Untitled - 1982
Pour être honnête, si l'amie avec laquelle j'ai visité cette exposition ne me l'avait pas proposé, je ne serai certainement jamais allée la voir. Comme beaucoup de gens de ma génération, j'ai été abreuvée, dans mon enfance et mon adolescence, de produits estampillés Keith Haring: t-shirts, trousses, tasses, badges...(le pendant américain de Ben, en somme: qui n'a jamais eu une trousse, un stylo ou un agenda Ben??!!!) et j'avais donc, depuis, le sentiment que l'artiste avait un peu perdu de son authenticité au profit d'un merchandising outrancier!Untitled - 1982
L'exposition du MAM m'a prouvé le contraire! Derrière cette récupération commerciale, demeurent un artiste sincère et des revendications multiples et c'est par ailleurs le fil conducteur choisi par le musée parisien: les messages politiques érigés par Keith Haring tout au long de sa carrière courte mais prolifique.
Andy Mouse New Coke - 1985
Il faut reconnaître que la scénographie de l'exposition la sert beaucoup: elle est claire, lumineuse et parfaitement organisée. On découvre plus de 250 œuvres et on en prend plein les yeux. L'accrochage thématique met en lumière les différents combats de l'artiste: l'Etat (le chien à la grande gueule écrasante) qui annihile l'individu, le capitalisme et la société de consommation (peut-être la catégorie qui m'a laissée le plus perplexe! Keith Haring a certes dénoncé la société de consommation mais il en aussi bien profité.), l'appropriation de l'espace public avec une volonté libertaire de rendre l'art accessible à tous, la religion, les mass media (là encore, ironie du sort: ce qu'il dénonçait l'a bien servi...), le racisme, l'écologie et le sida dont il mourra lui-même.
1980
A travers ce prisme, on regarde autrement les oeuvres de Keith Haring. Ce ne sont plus seulement des dessins hautement graphiques et colorés avec leurs petits bonhommes qui nous amusaient tant enfant, elles revêtent des messages significatifs et pour beaucoup avant-gardistes.
Untitled - 1983
Il est intéressant aussi de remarquer comme il s'approprie l'art classique avec ses jarres évoquant l'antiquité égyptienne ou ses masques reflétant une tribalité pop! On comprend aussi mieux l'iconographie de son art qui, une fois maîtrisée, délivre tant de messages: l'Etat qui prend les traits d'un chien ou d'un robot, le spermatozoïde géant qui symbolise le sida..
Untitled (Masque) - 1987
C'est une exposition qui peut se lire à travers des interprétations multiples. Pendant ma visite, il y avait de nombreux enfants qui ne devaient pas percevoir (heureusement!) toutes les subtilités des revendications proposées par l'artiste mais faisaient des réflexions intéressantes sur ce qu'ils percevaient...Et d'autre part, les adultes qui découvraient, s’interrogaient...A Pile of Crowns for Jean-Michel Basquiat - 1988
Dans toutes les œuvres, on discerne l'homme derrière l'artiste: ses peurs, ses révoltes, ses amitiés,...Une oeuvre identitaire et globale à la fois.
Brazil - 1989
Et que dire du dessin? Cela semble facile au premier regard et pourtant...On perçoit un talent fou derrière cette capacité à exprimer le plus simplement et vigoureusement possible, ses combats...Une précision du trait, une application et surtout une obsession!Untitled (Self-Portrait) - 1985
Une exposition qui a le beau mérite de faire découvrir ou redécouvrir un artiste que l'on pensait un peu trop simplement connaitre!Unfinished Painting- 1989
Bises!