Le modèle allemand mis à mal, enfin ?

Publié le 06 août 2013 par Letombe

Les élections législatives allemandes approchant, on se surprend à commenter les travers d'un modèle d'Outre-Rhin qui finalement nous ferait horreur. Vendredi 2 août, le Monde s'y met. Il n'est jamais trop tard. On attend encore les mêmes confessions tardives des Echos, du Figaro, ou même du Nouvel Obs.

Ce vendredi 2 août, le quotidien du soir avait la critique farouche. Eté oblige, il fallait résumer pour une audience CSP+ disséminée en vacances ce qui se tramait chez nos voisins germaniques. L'été a ceci de bon que l'attention se concentre sur peu. Un titre en une sur les "fragilités de la puissance allemande", et vous avez gagné quelques points de convictions journalistiques pour la rentrée prochaine.

Les reproches du Monde sont clairs, simples, et souvent connus.

L'économie est bien "compétitive" mais la croissance est jugée "faible". Le coût du travail dans le secteur privé, par heure travaillée, est certes plus bas qu'en France (31 euros l'heure contre 35 euros) mais la mesure est partielle; les inégalités "se creusent entre les travailleurs de l'industrie bien payés et les travailleurs précaires du secteur des services". Le poids de l'Allemagne dans les exportations mondiales ne cesse de baisser (plus de 11% en 1991, à peine 8% en 2011 d'après Eurostat). Qui loue encore, à part le MEDEF et quelques nostalgiques sarkozystes, ces réformes Harz du gouvernement Schröder "qui ont permis une plus grande flexibilité sur le marché du travail, et notamment la création de petits boulots rémunérés à moins de 5 euros l'heure" ?

Angela Merkel abeau être femme, la situation professionnelle des femmes "s'améliore peu" en Allemagne. Ce 1er août entrait en vigueur la fameuse "prime au fourneau", une nouvelle allocation familiale d'environ 100 à 150 euros mensuels (en 2014) pour les parents d’enfant de moins de trois ans qui renoncent aux services d’une crèche. Quelle misère...

La candidate Merkel a chipé quelques idées du rival social-démocrate, il y a quelques mois. Il fallait séduire l'électorat, gagner coûte que coûte y compris en endossant des propositions jamais mises en place ni même défendues depuis bientôt une décennie que la chancelière est en poste.

Les sondages la donnent gagnante.

L'analyse du moment sur les failles du modèle allemand oublie un argument pourtant central: l'Allemagne s'en sort parce les autres pays, surtout en Europe, perdent. Le jeu est à somme nulle. La "compétitivité" intra-européenne s'obtient contre ses plus proches voisins. Le modèle allemand s'essouffle, nous explique-t-on enfin, parce qu'il y a plus compétitif ailleurs.

Seconde critique à rappeler, le modèle allemand fait d'autres ravages en Europe: la "rigueur" qu'on appelle austérité en ce qu'elle consiste à réduire les dépenses sociales et les salaires de pays déjà minés par une grave récession pour prétendument redresser leurs comptes publics fait encore des ravages.

Le nouvel aveu du FMI, lundi 5 août, est là pour le rappeler: Christine Lagarde s'est émue de l'austérité ... en France.

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  • L'Allemagne, une puissance économique égoïste (tribune de Stéphane Madaule, essayiste, dans le Monde)