la construction narrative, très bien ficelée, font Burlesque Girrrl une BD de grande qualité. La lecture du tome 2 m'a simplement laissée pantois. En comparaison, le début deviendrait juste "bon" tellement la suite est excellente !!!D'ailleurs, je ne suis pas la seule à le dire puisque l'album a remporter le prix du public du festival Bulles Zic !
Le cliffhanger terrible de la fin du premier tome m'avait retournée le ventre mais j'avais l'espoir que Peter avait survécu. Hélas, l'histoire s'ouvre sur le deuil de Violette et l'absence béante de son amour. Le vide est partout, il habite la chambre, l'intimité et le cœur de la jeune femme. Une louve blessée qui s'enferme dans sa tanière pour lécher ses plaies.
Puis, doucement, la vie reprend. Le parcours d’obstacle - même le terrain franchement miné - que le groupe a traversé n'a pas été vain. Même sans Peter, Violette reste une artiste, et la musique la fait vibrer. Même sans Peter, le groupe a une identité, une âme. Avec justesse, François nous conte la suite de l'aventure qui va mener Violette à trouver sa place sur la grande scène mouvante et parfois injuste de la vie.
Une BD magistrale
Ce tome 2 est une montagne russe d'émotions ; il commence au fond du gouffre et arrivé à la page 30, je n'ai pas pu retenir mes larmes... de rire ! François nous a concocté une scène d'interview télévisée mythique ! Une soupape légère, très drôle mais aussi intelligente qui change le ton et amorce un retour à la vie.
Pour le dessin, le découpage et le lettrage, ce tome 2 est au niveau du premier. François n'hésite pas à utiliser des pleines pages pour laisser exprimer toute la sensualité généreuse de Violette dans une approche graphique à la frontière entre BD et illustration. Il sait parfaitement équilibrer le vide et l'accumulation de détails pour caractériser précisément ses ambiances.
La mise en couleur de Nephyla est parfaite, elle met en valeur le dessins sans jamais "manger" le trait, pas d’esbroufe mais de la subtilité. Les dialogues, fluides, naturels, sont parfaitement intégrés. François sait raconter une histoire, mais il le fait avec sa sensibilité, sa patte, un style très affirmé qui pourtant ne nuit jamais à la lisibilité ou la compréhension. L'harmonie entre le dessin comme médium du récit, et l'illustration comme art d'expression des émotions, est parfaite.
Sortir de sa zone de confort et l'apprécier !
Ce que je préfère dans Burlesque est ce que je n'aime pas.
La formule est volontairement provocatrice. Je connais le travail de François depuis des années, avant même qu'il n'ait sorti son premier album chez Soleil.
À l'époque, je m'étais arrêtée sur son stand à une Japan Expo et quelque chose d’indéfinissable dans ses œuvres, ses encres, ses noirs, ses courbes et ses hachures m'avait séduit. J'ai suivi son boulot de loin, comme je suis beaucoup (trop) d'artistes. J'ai lu son blog, puis, je l'ai rencontré, discuté en « vrai ». J'ai découvert un homme sensible et complexe. Mon intérêt s'est doublée d'affection. J'ai continuer de suivre ses péripéties de dessinateur, une profession qui tient du sacerdoce !
Burlesque Girrrl est sa première œuvre en tant que scénariste, c'est l’œuvre de la maturité, de l’indépendance. On y trouve en vrac des veilles voitures, du rockabilly, des pin'up girondes, une esthétique très 50's et bien-sûr, du strip tease burlesques.
Bref, que des sujets qui soit 1) ne m'intéressent pas, soit 2) je n'apprécient pas.
Non, je ne suis pas maso, j'adore sincèrement cette BD avec tout ces thèmes dont je me contre-fiche ! Pourquoi ? Parce que Burlesque Girrrl parle avant tout de respect, de trouver le bonheur, de tordre le destin, de modeler sa vie en affrontant les pires crasse, en se relevant. Burlesque Girrrl nous raconte comment on peut attraper ses rêves, comment on les cultive.
Si ma féminité (ou mon absence de féminité dirons certains potes masculins) est très différente de celle de Violette, je me retrouve dans son caractère de louve, dans sa pugnacité, sa joie de vivre. Violette est saine. Courageuse. Violette respecte mais elle connait aussi les limites de ce qu'elle peut tolérer. Et quand pour se protéger il faut savoir se défendre, elle sait puiser en elle les ressources. Violette est une survivante.
François a du talent pour transmettre ses passions. La preuve, à la fin du livre avec un magnifique recueil d'illustrations hommages. Si Burlesque Girrrl parle beaucoup de féminité et de féminisme, François transcende le genre avec une histoire humaine qui s'adresse à tous ceux qui comprennent les mots amour et respect.
Alors, en conclusion, j'insiste sur ce point : même si l'histoire ou l'ambiance ne semblent pas vous correspondre, cette BD a toute les chances de vous séduire, mieux, de vous toucher et pourquoi pas, de vous accompagner sur votre chemin de vie.
François Amoretti est en dédicace à Paris le 7 septembre à la librairie Bulles en tête.
Le blog de François où il annonce ses dates de dédicaces :
http://francoisamoretti.blogspot.fr
Le blog de Nephylia :
http://nephyla.tumblr.com/
Un entretien avec François Amoretti :
http://www.hotandlittlethings.fr/bdillu/interviewbd/interview-de-francois-amoretti-pour-burlesque-girrrl-2/
Copyright : Marianne Ciaudo