Interview réalisée par Benoît July consacrée à l’Employer Branding
Article publié dans le Journal Le Soir / Références du 31 août 2013
A priori, tout concorde. Les employeurs font tout pour séduire des candidats qui ne demandent… qu’à être séduits. Encore faut-il que leurs valeurs se rencontrent, que s’opère l’alchimie. Une bonne stratégie d’Employer Branding peut-elle y contribuer ? Le point avec Hervé Renard, Strategy & Creative Director de l’agence PH 410 qui contribue à renforcer l’image d’employeurs tels que Baxter, FN Herstal ou, entre autres, le Groupe P&V.
Quel est fondamentalement l’objectif d’une campagne d’Employer Branding ?
Paradoxalement à première vue, l’idée n’est pas de « vendre » la marque de l’employeur en tant que telle, par le biais d’un discours affirmant : Regardez comme mon entreprise est forte, comme mes produits sont attractifs. L’idée consiste au contraire à se mettre à la place du candidat en s’interrogeant sur les raisons pour lesquelles il voudrait vous rejoindre. Cela implique à la fois un gros travail en interne (quelles sont nos valeurs, pourquoi nos collaborateurs sont-ils heureux de travailler, etc.) mais aussi une réflexion sur les attentes des candidats, sur leurs motivations et leur processus de décision : on ne change pas de job comme on achète une voiture ou un yaourt…
Quelles sont les attentes actuelles vis-à-vis d’un employeur ?Les exigences des générations Y et Z sont objectivement plus élevées que celles des générations précédentes. Les employeurs s’adressent à de futurs collaborateurs qui sont davantage « égocentriques », en ce sens que le nom de l’entreprise leur importe moins que ce qu’elle leur propose : l’environnement de travail, la qualité des relations avec les collègues, l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, l’épanouissement professionnel, entre autres. La seule évocation du salaire et de la garantie d’emploi n’est pas suffisante.
Les entreprises doivent-elles adapter leur image à ces attentes ?
Il est très important de bien comprendre les attentes de la cible à laquelle on s’adresse et de cerner les meilleurs moyens de communiquer avec elle. Cela demande, avec l’agence qui sera responsable de ce travail, l’établissement d’un vrai dialogue, d’une relation de confiance afin de comprendre l’ADN de l’entreprise et les éléments de celui-ci qui seront susceptibles de séduire le public qu’on veut toucher. C’est ce que nous avons fait, par exemple, avec le Groupe P&V : d’abord comprendre, sur base d’une étude approfondie, pourquoi les collaborateurs sont satisfaits d’y travailler et, ensuite, déployer la créativité pour faire le passer le message : la campagne « chouette job » en l’espèce.
Comment éviter de se dénaturer pour séduire ? Quels sont les risques si l’image véhiculée en externe ne correspond pas à celle qui est ressentie en interne ?
Il n’existe aucune frontière entre communication externe et interne : l’exigence de cohérence doit être absolue. Le premier réflexe des digital natives, par exemple, sera de faire appel aux réseaux sociaux pour se renseigner et vérifier si la promesse de l’employeur correspond bel et bien à la réalité. Inutile de dire que le résultat de la campagne sera désastreux si l’image externe est en contradiction avec le vécu interne. À l’inverse, le message sera d’autant plus fort s’il est cohérent, si les collaborateurs jouent le rôle d’« évangélistes » en acceptant de témoigner par exemple ou de porter le message au sein de leur propre réseau.
Qui doit gérer la « marque de l’employeur » ? Le marketing ou les ressources humaines ?
L’entreprise ne communique pas dans ce cas pour convaincre des gens d’acheter ses produits, mais pour qu’ils viennent travailler chez elle. Le public visé n’est donc pas celui d’une campagne de pub classique. Les gens ne sont pas séduits par une marque, mais par ce que pourrait leur apporter très concrètement le fait de travailler dans cette entreprise. Il s’agit donc d’une thématique qui relève davantage des ressources humaines que du marketing, même si les deux messages doivent idéalement exister en parfaite harmonie.
Les attentes du public étant connues, les propositions des employeurs sont objectivement fort semblables : tous promettent une bonne ambiance de travail, des formations, un équilibre entre sphères professionnelle et privée. Comment se démarquer ?
Je relativiserais cette affirmation car cela signifierait que toutes les cultures d’entreprise sont identiques, ce qui est loin d’être le cas. Mais il est vrai qu’il est parfois difficile de traduire des valeurs en une proposition qui permette de se distinguer en tant qu’employeur. C’est en réalité là que réside la valeur ajoutée d’une agence de communication : à nous de trouver le bon ton, la bonne accroche, les bons canaux. Bref, à nous de faire preuve de créativité !
Quels canaux, précisément, faut-il privilégier ? Les réseaux sociaux sont-ils incontournables ?
Le débat ne se pose déjà plus en ces termes-là : les médias sociaux sont désormais banalisés. À ce titre, ils interviennent dans une campagne au même titre que d’autres supports comme la presse écrite ou la radio, par exemple. Les digital natives ne sont pas autistes : ils continuent de consommer les infos, les pubs, les films ou la musique, mais d’une autre manière. Donc, pas d’exclusivité dans le choix des canaux. Et priorité à la définition des valeurs et de l’image qu’on veut communiquer, quels que soient les moyens mis en œuvre pour y arriver.
Retrouvez l’article de Benoît July dans le magazine en ligne Références en cliquant ici