03 - 09
2013
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Pitch.
Deux évadés d'un pénitencier s'enfuient sur un train dont le conducteur est tombé de la locomotive. Parviendront-ils à l'arrêter ?
Un an après "Maria’s lovers", son premier film américain, Andrey Konchalovsky reprend sur les conseils de Francis Ford Coppola en 1985 le scénario de "Runaway Train", initialement écrit par Akira Kurosawa mais qu’il n’avait pu mener à bien. Le film sort en salles en reprise demain mercredi 4 septembre.
Dans une prison de haute sécurité en Alaska, une forte tête vient d’obtenir du tribunal la fin des trois ans de cachot que lui fait subir le directeur du lieu. Cette nouvelle fait immédiatement le tour de la prison où Manny est une sorte de vedette emblématique, en particulier pour Buck, un prisonnier plus jeune. Devant la reprise des tentatives de Warden pour le briser, Manny décide de s’échapper, utilisant les fonctions de Buck à la lingerie. Au dernier moment, Buck décide de suivre Manny dans les égouts de la prison.
photo Carlotta
Arrivant dans une gare de triage, ils volent quelques vêtements et montent dans le premier train qui démarre, un convoi technique de quatre locomotives. Mais à peine le train s’élance, le conducteur meurt d’une crise cardiaque et tombe sur la voie en bloquant malencontreusement les commandes. Ce n’est que lorsque le train prend une vitesse anormale que les fugitifs réalisent qu’ils sont à bord d’un train fou dont ils ne peuvent atteindre la voiture de tête pour reprendre le contrôle. Il aura également fallu ce temps pour que d’une part la compagnie de chemin de fer réalise la situation et tente de dévier à la fois le convoi incontrôlé et les autres trains qui risquent de le percuter. Et d’autre part pour que Warden comprenne où sont les fuyards et organise les moyens de leur capture. A bord, Buck et Manny sont face à eux-mêmes jusqu’à ce qu’apparaisse Sara, une employée du chemin de fer qui s’était assoupie dans une des locomotives et découvre la situation en se réveillant.
Film étonnant, Runaway Train joue ouvertement sur deux tableaux, le film d’aventure (dans sa version ici de film d’évasion) et le film philosophique. Du premier il emprunte les scènes d’action, la vitesse de mouvement, la course poursuite, les machines puissantes, les bagarres, un certain suspense, les grands paysages, les milieux extrêmes. Du second il emprunte les constructions symboliques, les discours interminables, les réflexions intérieures, les décalages inattendus entre les situations et les dialogues, les allusions à demi-mots. Le tout dans un mouvement alterné entre une première partie mouvementée et une seconde partie bavarde, la dernière partie redevenant plus active sans oser s’achever dans l’explosion attendue mais en abandonnant les personnages juste avant le crash après les avoir positionnés en positions symboliques.
Pour peu qu’on apprécie généralement les prestations de Jon Voight, son interprétation de Manny à la Brando est dans ce contexte parfaite en ce qu’elle colle absolument au projet du film, en grand ours brutal et penseur à la fois, en grosse brute libertaire qui se regarde souffrir de cette soif qu’ il tente d’épargner à ceux qui se risquent à l’admirer. Eric Roberts en Buck est niais à souhait dans un comportement résolument adolescent prompt à l’admiration comme à la détestation déçue. Rebecca de Rosnay en Sara en potiche inutile et à peine reconnaissable cherche en vain dans les tics d’un jeu théâtral la place minuscule qui lui est dévolue. John P. Ryan (Warden) serait un méchant parfait s’il n’était vain de trouver crédible de le voir accroché à un filin sous un hélicoptère lancé à pleine vitesse dans le blizzard. Seuls Kenneth McMillan et Kyle T. Heffner en responsables de crise de la compagnie ferroviaire trouvent un brin de naturel rafraichissant.
En cohérence avec ce projet complexe, l’objectif enregistre des images tellement grises et délavées pour illustrer le poids oppressant du doute, de l’inéluctabilité, de la triste grandeur des causes perdues d’avance, qu’elles finissent par laisser le souvenir d’un noir et blanc faisant ressortir la masse noire et fantomatique d’un train aveugle dans l’immensité neigeuse.
Oscar "Manny" Manheim (Jon Voight), Buck McGeehy (Eric Roberts), Sara (Rebecca De Mornay), John P. Ryan (Warden Ranken), Eddie McDonald (Kenneth McMillan), Frank Barstow (Kyle T. Heffner)
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Mots-clés : avant-Premières, cinérécent, cinéma américain, Runaway train, Andrey Konchalovsky