Sébastien Lapaque fait
tout pour nous égarer dans La convergencedes alizés. Le foisonnement des personnages et des récits annexes détourne
l’attention de Zé, véritable fil conducteur du roman avec sa quête d’Helena, la
femme qu’il aime et qui a lui a dit l’aimer avant de disparaître. Zé lui-même
est parfois distrait de son but, poussé vers l’Argentine pour éclairer un coin
obscur de la biographie de Borges, en rapport avec le football dont son ami
Euclides est l’encyclopédiste du beau jeu. Mais bien des romanciers brésiliens
pratiquent leur art ainsi, en brouillant la piste principale traversée d’une
multitude d’autres chemins. Le romancier français, transporté sur leur terrain
géographique, a aussi adopté cette esthétique. Et elle convient parfaitement au
propos.
Donc, suivons aussi, avec
le même plaisir que l’auteur a eu à les écrire, les aventures d’Octavio Cardero
et de son frère Luiz, les débats d’un groupe de chercheurs, l’évolution des
menaces qui planent sur l’animateur très populaire d’une émission à vocation
dite culturelle et destinée à faire de l’audience, quelques histoires de voyous
pour lesquels l’amitié n’est pas un vain mot, et on en passe faute de pouvoir
développer.
Tous ces éléments sont bien en place et servent
le roman. On ne peut en dire autant de quelques passages qui semblent des
pièces rapportées et brisent le rythme – tout en apportant, à ceux que cela
intéresse, des éléments d’information : un entretien avec Chico Buarque,
un autre avec Claude Lévi-Strauss, une partie de polo racontée en détail, un
exposé sur le climat, encore que celui-ci éclaire le titre… Le roman aurait
gagné en cohérence sans eux. Là, le plaisir n’est pas partagé.