Christiane Taubira a
manifestement eu gain de cause, le principe de la « peine de probation »,
mesure phare de sa réforme de la politique pénale a été
validé par François Hollande.
L’objectif clairement affiché est de réduire au maximum le nombre de peines
d’emprisonnement.
Soyons clair, les prisons françaises sont une honte nationale. Surpeuplées,
pour beaucoup vétustes, mélangeant petits et grands délinquants, royaume des
plus violents, les prisons françaises sont régulièrement épinglées par
l’Europe qui condamne des conditions d’incarcérations considérées comme
« inhumaines ».
En 2005, le commissaire européen Alvaro Gil Roblès était même allé jusqu’à
dire qu’il n’avait, nul part en Europe, vu "pire"
que les prisons françaises, "sauf en Moldavie"…c’est pour dire !
Ajoutons à cela que la peine de prison n’a démontré son efficacité ni pour
dissuader le criminel de passer à l’acte ni pour éviter la récidive, récidive
qu’elle pourrait même, au contraire, encourager.
Christiane Taubira n’a donc pas tort, si la prison peut être évitée, évitons
là ….mais pas à n’importe quelles conditions.
L’erreur de Christiane Taubira et à travers elle de François Hollande et de
son Gouvernement, c’est d’avoir transformé ce qui aurait pu être une bonne
intention, en mauvaise raison.
Toute à son aversion, que l’on peut comprendre, pour l’emprisonnement,
Christiane Taubira donne le sentiment de n’avoir qu’une seule préoccupation,
vider les prisons quitte à libérer les détenus le plus rapidement possible via
des
réductions systématiques de peine et à substituer à la prison des peines
dont on a du mal à percevoir en quoi se sont des peines.
Réduire les peines de prison est évidemment une solution simple pour réduire
le nombre de détenus. Mais, adapter notre code pénal à la désastreuse situation
des prisons françaises, c’est prendre le problème à l’envers. Sur d’autres
sujets il pourrait se justifier d’adapter nos prétention à nos moyens (ce qu’on
a du mal à faire) mais pas en matière de Justice.
C’est de toute façon un mauvais signal donné à la fois aux délinquants et à
la population qui a déjà souvent le sentiment qu’à travers les réductions de
peine pour « bonne conduite » assez faciles à obtenir, la Justice
fait trop souvent preuve d’une bienveillance coupable.
Quand aux « peines de probation », certes le concept demande à être
précisé, mais il part clairement d’un mauvais pied.
On peut le regretter mais la prison est considérée dans l’imaginaire
populaire, à tort ou à raison, comme la seule véritable punition pour les
auteurs d’actes « graves ». Toutes les autres « peines » sont en
conséquence considérées comme insuffisamment punitives.
Le travail d’intérêt général ou le placement sous surveillance électronique
(bracelet) apparaissent, dans leur mode d’utilisation actuel, comme de trop
petites peines face à la plupart des délits. On ne sait pas encore ce qui se
cache derrière les futures « peines de probation » mais le moins que
l’on puisse dire c’est que l’appellation n’impressionne pas.
Le nom même de « peines de probation » n’incite pas à penser qu’il
s’agit d’une véritable sanction. Si j’en crois mon meilleur dictionnaire, le
mot probation signifie plutôt « mise à l’épreuve » que
« punition » !
Pourtant, elles pourront concerner des condamnés qui sinon auraient fait
jusqu’à 5 ans de prison, ce qui n’est pas rien. On n’écope pas de 5 ans de
prison pour des délits mineurs.
L’erreur de Christiane Taubira, c’est de vouloir vider les prisons sans au
préalable avoir expliqué sinon défini par quoi la peine d’emprisonnement sera
remplacée. Sachant que pour que cette substitution soit acceptée par les
citoyens sans être considérée comme une démonstration de laxisme, il est
important de démontrer que même sans emprisonnement, les condamnés seront punis
à la hauteur de la gravité de leur crime.
Or, compte tenu des précédentes positions de Christiane Taubira en la
matière, on est en droit d’avoir des doutes. De surcroit, il est également à
craindre que faute d’un encadrement suffisant, ces peines soient ni
suffisamment contrôlées ni suffisamment encadrées et en conséquence moins
coercitives.
Ainsi, malgré un constat pourtant partagé par beaucoup de monde, qu’il est
nécessaire de réagir face au véritable scandale que constituent nos prisons,
par maladresse sinon par intransigeance, les mesures proposées vont être
considérée par beaucoup comme une nouvelle preuve du « traditionnel »
laxisme de gauche dont Christiane Taubira se serait faite l’égérie. C’est bien
dommage, parce que la question des prisons est un problème grave qui concerne
toute la société et dont la réponse aurait mérité un fort consensus.