Le Journal du Dimanche, dans son édition du 1er septembre, est affirmatif: "Syrie, les preuves". On se précipite, on cherche à comprendre.
Une fraction de l'opposition à l'intervention armée agite l'idée que le massacre chimique serait l'oeuvre des rebelles, si possible islamistes. On ne voit pas, si la "punition" internationale porte sur la destruction d'armes notamment chimiques du boucher El-Assad, en quoi l'argument s'oppose à une riposte qui n'a que trop tarder.
Le JDD publie quelques extraits d'un rapport des services de renseignement français: "l'objectif est de convaincre l'opinion publique."
1. Le programme d'armement chimique de la Syrie est impressionnant. "Avec plus de 1.000 tonnes d'agents chimiques et précurseurs, Damas détient l'un des stocks opérationnels les plus importants au monde." Le rapport, relate le DD, détaille comment les Syriens ont travaillé sur toutes sortes de gaz des plus toxiques. La Syrie dispose également de tout ce qu'il faut pour envoyer ces gaz (missiles Scud C et B, missiles M6 et SS-21, etc).
2. Sur l'attaque du 21 août en particulier, les agents français affirment que "les munitions chimiques ont été tirées avec des roquettes Grad." Ces roquettes ont déjà été utilisées par les deux camps. Ils se sont emparés d'entrepôts militaires. Ils complètent par l'analyse de l'activité des troupes pro-Bachar el-Assad dès le 22 août pour effacer les traces. Les Etats-Unis, par l'intermédiaire de John Kerry, ont affirmé détenir la preuve matérielle du massacre chimique le 21 août: "Des échantillons de cheveux et sanguins se sont révélés positifs à des traces de gaz sarin". Le même Kerry a été clair: "Nous savons d'où est venue cette attaque. Nous savons exactement où elle s'est produite. Nous savons exactement ce qui s'est passé après". Les services israéliens ont évoqué la piste d'une "bavure", d'autres
Mais les services français, cités par le JDD, n'apportent pas de preuves formelles que le massacre ait été commis par des forces militaires loyales à Bachar el-Assad (un ordre ? des témoignages ?). Ce point sera évidemment utilisé par les opposants à cette intervention. Car aussi étonnant que cela paraissent, certains des critiques semblent encore attendre confirmation sur la nature du régime syrien et de ses exactions.
A droite, le ridicule ne tue plus. Les mêmes qui se sont tus quand la France fut engagée en Libye, ou ailleurs en Afrique (Côte d'Ivoire, par exemple) réclament aujourd'hui un vote en bonne et due forme du Parlement français.
Aux Etats-Unis, Barack Obama a décidé de "consulter" son Parlement. En France, Ayrault et Hollande vont "consulter" les représentants de l'opposition, comme de la majorité.
Le débat est étrange. Cela fait des mois qu'on se plaint, à juste titre, de l'attentisme international, du blocage du Conseil de Sécurité. Voici qu'une "fenêtre de tir" - pardonnez l'expression - s'ouvre, et les chamailleries reprennent sur la "légalité" et le juste formalisme républicain qu'il faudrait respecter.
La guerre de Syrie en 2013 a peu à voir avec la guerre en Irak de 2003. La première est civile, a fait 100.000 morts; la seconde fut déclenchée par une coalition internationale dirigée par les Etats-Unis sur des prétextes récusés par la France et quelques autres.
Qui s'en souvient ?
Lire aussi:
- "La Syrie, les enjeux", via Babelouest.
- "Hollande piégé par Obama", d'Elie Arié.