Le principe des applications prédictives a déjà été esquissé au travers de quelques réalisations plus ou moins abouties (par exemple Google Now et Osito) et j'ai déjà eu l'occasion de l'aborder, notamment autour du sujet de la gestion de finances personnelles. Le cabinet d'analystes Forrester s'en empare désormais, considérant qu'il s'agit de la prochaine révolution attendue dans le domaine du développement logiciel.
Mais, d'abord, pourquoi une telle transition serait-elle nécessaire ? Beaucoup d'applications d'aujourd'hui, mobiles en particulier, sont largement appréciées de leurs utilisateurs, offrant toutes les fonctions attendues avec une qualité d'expérience satisfaisante. Il est alors tentant, dans ces cas, de considérer que la "perfection" est atteinte et qu'il n'est point nécessaire de remettre en question les acquis.
Ce serait malheureusement ignorer que les mobinautes sont des individus, aux besoins spécifiques, auxquels il faut répondre de plus en plus précisément. La conception traditionnelle des logiciels, basée sur des scénarios d'usage standards, adaptés à quelques profils utilisateurs types (les "personas" en langage marketing), même soigneusement sélectionnés, se révélera moins pertinente pour les consommateurs s'habituant progressivement à des services toujours plus personnalisés.
Pour continuer à satisfaire les utilisateurs à l'avenir, il va donc falloir créer des applications capables de s'adapter en permanence à leurs attentes particulières, jusqu'à répondre à celles-ci avant même qu'elles ne soient exprimées. Et, pour y parvenir, c'est l'approche de la création des solutions qui doit être revisitée en profondeur, autant (sinon plus) du côté des responsables "métier" que chez les développeurs.
Dans cette perspective, les analystes de Forrester identifient 4 exigences indispensables pour la conception d'applications prédictives :
- Connaître l'utilisateur individuel (via les capteurs de son ou ses appareils, son comportement avec le logiciel…),
- Identifier ou, mieux, prédire ses intentions (notamment par le contexte et une analyse historique),
- Adapter les services et contenus délivrés en fonction de l'intention,
- Optimiser le fonctionnement en fonction du canal.
Plusieurs disciplines complémentaires seront mises à contribution pour satisfaire l'ensemble de ces besoins. Par exemple, la connaissance de l'utilisateur et la détection des intentions pourront s'appuyer sur des analyses de données sophistiquées (pensez "big data") et les adaptations de fonctionnement selon les intentions imposeront la mise en œuvre d'architectures logicielles extrêmement modulaires et agiles. Il sera également nécessaire d'intégrer des instruments de mesure dans les applications pour permettre un auto-apprentissage.
Alors que le canal mobile devient critique pour la conquête et la fidélisation de leurs clients, il est difficile actuellement pour les entreprises – les institutions financières comme les autres – de différencier leur présence parmi les centaines de milliers d'application disponibles dans les AppStores. Celles qui adopteront les premières l'approche "prédictive" auront certainement l'avantage pendant quelques temps. Certes, la tâche peut sembler insurmontable, mais il est aussi possible de l'aborder par petites étapes successives…