Nous avons vu qu’il était, dans la plupart des cas, intéressant établir un testament. Nous avons également découvert dans quelles circonstances il était possible de contester un testament et comment il était possible de léguer à un tiers. Nous avons pourtant dû constater que cette personne n’avait pas grand-chose à espérer. Mais qu’en est-il si l’on souhaite léguer par testament une (grande) part de son héritage à une bonne œuvre? Celle-ci devra-t-elle également payer tant de droits de succession ?
Évolution de la société
Il y a des siècles, il était commun d’ “instituer son âme héritière”. Dans ce cas, on léguait sa fortune à l’église, à condition que celle-ci dise des messes pour le repos de l’âme du défunt. Pour le reste, cela a toujours été l’habitude de léguer son héritage à ses enfants ou à sa famille proche. Mais depuis quelques années, une nouvelle tendance se fait jour. De plus en plus de gens souhaitent faire perdurer leur influence positive en léguant une part de leur fortune à une bonne œuvre ou à une organisation dont les objectifs leur tiennent à cœur.
Le legs en duo
Comme nous l’avons vu dans le cas d’un legs à un tiers, il est impossible de contourner la part réservataire, même lorsque l’on lègue à une bonne œuvre. Le testateur pourra donc seulement léguer la quotité disponible à une telle bonne œuvre. Ceci ne s’appliquera bien sûr pas s’il n’y a pas d’héritier réservataire. Le legs en duo a été inventé pour encourager le don à une association ou une fondation en permettant d’épargner aux autres héritiers le paiement d’importants droits de succession. Cette technique peut être fiscalement intéressante lorsque le testateur veut léguer à une personne qui doit payer des droits de succession élevés, comme un tiers non apparenté.
Dans le cas d’un legs en duo, le testateur lègue une partie de sa fortune à une organisation reconnue et une autre partie à une personne qui doit payer des droits de succession importants. L’organisation doit cependant payer les droits de succession des autres héritiers. Il s’agit d’une situation typique de “gagnant-gagnant” : l’organisation reçoit un héritage qu’elle n’aurait, dans le cas contraire, pas touché, et l’héritier paye bien moins de droits de succession, des droits qui – comme nous l’avons vu – peuvent atteindre les 80 % dans certaines de nos régions.
Un exemple
Il est trop compliqué de traiter tout en détail ici (parce que les droits de succession diffèrent d’une région à l’autre et augmentent en fonction du montant de l’héritage), mais nous donnons un exemple sommaire. En Wallonie, un neveu/une nièce reçoit un héritage net de 59.375 EUR sur un legs de 100.000 EUR. Tout le reste va à l’État. Mais si le testateur lègue, dans un legs en duo, 35.000 EUR à une organisation et 65.000 EUR à son neveu /sa nièce, cette personne touchera la totalité des 65.000 EUR, parce qu’il incombera à l’organisation de payer la totalité de ses droits de succession. Grâce au legs en duo, la personne gagnera donc 5.625 EUR. L’organisation payera les droits de succession de la nièce/du neveu (22.875 EUR), ainsi que ses propres droits de succession (à 7 %). Le fisc touche 25.325 EUR (au lieu de 40.625 EUR), mais l’œuvre garde 9.675 EUR.
Intéressant pour tout le monde, peut-être un peu moins pour le fisc.