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Spitzer débusque une énigme au coeur des amas galactiques

Par Memophis

Les Brightest Cluster Galaxy sont les galaxies les plus lumineuses au centre des amas galactiques. Elles sont parfois bien plus massives que la Voie lactée. Pour le moment, on ne comprend pas bien leur origine dans le cadre du modèle cosmologique standard, avec de l'énergie et de la matière noires. Les observations de Spitzer et Wise viennent de montrer qu'elles ont brusquement ralenti leur croissance il y a des milliards d'années. Les chercheurs en ignorent la raison.

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Ces images montrent deux des amas de galaxies observées par Wide-field Infrared Survey Explorer (Wise) et le télescope spatial Spitzer. Au centre de chaque image, une Brightest Cluster Galaxy se signale par sa luminosité. L'image de gauche montre l’amas Abell 2199, à une distance de 400 millions d'années-lumière du Soleil. Cette image combine les données infrarouges de Wise (en rouge) avec celles dans le spectre visible du Sloan Digital Sky Survey (en bleu et vert). Sur la droite, on distingue l’amas CSI 1433.9+3330, qui est nettement plus éloigné avec une distance de 4,4 milliards d'années-lumière. Les données infrarouges de Spitzer (en rouge) sont combinées avec des données similaires prises par le télescope Mayall de Kitt Peak, en Arizona. © NASA, JPL-Caltech, SDSS, NOAO

Le monde des galaxies recèle encore bien des mystères, même si d’importants progrès ont été réalisés depuis qu’Edwin Hubble a été en mesure de démontrer qu’il s’agissait bien d’objets extérieurs à la Voie lactée dans les années 1920. Hubble a ainsi mis fin au Grand Débat. C'était le nom donné aux discussions sur ce qui était à l'époque appelé les « nébuleuses », leur nature et l’éloignement de ces objets, et par la suite de leur nature galactique ou extragalactique. Ce faisant, Hubble rendait justice aux intuitions et aux raisonnements d’Emmanuel Kant, qui avait proposé plus d’un siècle plus tôt que certaines de ces nébuleuses étaient des univers-îles, de vastes concentrations d’étoiles similaires à la Voie lactée.

Ces univers-îles, nous savons qu’ils se rassemblent en amas de galaxies, et que ces amas forment de grands vides dans l’univers observable. Les scientifiques cherchent à comprendre l’origine de ces grandes structures comme le résultat de processus complexes, dominés par la matière noire ou l’énergie noire selon les échelles. Des simulations sont effectuées dans ce but, par exemple avec Deus. Les spéculations théoriques ne sont pas en reste, et depuis quelque temps, la théorie Mond marque de plus en plus de points.

Les Brightest Cluster Galaxies, stars des amas galactiques

Bien sûr, les observations restent encore le socle sur lequel reposent tous ces travaux, et ce sont elles, en définitive, qui permettent de tester et de réfuter les théories concernant le royaume des galaxies. Récemment, les télescopes Spitzer et Wise ont été utilisés pour tenter de mieux comprendre l’origine de certaines galaxies bien particulières, que l’on appelle en anglais des Brightest Cluster Galaxies, ou BCG.

Basiquement, une BCG est définie comme la plus brillante galaxie dans un amas. Certaines d’entre elles sont les plus massives que l’on connaisse dans le cosmos observable. Elles peuvent contenir plusieurs dizaines de fois la masse de la Voie lactée. Il s’agit généralement de galaxies elliptiques, et on les trouve à proximité du centre géométrique et cinématique de l’amas galactique, là où l’on trouve aussi le maximum des émissions de rayons X associées au gaz intergalactique chaud d’un amas.

Abell S0470 est un amas de galaxies situé dans la constellation du Centaure, à environ 465 millions d'années-lumière (143 Mpc) de la Voie lactée. Il est dominé par ESO 325-G004, une galaxie elliptique géante dont la masse provoque un effet de lentille gravitationnelle sur les objets situés au loin à l'arrière-plan. ESO 325-G004 est un exemple typique de Brightest Cluster Galaxy.

Abell S0470 est un amas de galaxies situé dans la constellation du Centaure, à environ 465 millions d'années-lumière (143 Mpc) de la Voie lactée. Il est dominé par ESO 325-G004, une galaxie elliptique géante dont la masse provoque un effet de lentille gravitationnelle sur les objets situés au loin à l'arrière-plan. ESO 325-G004 est un exemple typique de Brightest Cluster Galaxy. © Nasa, Esa

Des problèmes subsistent pour comprendre comment se forment les Brightest Cluster Galaxies, notamment parce que leur existence ne s’explique pas facilement dans le cadre du modèle de la matière noire froide. Plusieurs scénarios ont été proposés, comme pour la croissance des autres grandes galaxies d’ailleurs.

L'énigme de la croissance des Brightest Cluster Galaxies

Les BCG pourraient s’être formées en étant alimentées en matière par des filaments froids, ou par cannibalisme galactique avec capture continuelle de petites galaxies. Leur croissance pourrait aussi avoir eu lieu principalement par fusion rapide de galaxies, au moment où les amas qui les contiennent étaient en formation par effondrement gravitationnel. Actuellement, on pense que c’est bien principalement en capturant des galaxies que les BCG grandissent.

Pour en savoir plus, des astrophysiciens ont étudié environ 300 amas de galaxies, répartis sur neuf milliards d'années de temps cosmique. Les amas les plus éloignés datent d’une époque où l'univers était âgé de 4,3 milliards d'années, et les amas les plus proches d’une période où l'univers était âgé de 13 milliards d'années (l’âge de l’univers observable est estimé à presque 13,8 milliards d’années depuis les résultats de Planck). Leur travail a été publié sur arxiv.

Spitzer et Wise sont tous les deux des télescopes infrarouges, mais ils ont des caractéristiques uniques qui se complètent. Spitzer est plus adapté à l’étude des amas lointains, alors que Wise est le meilleur outil d’observation pour les amas proches. En combinant les données des deux télescopes, les astrophysiciens ont pu établir que la croissance des BCG ne se déroulait pas comme on s’y attendait. Leur vitesse de croissance s’est considérablement ralentie depuis environ cinq milliards d’années. Les chercheurs ne comprennent pas vraiment ce qui a été la cause de cette brusque baisse d’appétit des BCG. Nul doute que les théoriciens devront revoir une fois de plus leur copie.


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