Mise en garde spéciale : cette chronique est peut être un peu partiale ou subjective du fait de mon admiration musicale pour ces messieurs (j’ai même adoré Tonight quand il est sorti, c’est pour dire !), mais à en lire ce que l’on trouve un peu partout, elle n’est pas si biaisée que ça. Enfin, j’ai fait de mon mieux.
Presque unanimement salué par la critique (mais bashé par les blogueurs), ce LP de l’amour (rappelons que le groupe a failli se séparer mais que, bien leur en a pris, ils ont réalisé qu’ensemble, ils sont Franz Ferdinand, et ça c’est beau !), qui arrive quatre longues années après son successeur en demi teinte Tonight, tient beaucoup de ses promesses. En même temps, ils ont pris "le temps nécessaire pour retrouver une certaine fraîcheur, une forme de spontanéité collective" ont-ils confié à Magic. Les pépères.
Il faut bien le dire : j’écoute cet album en boucle depuis maintenant un peu plus de deux semaines. Et ne parlons même pas des singles (surtout les versions remixées très réussies de monsieur Todd Terje, qui a par ailleurs produit certains titres de l’album) parus un peu plus tôt. Ces messieurs nous y ont habitués, leurs morceaux restent scotchés dans ta tête presque indéfiniment (le meilleur exemple est Take Me Out. Qui peut se prétendre capable de pouvoir oublier ces coups de guitare-marteau "TAN TAN TANTAN TANTAN" ? Non franchement, on n’a pas vu mieux depuis pas mal de temps).
S’il y a bien un mot qui caractérise cet album, c’est sans doute "euphorisant".
Euphorisant d’abord, car dès les premières notes, on sait que l’on va danser, se prendre pour Elvis (ou Nicki Minaj, c’est selon) sur des tubes en puissance que sont Stand On The Horizon, Love Illumination, Right Thoughts, Right Words, Right Action. Parce que des tubes, il y en a à la pelle. Pas moins de 5 qui s’enchaînent presque au début de l’album. On sait qu’on va danser, mais pas que ! L’album n’est pas d’une cohérence inouie, mais le tout forme un joli panel d’atmosphères, tantôt horrifique (Evil Eye et son cri de début de chanson me fait penser à Ghostbusters … de toute façon, fantômes, démon, même combat), tantôt on retourne aux sources avec Bullet, et par ci, par là, on retrouve des petites perles de mélodie et de fraîcheur comme Fresh Strawberries … Mais toujours, on retrouve ce sens du riff inné chez eux.
Euphorisant aussi, car c’est au fil des écoutes que la deuxième moitié de l’album se révèle. Bullet est en quelques sortes la porte d’entrée vers des compositions plus directes, on oublie cinq minutes le côté machine à tube et on déroule une série de chansons tout aussi efficaces mais peut être moins accessibles au premier abord (même si en règle générale, ce n’est pas un groupe que l’on peut qualifier d’intellectuel ou conceptuel), avec des sections rythmiques plus enlevées et des boucles mélodiques plus entêtantes comme sur Treason! Animals. où l’on flirte avec les mélodies progressives des années 70. Puis, l’album s’achève sur la hargne tendre de Goodbye Lovers And Friends, à ne surtout pas confondre avec ça.
Euphorisant enfin, car rien n’est à jeter. D’accord, cet album ne dure que 36 minutes, donc c’est plus facile. Mais là où, dans leur discographie, certaines chansons ne trouvaient pas vraiment leur place (Twilight Omens, même si très bonne par exemple), ici, ces nouvelles compositions se fondent dans la masse de leur discographie, mais pas dans un sens péjoratif, c’est-à-dire qu’elles détiennent l’identité propre du groupe, toujours dans les mêmes gammes de rythmes, toujours ces guitares qui nous livrent des riffs tous plus ravageurs les uns que les autres, toujours cette basse légèrement disco par moment, mais surtout, toujours cette même propension à faire danser absolument tout le monde. Et ça se vérifie lors de performances live (oui, c’est un des groupes pour lesquels on peut parler de performance, et que l’on ne peut que vous encourager à aller voir).
On sent que les chansons sont abouties, ont muri et nous apparaissent sous leur meilleur jour. Les arrangements sont clairs, ça s’entasse pas, c’est limpide, l’album s’écoute tout seul. On retrouve également ça et là quelques touches électroniques apportées non seulement par les producteurs (Joe Goddard de Hot Chip, Todd Terje, etc.) mais aussi par le précédent opus qui leur a servi à expérimenter cet aspect de leur musique.
Pour nuancer tout ces propos un peu (trop) enthousiastes, on peut regretter l’absence d’une sorte d’étincelle, ce petit truc en plus qui fait basculer un très bon album du côté des excellents albums, ceux qu’on n’oublie pas, même trente ans après. Parce que même si cet album connaîtra un très grand succès du fait de la notoriété des écossais, il n’en sera pas moins éclipsé, à force, par le monument qu’est leur premier album, Franz Ferdinand.