Il n’y a pas que le changement planifié. Il y a aussi le changement auto-organisé et guidé.
C’est « un
processus itératif dans lequel les membres de l’organisation prennent la
responsabilité du changement, y compris l’interprétation initiale et la
conception, la mise en œuvre, l’improvisation, l’apprentissage et le partage
des acquis au sein de l’ensemble du système, conduisant à une réinterprétation
et à une reconception du changement en continu. (…) La première motivation pour
ce type de changement est l’incertitude sociotechnique. Si l’avenir ou le
changement à réaliser sont inconnus (…) les managers n’ont pas de solution (…)
ils doivent tirer parti des connaissances informelles et des compétences des
membres de l’organisation (…) La nature itérative d’un tel changement
auto-organisé et guidé encourage le type d’improvisation et d’expérimentation
nécessaires pour identifier les actions, solutions et résultats les plus
efficaces. »
Dans les années 90 ce type de techniques était très à la
mode. On parlait « d’adhocracie ». L’entreprise traditionnelle devait
disparaître, pour devenir un « chaos » créatif. Cela ressemblait à un
coup de folie des universitaires du management.
Depuis, j’ai changé d’avis. Ce mode d’organisation peut
fonctionner. Je l’ai trouvé, par exemple, dans les start up américaines. C’était
aussi celui de l’armée de la Révolution, et de l’armée allemande en 40 (« l’esprit d’Iena »). Plus
curieusement, cela correspond assez bien à l’entreprise allemande. Ou, tout
simplement, à l’équipe sportive, ou au commando.
Quelles sont les conditions de succès d’une telle approche ?
Tout d’abord, un environnement marqué par un haut degré de variabilité. Surtout,
il faut une culture (socialisation) et un projet communs. Face à une situation
imprévue, chacun peut alors faire preuve d’une initiative judicieuse. Parce qu’elle
correspond à ce que n’importe qui d’autre de l’équipe aurait fait à sa place.
La start up américaine vit ainsi brièvement. Tous les coups
sont permis. Une fois un filon trouvé, il est exploité le plus rapidement
possible. L’entreprise devient bureaucratique. Les robots prennent la place des
pirates, qui vivent de leurs rentes et font la charité. L’entreprise allemande,
elle, choisit un domaine de domination, qu’elle renouvelle en continu, par l’innovation.
Et la France ? Mode du franc tireur ? Un
sans-grade a une idée géniale, qu’il pousse jusqu’à en crever, et sans aucune
logique économique ? Une fois qu’elle a fait ses preuves, et qu’il est exsangue,
elle est récupérée par l’establishment, qui la développe, et s’en attribue la
paternité ?