Petit digest de The Who à l’usage des Directioners

Publié le 05 septembre 2013 par Storiagiovanna @StoriaGiovanna

NDLR : Je promets que je ne serai pas présomptueuse sur cet article, enfin, pas plus que d’habitude. J’ai juste trouvé la réaction des Directioners à l’injonction judiciaire de Roger Daltrey et Peter Townshend un peu navrante, même si, au fond, je comprends que le gosse lambda ne connaît pas forcément The Who. Mais comme je le dis moi-même : « Si tu ne sais pas, tu te renseignes ».

Stupeur en plein cœur de l’été : The Who – un des groupes cultes des années 1960 et 1970 – attaque en justice pour plagiat le groupe chouchou de la jeunesse; One Direction. En effet, il semblerait que la chanson Best Song Ever de ces derniers :

reprenne quelques éléments de la chanson Baba O’Riley des plaignants :

L’experte musicale que je suis vous dirait que, bon, oui, on retrouve une certaine inspiration – c’est le même gimmick de clavier fou en intro, le principe des accords plaqués, etc… –, mais je trouve que le scandale n’est pas là. Non, je trouve que le véritable scandale est que Best Song Ever est un titre un peu ironique pour un titre que je trouve personnellement à chier (la preuve, je n’ai pas eu le courage de l’écouter en entier).

La réaction la plus extrémiste ne vient pourtant pas des One Direction mais de leurs fans. Ces ados qui me rappellent un peu mes copines à l’époque des Worlds Apart et qui s’appellent les Directioners. Suite à cette injonction judiciaire du groupe de Roger Daltrey, il y eut une levée des boucliers des Directioners, notamment sur Twitter. Si vous voulez rigoler un peu, voici un petit Tumblr qui recueille les réactions des fans qui, visiblement, ne sont pas au fait du rock des années 1970.

Comme chez Oüi FM, on aime bien avoir des auditeurs qui se cultivent, la radio a pris sa mission à cœur au point de rediriger les Directioners indignés vers la page de présentation du groupe sur son site. Loin de Oüi de faire dans la présomption et l’irrespect, mais j’avouerais à qu’à la place de la radio, des petits jeunes qui ne se renseignent pas avant d’asséner certains propos sur Twitter, je leur filerais bien des baffes aussi, avec écoute obligatoire de toute la discographie d’Herbert Léonard. Oui, je vais loin dans la perversité et la torture, s’il le faut.

Je m’adresserai donc à toi, Directioner qui se pose cette question : c’est qui, ces mecs trop abusés qui veulent profiter des 1D pour faire du buzz ? C’est qui, ces gros haterz qui sont tellement trop pas connus ? C’est qui, ces mecs qui copient sur 1D, mais surtout sur le générique des Experts, LoL ?

Bah oui… Doctor Who (mais qui n’a rien à voir avec le groupe, hein)

Figure-toi que oui, petit Directioner, sans le savoir, tu connais The Who. Oui, tu les connais, car tu as forcément regardé un épisode de n’importe quel spin-off des Experts, malgré ton jeune âge. Car, tu vois, Jerry Bruckheimer, le producteur de ces séries, ne s’est pas cassé la tête pour les génériques : il les pris sur deux albums dudit groupe qui s’appellent Who’s Next et Who are you qui sont sortis… en 1971 et 1978, soit 42 et 35 ans AVANT le tube de ton groupe chéri. Donc ne va pas dire sur Twitter que The Who a copié sur 1D ou ton vieux tonton qui fume des oinj va sortir de sa torpeur pour te coller une fessée. C’est ainsi que tu retrouves pour Les Experts le titre Who are you :

… pour les Experts : Miami le titre Won’t Get Fooled Again (si tu veux un bon résumé de ce que pouvait être la musique des années 1970, je t’en prie, be my guest comme dirait la Siamoise. Après ça, tu peux ne pas aimer The Who, je peux comprendre. Mais tu les insultes encore une fois, je prends ta tête et je la cogne contre une table au rythme du dernier riff de la chanson, OK ?) :

… et donc Baba O’Riley pour Les Experts : Manatthan.

Mais the Who ce n’est pas que ça : leur carrière se déroule principalement entre 1964 et 1982, même s’ils ont ressorti un album en 2006 pas trop mal et qu’ils font sporadiquement des tournées. Ce qui te fait onze albums à découvrir, dont deux sont devenus des films : Tommy (disque en 1969, film en 1975) et Quadrophenia (disque en 1973, film en 1979). Je n’ai pas vu le premier film, mais il paraît que cette première mouture de ce que l’on appelle l’opera rock est un vrai chef d’œuvre mais basé sur une histoire très sombre. En gros, c’est l’histoire d’un petit garçon sourd, muet et aveugle qui devient champion de flipper. Il retrouve peu à peu ses sens, devient un guide spirituel, mais ses disciples vont peu à peu se détourner de lui… Par contre, j’ai vu Quadrophenia et ça, c’est un vrai exemple de cinéma anglais comme j’aime, et je vous le conseille, bien que je sois absolument incapable d’en fait un résumé (en gros, c’est une baston philosophique entre rockers et mods, mais aussi l’histoire d’un mec qui perd toutes ses illusions… un film anglais, quoi).

Maintenant que tu es un peu plus familier de mon 3e groupe préféré au monde après Queen et The Clash et avant Dire Straits et Led Zeppelin (oui, que des groupes de vieux ou de gens morts, mais j’ai 30 ans, mon petit trésor), j’aimerais te résumer la carrière des loustics en cinq chansons :

My Generation (1965)

On peut considérer que ce morceau est le premier titre qui donne une identité au groupe. Alors qu’ils se font connaître depuis le début de l’année 1965 avec quelques singles tels que I Can’t Explain et Anyway, Anyhow, Anywhere, ce titre annonce le premier album studio. Il devient alors l’hymne nihiliste de la jeunesse anglaise et préfigure certains slogans et riffs utilisés par le mouvement punk, alors que l’orchestration de départ est très orientée blues.

The Kids are Alright (1966)

Tiré lui aussi de l’album My Generation, ce titre ressemble davantage aux sonorités de ce que font les autres groupes anglais à la mode au milieu des années 1960 – Beatles, Stones, Kinks, Yardbirds… C’est d’ailleurs avec ce genre de son que l’on peut définir ce que l’on peut appeler le Swinging London, mais aussi les Mods, sort de sous-culture en vogue au milieu des années 1960 (que l’on retrouve aussi dans Quadrophenia) où les mecs roulaient en scooter et écoutait, sinon du jazz et de la soul… The Who.

I Can See for Miles (1967)

Extrait du 3e album du groupe, The Who Sell Out, c’est le seul single de l’album. A l’époque, The Who commence à faire ce que l’on appelle des albums-concepts. À l’image de Sgt Pepper… pour les Beatles, oui. La chansons raconte un homme qui, déçu par sa compagne, chante sa lucidité retrouvé (d’où Je peux voir à des kilomètres…). Alors que Peter Townshend, l’auteur du morceau, avait pensé signer un tube, le titre ne se plaça que 10e dans les charts anglais, ce qui peut s’apparenter à une contre-performance pour le groupe.

Listening To You  – See Me, Feel Me (1969)

Ce morceau est la dernière partie de We’re Not Gonna Take It, lui-même étant le dernier morceau de l’opéra-rock Tommy. Il deviendra un single isolé en 1975. Et comme je n’ai pas envie de spoiler la fin du film ni de l’album, je te laisse te démerder à chercher la signification de la chanson sur Wikipedia (mais bon, vu la tonalité donnée à la chanson, tu te doutes bien que ça ne va pas finir en sucette, mais qu’on se dirige vers un happy end).

Behind Blue Eyes (1971)

Je t’avouerais, petit Directioner, que cette chanson, je l’ai connue par sa reprise par Limp Bizkit en 2003 :

Sauf que la bande à Fred Durst a eu l’honnêteté d’une part d’en faire une vraie reprise, mais en plus d’en faire une reprise tout à fait honorable qui dévie quelque peu de l’originale. Bon, que je te raconte : en 1970, lors d’une tournée américaine, Peter Tonwshend est troublé par sa rencontre avec une groupie. En rentrant à son hôtel, il décide d’écrire une chanson sur le fait que personne ne puisse voir derrière ses yeux bleus quelle personnalité complexe il est.

Maintenant, j’espère juste une chose pour toi, le Directioner : que tout ce foin autour de ce vieux groupe inconnu te donne la curiosité d’en savoir plus. Tu découvriras alors que One Direction n’est pas le seul groupe sur terre…