« mon corps existe, depuis toi. C’est difficile à expliquer, encore que cela ne me gêne pas à dire ; et je m’étonne ; car tout de même, avant que je ne te rencontre, des hommes vivaient autour de moi ; mais je ne les désirais pas ; à peine si depuis l’été dernier je savais le goût ? de fruit vert, parfaitement ! ? de cette flammèche furtive allumée au noir du ventre. Et maintenant… Maintenant ! Ah si les gens savaient pourquoi je ris parfois dans la rue ! Je ris du bonheur de te sentir t’établir dans mon corps ; je ris d’une grande faim qui me vient… Si ma mère lisait ces lignes, recevrais-je une fessée ? »
Mireille Sorgue, Lettres à l'amant I et II, Albin Michel, 1985, coll. « Le Livre de poche ».