Il y a bien des choses que nous
pouvons retenir de l’événement d'aujourd'hui.
Mais d'abord un petit
rappel.
La constitution algérienne de 1996,
amendée en 2002 et 2008 dit ceci:
- Article 34 - L’Etat garantit
l’inviolabilité de la personne humaine.
Toute forme de violence
physique ou morale ou d’atteinte à
la dignité est proscrite.
- Article 35 - Les infractions commises à l’encontre des droits et libertés, ainsi que les atteintes physiques ou morales à l’intégrité de l’être humain sont réprimées par la loi.
- Article 36 - La liberté de conscience et la liberté d’opinion sont inviolables.
Ces articles protègent la conscience et la dignité de l'individu. Y compris l'algérien catholique, boudhiste, mécréant, athé, agnostique, chrétien, juif, boudhiste etc.
Et qui a le droit de ne pas être musulman, parce qu'il existe une liberté de conscience dans la constitution.
Selon ces articles de la constitution et non pas d'une loi annexe, l'algérien a le droit de ne pas jeûner.
C'est son droit le plus absolu. Les walis n'ont pas le droit de faire fermer les lieux publics comme les restaurants et les cafés.
Selon la constitution.
Selon la constitution de la république, et parce que et tant que l'Algérie n'est pas un califat, du moins par cette constitution, les gendarmes, les policiers, les juges, les procureurs de la
république, les ministres et même le président de la république ne peut pas arrêter ou faire arrêter une personne qui ne respecte pas le jeûne du ramadan.
Jeûner ou ne pas jeûner est une affaire de conscience. Pas de loi.
Il n'existe aucun texte de loi - et la loi se doit d'être claire et sans multiples interprétations - qui stipule que de ne pas jeûner est un délit.
Socialement, selon les traditions, il se peut que cela soit mal perçu ou vu comme une provocation vis-a-vis de la société.
Mais ça n'est en aucun cas une atteinte aux mœurs. L'atteinte aux mœurs est claire et concerne certaines pratiques dangereuses et nocives pour les autres dans la société. Et c'est en l'absence de
loi claire, absence justifiée par le droit liberté de conscience, que des personnes, des responsables, des juges ont condamné des non-jeûneurs en Algérie.
Ils ont eux-mêmes commis un crime contre la constitution et contre la liberté de conscience.
La seule chose que fait un non jeûneur c'est de créer une "tentation" pour les jeûneurs qui doutent de leur détermination et enfin de compte de leur foi.
Auparavant, dans notre société, il y avait des gens qui ne jeûnaient pas. Ils le faisaient discrètement ou en public - il y avait des cafés et des restaurants ouverts pendant la journée durant le
ramadan - et personne ne les arrêtait, et personne ne les jugeait.
Même les gens les acceptaient. La société algérienne était tolérante.
L'islam en Algérie était tolérant.
Et puis, quand les gendarmes sont entrés dans un lieu fermé, pour arrêter des gens qui déjeunaient, ou quand des jeunes l'année passée se sont retrouvés dans un tribunal, condamnés pour n'avoir
pas respecté le jeûne, qu'avons nous fait?
Avons nous sorti la constitution pour les défendre?
Avons nous réclamé leur libération au nom de la liberté de conscience?
Avons nous réfléchi e terme de tolérance et de justice?
Non! Nous n'avons rien fait. Ils ont subi la question, les coups, les insultes.
Et nous n'avons rien fait. jeûneurs ou non-jeûneurs pour faire respecter notre droit à tous, notre constitution. Comme nous ne faisons rien contre la corruption - citée et interdite par la
constitution.
Parce que nous avons peur du bâton du système. Et nous avons peur des islamistes violents qui pourraient nous égorger.
Mais par contre, sachant que les gens qui vont déjeuner à Tizi-Ouzou, à Aokas ou ailleurs ne sont que de simples citoyens qui ne commandent pas aux bâtons de la répression et n'ont pas tendance à
égorger en criant des prières, nous nous permettons de les juger, de trouver qu'ils provoquent, de considérer qu'ils ont commis un acte moralement répréhensible.
Leur acte eut été répréhensible si la constitution était respectée. Si nous avions défendu les faibles et les victimes de l'injustice.
En fait, nous sommes devenus intolérants.
Notre vision, notre vie de l'islam est devenue intolérante.
Lamine Badaoui