Percevoir avec notre esprit, notre chair intérieure. Laisser s’élargir l’instant présent, non plus d’avant en arrière, comme nous le faisons d’habitude, vers le passé et l’avenir, mais de haut en bas et de droite à gauche, à la mesure de l’espace qui nous environne. Abandonner un moment le souci de l’information, le savoir sommaire, la fiche technique qui accompagne chaque chose, pour la regarder en intégrant ce qu’il y a d’invisible autour d’elle, cette auréole de solitude lumineuse qui l’enveloppe comme une mandorle. Il est une sorte d’intimité du réel, qui m’est intérieur comme je lui suis intérieur. Non pas une humanisation de la moindre chose, en lui prêtant mon âme et mes sentiments, mais en l’appréhendant dans la totalité d’un être du monde qui résonne en chacune de ses cellules vivantes, dans le bibelot isolé, le plus petit brin d’herbe, pourvu que nous les regardions avec une attention purifiée, dégagée de nos préoccupations immédiates.
L’exercice, cependant, est délicat : s’abandonner à l’attention. Savant mélange d’effort, de vigilance, et de distance, presque de détente. C’est dans cet équilibre difficile, nécessairement instable, que la vie peut donner toute sa lumière, que l’esprit devient une aventure, l’être, un espace libre et exaltant. Essayez, fréquemment, n’importe quand, sur un banc, dans la rue, dans un train, dans un square ou une forêt – les visages, les ombres et les lumières, les grands ciels gris ou les infinis d’azur. Essayez, vous verrez, Dieu vous parlera autrement.
Contempler, c’est percevoir avec notre esprit, notre chair intérieure. Essayez, fréquemment, n’importe quand, sur un banc, dans la rue, dans un train, dans un square ou une forêt. Vous verrez, Dieu vous parlera autrement.
Philippe Mac Leod
(source : La Vie)