Même si je voulais attendre d’avoir passé ma soutenance de fin d’études pour reprendre ce blog qui a pris un mois de vacances, je n’ai pas résisté à l’envie de vous parler de ce qui est pour moi, la pub de la rentrée. Alors je ne sais pas si c’est l’effet rentrée, le fait que ça fasse longtemps que je n’avais pas allumé ma télévision, ou un peu des deux, mais je trouve la rentrée publicitaire riche ! Et celle dont je souhaite vous parler aujourd’hui est pour Vanity Fair.
Juste histoire de resituer un peu le contexte : Vanity Fair est un plus ou moins nouveau magazine. Plus, parce qu’il n’a que 3 mois en France, moins parce qu’il existe déjà depuis 100 ans aux États-Unis. C’est un peu risqué de lancer un nouveau magazine papier à l’heure de la nette domination numérique, et dans un secteur du luxe et du glamour déjà saturé. Mais le Vanity Fair américain est depuis toujours une référence cultissime. Celui-ci a été lancé par Condé Nast (Vogue, Glamour, GQ, Wired), après quelques 15 millions d’investissements pour le lancement. Au passage, ce ne sont pas les seuls à se (re)lancer, puisqu’aujourd’hui même, Frédéric Beigbeder, qui est entre autres ancien publicitaire de l’agence BBDO et auteur de l’effrayant « 99 francs », relance le magazine « Lui ».
Pour revenir à ce Vanity Fair français, ce qui fera sa différence est sa façon de mélanger le monde du glamour et du luxe avec celui de l’information. D’où son slogan, qui résume parfaitement sa promesse « Brillant dehors, mordant dedans ». Il est sur la même lignée que le magazine « M » du journal Le Monde, ou de « Obsession » du Nouvel Observateur.
Le premier numéro a fait un tabac – effet de lancement sans aucun doute – et était très riche en très belles publicités. Avant même la parution du premier numéro, tous les espaces publicitaires jusqu’à décembre se sont vendus. Je n’ose en imaginer le prix. D’ailleurs si vous l’avez feuilleté, vous ne pouvez pas ne pas avoir vu la magnifique page de Chanel, au milieu des 92 autres publicités, en beau papier cartonné qui se déplie et avec un gaufrage argenté. Une fois que l’effet de nouveauté sera passé, je pense que l’audience se fera essentiellement de lectrices, CSP+(+), de 35 à 50 ans, actives, citadines et avec des habitudes de vie liées au luxe.
L’autre particularité de ce presque nouveau magazine, c’est son rédacteur en chef. En effet, celui qui était pour moi le papa de la télévision, Michel Denisot, est désormais à la tête de ce magazine. Il a quitté le Grand Journal de Canal+ après 9 ans d’antenne. En ne disant pourtant pas grand-chose, il a su incarner à la fois le chic et l’actualité, plutôt adapté donc, à la ligne directrice de Vanity Fair. Son départ a été très médiatisé.
Quant à la publicité pour ce magazine, elle se fait essentiellement autour de la promesse. Vanity Fair a fait confiance au fameux publicitaire Gabriel Gaultier pour travailler cette campagne. On suit une jeune fille, très belle et très élégante, qui a un comportement qu’on ne pourra pas qualifier d’éthique. Elle enchaîne les amants, vole, fouine, … Une voix off, au timbre très particulier, remet en question tous ses faits et gestes. Elle lui dit par exemple : « Sont-ce bien des manières de dames que d’avoir tant d’amants ? ». Ces remarques agaçantes vont finalement réussir à décrocher un délicieux « Je vous dis merde » de la jeune impertinente. Cette fille est la personnification de Vanity Fair. Elle en porte d’ailleurs le nom. C’est une très bonne idée puisque, de ce fait, si on s’identifie à elle, ou si l’on souhaite lui ressembler (ce sera plus souvent ce cas je pense), on se retrouve dans le magazine (puisque c’est elle). Bref.
On retrouve donc visuellement le « Brillant dehors » avec Vanity Fair qui vit dans un monde luxueux, et le « Mordant dedans » avec son comportement et ce répondant inattendu.
Pour le lancement du magazine je trouve très intéressant d’axer la campagne publicitaire sur cette promesse qui est le point de différenciation du magazine. Sans même l’avoir lu, on comprend qu’il mélange subtilement le fond et la forme. C’est une promesse vaniteuse, oui, mais ils peuvent donc se le permettre.
On peut considérer cette voix off comme étant la représentation de la concurrence. Les codes du luxe sont inchangés, surtout dans la presse magazine, depuis toujours. Le luxe peut d’ailleurs être défini par ce goût des traditions. De plus, un magazine dans ce secteur ne prend généralement aucun risque. Le discours reste axé autour du luxe sans que le fond ne soit réellement important. Ce n’est pas vrai pour tous évidemment. Le magazine Elle fait souvent des articles de fonds, et même le Playboy des débuts, publiait des papiers de renom.
Mais si on considère que la voix off représente donc l’image un peu creuse de la concurrence magazine, la jeune Vanity Fair s’applique donc à faire tout l’inverse de ce à quoi on peut s’attendre d’une jeune fille de son rang, tout comme le magazine va s’appliquer à ne pas ressembler à sa concurrence et lui dit donc merde. Merde à tous ceux qui pensent qu’on ne peut pas mélanger apparence et intelligence (ce qui est très peu flatteur) et merde à tous ceux qui pensent que c’est trop risqué de se lancer dans ce secteur.
Vanity Fair bénéficie alors d’une image impertinente et rebelle qui plaît à une grande majorité. Un exemple simple : le bobo. Qui ne connaît pas de bobo ? Bobo, c’est le Bohème-Bourgeois. C’est donc celui qui vit avec de (très) bons moyens mais qui travaille son image de contestataire de la société. Non à la consommation de masse, non à la télévision mais toujours oui aux salaires qui permettent de céder à ces modes de vie souvent très chers. Et être bobo aujourd’hui, ce n’est plus du tout marginal. C’est même mainstream. Et Vanity Fair est parfaitement dans ce créneau : le goût du luxe tout en refaisant le monde.
Le magazine a donc réussi rapidement à se faire une place et à s’imposer. L’avenir nous dira ce qu’il en est, mais je reste très confiante quant à son succès.
Enfin, j’ai beaucoup aimé le petit clin d’œil du plan média. La pub est présente à toutes les coupures du Grand Journal. Un peu comme si Denisot disait « Je suis toujours présent », et très utile au passage pour récupérer un public déjà acquis à ce brave Monsieur.
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