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Max | De l'école

Publié le 03 septembre 2013 par Aragon
- Alors parlons études dit monsieur Brul.
[...]
- Posez-moi des questions dit Wolf et je répondrai.
- Dans quel sens vos études vous ont-elles formé ?
[...]
- Seize ans d'ennui - qu'en reste-t-il ? Des images isolées, infimes... l'odeur des livres neufs le premier octobre, les feuilles que l'on dessinait, le ventre dégoûtant de la grenouille disséquée en travaux pratiques, avec son odeur de formol, et les derniers jours de l'année où l'on s'aperçoit que les professeurs sont des hommes parce qu'ils vont partir en vacances et que l'on est moins nombreux. Et toutes ces grandes peurs dont on ne sait plus la cause, les veilles d'examens... Une régularité d"habitudes... ça se bornait à cela... mais savez-vous, monsieur Brul, que c'est ignoble d'imposer à des enfants une régularité d’habitudes qui dure seize ans ? Le temps est faussé, monsieur Brul. Le vrai temps n’est pas mécanique, divisé en heures, toutes égales... le vrai temps est subjectif... on le porte en soi... Levez-vous à sept heures tous les matins... Déjeunez à midi, couchez-vous à neuf heures... et jamais vous n’aurez une nuit à vous... jamais vous ne saurez qu’il y a un moment, comme la mer s’arrête de descendre et reste, un temps, étale, avant de remonter, où la nuit et le jour se mêlent et se fondent, et forment une barre de fièvre pareille à celle que font les fleuves à la rencontre de l’océan. On m’a volé seize ans de nuit, monsieur Brul. On m’a fait croire, en sixième, que passer en cinquième devait être mon seul progrès... en première, il m’a fallu le bachot... et ensuite, un diplôme... Oui, j’ai cru que j’avais un but, monsieur Brul... et je n’avais rien... J’avançais dans un couloir sans commencement, sans fin, à la remorque d’imbéciles, précédant d’autres imbéciles. On roule la vie dans des peaux d’ânes. Comme on met dans des cachets les poudres amères, pour vous les faire avaler sans peine... mais voyez-vous, Monsieur Brul, je sais maintenant que j’aurais aimé le vrai goût de la vie.
[...]
- ça m'a usé monsieur Brul dit Wolf. Je hais les années d'études parce qu'elles m'ont usé. Et je hais l'usure.
Vian, l'Herbe Rouge
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Comme chaque année, à chaque sempiternelle rentrée, les médias font leurs choux gras sur le cartable, sur les pleurs du premier jour des petiots, sur les états d'âme des profs, Télérama n'est pas en reste, toujours à la pointe question éducation & société, il se fend d'un papier, un bon papier qui fera pas pleurer dans les chaumières mais d'un bon papier quand même qui parle du blues de l'enseignant, son parcours du combattant...

J'ai passé un certain nombre d'années dans le milieu et c'est des enfants qui se font chier dont je voudrais parler dans ce post, uniquement d'eux, le pourrais-je ? On parle peu des enfants qui ont mal à leur école, c'est pas au ventre qu'ils ont mal, les parents pompent rien, c'est à "leur école" qu'ils ont mal, leur école est située dans le ventre d'où la gourance des parents, mais c'est là que ça tord... c'est les boyaux de l'école, c'est pas les boyaux du ventre. Un enfant porte une école en lui, comme sa mère l'a porté neuf mois en elle, le problème chez l'enfant c'est que ça dure plus de neuf mois... Alors, ça fait mal "régulièrement", mais comme pour la maternité, il ne s'agit pas d'une maladie et l'accouchement de "l'école" se fait souvent au forceps !

Les bons profs le savent, les bons médecins & infirmières(iers) scolaires le savent, les bons psychologues scolaires le savent. Les proviseurs, les principaux, les CPE entravent que couic, ils sont à des années-lumières de ces élèves-là, sourds et aveugles... mais pas muets emplis qu'ils sont des gloses indigestes ministérielles superfétatoirement restituées aux profs et aux familles  !

A l'école un enfant normal se fait chier, à l'école un enfant anormal entre dans le moule et a une scolarité normale avec des résultats normaux, brillants parfois. Un enfant anormal c'est un bonsaï auquel on tord les branches, auquel on les ligature par un fil de cuivre pour faire prendre la forme voulue par "le maître", auquel on taille régulièrement  les racines, les branches et les feuilles pour le faire surtout rester semblable à ce que veut le maître. Un écolier n'est qu'un bonsaï.

Un enfant normal refuse qu'on lui coupe les racines et branches, ou du moins il voudrait piger pourquoi. Qu'on lui explique. Qu'on lui explique les études, la société, le monde du travail, la suite...

L'Herbe Rouge - je retombe sur ce bouquin dans ma bibli - m'a fait virer du lycée d'Orthez en fin de troisième. Lors d'une "Rédaction" qui portait sur je ne sais plus quoi, j'ai recopié les mots que j'ai tapé plus haut, concluant d'un docte (pour un morpion de quinze ans) "Dont Acte" dont je venais d'apprendre la signification. Convoc auprès du dirlo, Vian était strictement interdit à l'époque, j'ai dit à ce monsieur que je me retrouvais dans les mots de son bouquin, que ça me "parlait", il m'a rétorqué sans aucun humour que ces mêmes mots me feraient retrouver à la porte de son établissement, il est vrai que je cumulais un passif de quarante-quatre heures de colle...

Rendre un jour les études intéressantes, ne plus fabriquer de petits bonsaïs... Rendre les parents qui ne comprennent rien à leurs mômes en détresse à l'école, intelligents... Rendre l'armée intelligente... Rendre l'économie intelligente... Rendre pour ceux qui veulent embrasser une religion intelligents... Rendre la société intelligente...

Les fondamentaux : Enseigner l'intelligence à l'école, l'intelligence et la communication, la communication et le sens de la relation. Les matières normales, ordinaires mais utilement indispensables (Beaux Arts, Informatique, Français, MPC, Langues, etc.) passant après.

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