Il pleure beaucoup, il finit même par hurler.
Il devient rouge et je vois les larmes couler sur ses petites joues rebondies.
Les bras de son père le bercent, sa voix tente de l’apaiser.
Ça ne fonctionne pas, ça ne fonctionne plus.
Il me regarde. Il tend les bras.
Il me regarde et il pleure de plus en plus fort.
Moi aussi je pleure, à l’intérieur.
Je résiste, j’essaie de ne pas courir vers lui.
1,2,3,4,5…. C’est déjà 5 secondes de trop.
Il a des hoquets, renifle d’une façon tellement mignonne que j’ai envie de le serrer encore plus fort.
Dans mes bras il se calme, vite.
Il s’apaise.
Je sens son souffle chaud et ses larmes qui roulent dans mon cou. Sa main joue avec mes cheveux, il soupire.
Depuis que j’ai commencé ma formation, le Ptit Loup gère mal mes absences.
Le matin, je pars avant son réveil et quand je rentre le soir, je dois travailler. J’essaie de passer du temps avec lui, un maximum, mais je dois travailler. Je n’ai pas le choix, il le faut.
Il ne comprend pas pourquoi je ne m’occupe pas de lui alors que je suis là. Il ne comprend pas et il pleure. Et moi aussi…
Je n’ai plus le temps. Ni pour mon fils, ni pour son père. Ni même pour moi, mes amis, mon autre famille.
Mon corps montre des signes de faiblesse, dormir 4h par nuit ne lui convient pas.
Mes nerfs lâchent et le rythme des disputes avec l’Homme de ma vie est de plus en plus soutenu. Les voix montent, surtout la mienne. Les phrases partent, rapides, cinglantes, elles giflent, tapent, cognent. Elles lui font du mal.
Et dans notre lit, redevenir une petite fille, me blottir contre lui en lui demandant pardon. Pleurer en entendant sa réponse, il ne m’en veut pas, il m’aime, il sait que c’est dur pour moi.
J’ai mal à la mâchoire à force de serrer les dents. Je ris nerveusement.
Mon sourire est éblouissant. "Oui ça va super et toi? Tu viens dîner à la maison bientôt?". Mensonge! Non surtout ne viens pas dîner, je t’en supplie, je n’ai même pas le temps de cuire des pâtes!
Moi qui déteste les montres, qui n’en porte jamais, je viens de m’en acheter une. J’ai déréglé mon réveil, il est toujours quinze minutes de plus que l’heure réelle. Illusion d’être un peu en avance, d’avoir le temps de boire un second café avant d’y aller.
Me rendre compte que mon fils va avoir cinq mois déjà, qu’il a deux dents et de plus en plus de cheveux.
Prendre conscience qu’il grandit sans le voir vraiment.
Regarder les photos, d’avant, d’il n’y a pas si longtemps. Et constater l’absence, la mienne. Pleurer devant l’album, crier à l’injustice. Et moi? je suis où moi? c’est de mon ventre qu’il est sorti! Et dans mes bras, sur les photos, il n’y est pas…
Et tous ces projets. Nos projets. La maison. Le mariage.
Avorté le mariage. Remis à plus tard. Pas le temps d’organiser. Pas le temps. Plus le temps.
Cette tristesse qui plombe mon cœur. Tant pis si on ne se marie pas l’année prochaine, ça ne veut pas dire qu’on ne s’aime pas, qu’on ne le fera pas…
Petits grains de bonheur qui s’éloignent toujours un peu plus….