Pourtant, comment reprocher à nos gouvernants de vouloir se définir des
objectifs à long terme.
Comment leur reprocher de vouloir dépasser les prochaines échéances
électorales, la prochaine enquête d’opinion ou les 140 caractères d’un tweet
symbole du succinct et de l’éphémère.
Le temps de la politique médiatique et de l’agitation ambiante ne sont pas
compatibles avec celui de la gouvernance. Pire encore, ils sont souvent
contradictoires.
Combien de lois ont été votées dans la précipitation, uniquement pour
répondre aux attentes impatientes de l’opinion. Combien de décisions ont été
prises uniquement pour que leurs éphémères effets soient immédiats et visibles
avant une échéance électorale. A contrario combien de décisions difficiles
n’ont pas été prises parce que leurs effets positifs ne se seraient fait sentir
qu’après la fin d’un mandat. Avant que son Agenda 2010 ne produise ses effets
et soit reconnu comme l’initiateur du renouveau de l’économie allemande,
Gerhard Schröder a eu largement le temps de se faire virer de son poste de
Chancelier.
Combien de personnes s’imaginent naïvement, parce qu’on leur a laissé
croire, qu’une réforme importante doit avoir des effets immédiats. Combien
s’imaginent que le chômage peut durablement être résorbé sans un long travail
de fond préalable sur ce que doit être l’Etat providence, sur l’organisation de
l’Etat, sur le marché du travail, sur la formation professionnelle, sur la
recherche ou sur la fiscalité des entreprises. Une bonne politique nécessite du
temps. Elle nécessite en corollaire de se projeter sur une échéance à au moins
5 ans. C’est d’une certaine manière le fameux cap de François
Hollande.
Dans notre cinquième république, c’est au Président de la République de
fixer les grands objectifs à moyen et long terme, c’est à lui d’exprimer au
cours de la campagne présidentielle vers où il veut amener la France et comment
il veut y aller. Lors de sa campagne, François Hollande s’est contenté d’un
agenda approximatif. Quelques vœux pieux, 2 ans d’efforts et le reste du
quinquennat pour profiter du fruit de ces efforts. C’était bien évidemment très
insuffisant et d’un optimisme trompeur.
En demandant à ses ministres de se projeter dans l’avenir, François Hollande
leur demande de se livrer à un exercice essentiel qu’il aurait du assumer
lui-même et bien avant. De plus, en exigeant qu’ils s’y prêtent pendant leurs
courtes vacances il dévalorise ce qui devrait être l’acte fondateur de tout
mandat présidentiel.
Enfin, sous prétexte d’une échéance lointaine il s’expose à n’obtenir qu’une
description idéalisée du
monde rêvé par chacun et accessoirement de mettre en valeur des différences
essentielles de points de vue au sein de son gouvernement.
Que va donc faire François Hollande des devoirs de vacances de ses ministres ? les assembler façon puzzle pour en faire un mauvais tableau de la France en 2025 ? L'oeuvre collective risque de manquer d'harmonie et toute façon c'est trop tôt pour la prochaine campagne présidentielle et trop tard pour la précédente.