Les Vieilles Charrues, le plus grand festival musical de France à Carhaix, au milieu de la Bretagne et surtout de nul part a accueilli plus de 200 000 personnes durant 4 jours du 18 au 21 juillet.
Le festival qui tente d’accueillir autant de légendes : Neil Young & Crazy Horse, Phoenix, Santana ou The Hives que des « petits nouveaux » : La Femme, Juveniles, Superpoze, Cashmere Cat, entre autres, pour satisfaire l’ensemble des spectateurs, semble ne pas parvenir à rassembler. Là où des festivals tels que les Astropolis et les Transmusicales visent un public précis, adepte des musiques électroniques pour le premier et véritable mélomane pour le second, les charrues essayent de toucher tout le monde et n’atteignent finalement personne.
Une programmation qui ne semblait pas forcément convaincante, notamment le choix de Rammstein et le remplacement de Sir Elton John par Patrick Bruel (en urgence).
Malgré de très beau noms, on appréhendait, peut-être parce qu’on en espérait beaucoup, durant ces 3 jours.
On vous raconte pourquoi c’était finalement extra !
Vendredi : « I’ve Never Been In Mexico »
Les 3h30 nécessaires pour se déplacer de la gare au camping parmi une marée humaine, nous auront fait rater le début du live des Half Moon Run. On n’assistera seulement qu’aux 2 dernières chansons de ceux qui avaient la difficile mission d’ouvrir la journée de vendredi. 15h00 sous un Soleil implacable et la proportion de festivalier encore à l’extérieur du site explique le peu, relatif, de monde devant la scène. On aura du mal à juger de leur performance mais on a plutôt apprécié l’indie-rock des canadiens.
Petite pause alors qu’on va se poser devant la grande scène principale en attendant Rokia Traoré, habituée du festival. La chanteuse malienne offre un set plutôt efficace malgré une musique peu adaptée au public qui, s’il reste ouvert et recherche la découverte, est principalement présent pour les têtes d’affiches. Difficile de décrire sa musique qui consiste en un subtil mélange de guitare rock et d’instruments plus traditionnels. Assez classe et sympa.
Juveniles
Sympa, mais pas au point qu’on rate le début du concert des Juveniles. Les rennais sont attendus à la scène « Graal » par une petite foule dont la moyenne d’âge qui avoisine les 18 ans contraste avec un public assez âgé sur l’ensemble du site : 25 ans de moyenne. Le groupe révélé il y a déjà 2 ans avec son single We Are Young, signé chez Kitsuné, enflamme la foule ! Très bon live notamment du nouveau venu: Ousseynou Cissé. Un set solide et une aisance évidente sur scène, discussion et déconne avec les fans, que Fantasy, dernier single du groupe, viendra clôturer en beauté.
On se décale ensuite pour repartir après avoir vu un morceau de Lily Woods & The Pricks, déjà vu et toujours aussi ennuyant, et on atterrit devant notre idole : Patrick Bruel. Vous avez eu peur hein ? En réalité on est allé dormir. Aucune faiblesse ne sera tolérée pour une soirée s’annonçant délirante. Lescop et sa cold-pop chiante en aura donc aussi fait les frais.
Les belges BRNS nous réveilles en sursaut. Qu’est-ce que c’est bon. 1h10 de live éclatant dont tu ressors heureux. « I’ve never been in Mexico, I’ve never been in Mexico, I’ve never been in Mexico » et que ce qui te regarde de haut aille se faire foutre.
On se repose vite fait en attendant le groupe de la soirée : Two Door Cinema Club. Le temps de subir l’antipathique fin du live de M. Petite remarque : remercier les musiciens et les techniciens c’est louable comme intention mais y passer 15 minutes en les qualifiants tous de merveilleux, c’est plus de l’hypocrisie qu’autre chose. Un manque de naturel absolu, et c’est franchement écœurant.
Arrivée en costard des TDCC et départ immédiat avec Sleep Alone. Le trio transforme la scène « Kerouac » en dancefloor géant. Tube après tube, ils nous livrent un set taillé pour les stades qui ne laisse aucun répit à tes mollets. De Sun à Something Good Can Work, les irlandais s’affirment comme des bêtes de scènes. Le contraste entre la folie joyeuse et pétillante de leur musique et leur immobilité sur scène fonctionne étrangement bien. Les 3 garçons finissent quand même par s’énerver alors qu’il lâche les premières notes de Come Back Home et offre un rappel somptueux avec What You Know. Dément.
Direction la scène « Glenmor » et Paul Kalkbrenner, on aurait aimé voir Suuns aussi mais l’envie de tester le plus célèbre des DJ allemands sera plus forte. Visuel sympa et lumières épileptiques pour un live plein de basse. Dur à réellement apprécier cependant, on est un peu loin et on n’est pas sûr qu’il fasse autre chose que lever les mains. Pas grave, on aura dansé avec 30 000 personnes sur Sky And Sand, Iron etc.
En résumé on a été :
- heureux de voir fonctionner à merveilles Juveniles et BRNS en live.
- déçu par Paul K et sa performance trop faible.
- ébloui par le live parfait des Two Door Cinema Club.
Samedi : « It’s Better To Burn Out Than To Fade Away »
Après une très courte nuit de sommeil, réveillé par les 45°C dans ce four qui nous sert de tente, 2h30 de queue pour prendre une douche et un petit-dej, on se faufile dans la zone presse pour préparer nos interviews de la journée : parce que oui : y en a qui taffe ! La chance est avec nous en cette journée ensoleillé, on ne sera pris que pendant le live de Féfé : rien de perdu donc. Les interviews de Yan Wagner et Superpoze arrive très vite.
Pas forcément convaincu par Wild Belle, les deux américains ne parviennent pas à nous faire rentrer dans leur concert, c’est sympa mais tout aussi intéressant sur son IPod. On s’éclipse et on revient pour assister à Superpoze, le jeune beatmaker nous à affirmer ne pas essayer de rendre son set plus accessible pour le public présent et c’est tant mieux. 50 trop courtes minutes insensées où il assassine ses platines pour le plus grand plaisir de nos oreilles. Une joie contagieuse et une maitrise impressionnante font danser la foule qui aura eu la bonne idée de le préférer à Asaf Avidan.
On en ressort avec un grand sourire niais figé sur le visage pour aller voir l’israélien au moment M. Juste le temps d’arriver sur la plaine bondée devant la scène « Kerouac » qu’explose One Day, reprise en cœur par les 65 000 festivaliers présent ce samedi. Efficace mais sans charme, on a même eu le droit à Weak, manque juste A Ghost Before The Wall.
15 minutes plus tard et l’estomac rempli on va regarder Yan Wagner qui délivre un set vraiment sympa, pas évident pour lui alors que Biolay joue en même temps. Sa cold pop électronique nous rassure sur la capacité de l’adapter en live, même de jour. On ne restera malheureusement pas jusqu’à la fin car avouons-le, Neil Young joue après et on aimerait être près de la scène.
20 minutes de slalom plus tard entre des gens qui attendent assis sous une pluie éparse le live de LA tête d’affiche du festival, on est près mais impossible de se rapprocher plus. Entouré de personnes avec des t-shirt Neil Young & Crazy Horse qui hésitent entre l’extase et le stress. Nous, on a toujours notre sourire stupide et celui-ci va s’amplifier avec le live que nous offre Neil Young. Arrivée silencieuse, simple et classe, le Loner entame directement et sans un mot par les 15 minutes de Love And Only Love. Il donne le ton, le concert sera saturé et électrique. A 67 ans, il rappelle qu’il est avant tout un rockeur et l’un des parrains du grunge. Les guitares hurlent et s’il n’est pas très communicatif, on ressent sa joie de jouer à travers ses rapides sourires. Après une première partie enlevée, les musiciens quittent la scène et Neil reste seul avec son harmonica et son acoustique. Enfin, il commence Heart Of Gold, son plus grand succès et poursuit avec une excellente reprise de Blowin in the wind, reprise en cœur par un public extatique. Reprise des guitares saturées pour la fin du live, très très bon Rockin In A Free World et rappel magique où il joue Hey Hey My My (into the black). On regrette juste l’ambiance un peu trop sage de l’audience, plus âgé que pour les autres lives et qui semble ne pas vouloir se relâcher malgré un ensemble très rock. Mais bon, on a vu Neil Young en live.
Il faut quitter la scène rapidement pour ne pas rater le live de Rone dont on attend aussi beaucoup. Le français tiendra sa réputation en livrant un show extra devant une foule déchaînée. On continuera ensuite avec Cashmere Cat qui finira la soirée en beauté par un set éclectique effréné.
En résumé, on a été :
- charmé et positivement exténué par les sets très aboutis de Superpoze, Yan Wagner, Rone et Cashmere Cat. (Scène Graal on t’aime)
- déçu par Wild Belle et Féfé (dont on n’avait aucune attente anyway).
- émerveillé et ému par le live incroyable d’intensité de Neil Young et son Crazy Horse.
Dimanche : « If I Ever Feel Better »
Quelques heures de sommeils plus tard alors que notre cerveau mélange encore Neil Young et Cashmere Cat on est prêt pour la dernière journée qui regorge de noms très sympas entre Alt-J, The Vaccines, Phoenix, La Femme etc.
Premier live de la journée, Mermonte les français vainqueur du tremplin jeunes charrues 2012, une formation nombreuse qui mélange synthé, guitare, batterie, et harpe. Ils feront de leur mieux pour réveiller le public sous un Soleil de plomb. Sympa et aérien, il manque peut-être une voix plus présente et assurée pour donner plus de profondeur à leur performance.
On assiste ensuite au concert de GoldWave, le jeune groupe nous sort un live très sympa malgré quelques problèmes de larsen. De la cold-pop électrique qui rappel Interpol sous MDMA et Joy Division avec plus de rage (visible).
Je n’ai ensuite pas pu assister à l’intégralité du concert de La Femme, étant en interview avec Jodie Banks et GoldWave (elles arrivent promis). Jouer à 16h00 alors qu’il fait 40°C et faire danser une foule compacte ne pose aucun problème au groupe qui maintient une ambiance déchaînée en interprétant tous ses morceaux avec une énergie folle. Sur La Planche et Antitaxi : magique. Fin démente avec le guitariste surfant sur le public. Un live extra à la hauteur de nos attentes. Merci.
Aucune pause de permise, The Vaccines commence leur live instantanément et on entend déjà Blow It Up en courant vers leur scène. Un concert efficace porté par un chanteur rock’n’roll et une musique faite pour le live. De Teenage Icon à Post Break-Up Sex (“I don’t know how you fell about this one, it’s called post break-up sex”) en passant par Wolf Pack, les londoniens enchaînent les bombes et embrasent leurs fans scène « Kerouac ».
On restera sagement éloignés de Marc Lavoine, qui semble curieusement avoir des fans chez Phoenix. Il faut voir le guitariste quitter en courant le plateau de France Bleu pour assister à « Elle a les yeux revolver ».
On se retrouve ensuite confronté à un choix difficile, presque extrême et quasi-impossible. Qui de Alt-J ou de Lou Doillon allons-nous voir ? Après 0.05 sec d’hésitation (ok c’est faux, on ne s’est pas posés la question), on s’oriente vers Alt-J. Conquis par « An Awesome Wave », on avait entendu des avis assez variés sur leur performance scénique : manque de pratique, d’assurance. Les 4 jeunes anglais livrent un set trop court (45 min au lieu de l’heure prévue) et pas forcément adapté à l’horaire ni la foule présente. Le live est néanmoins agréable même si on préférait les voir dans une petite salle plus intimiste à 23h00. L’assurance est là, la preuve par le short, le claviériste discute en français avec l’audience et le chanteur esquisse même quelques mots.
Santana, il fait un peu peur ce nom je trouve. Forcément déjà entendu et pourtant qui peut me citer trois chansons du mexicain. Europa, ça fait une…Black Magic Woman, deux plus qu’une…
C’est un peu l’impression ressenti devant ce show, parce que oui il s’agit d’un show. Ok, il est surement l’un des meilleurs guitaristes du monde et a dû en influencer beaucoup mais, contrairement à Neil Young, je trouve qu’il n’a rien sorti d’intéressant depuis 30 ans. Un bon concert pour se reposer dans l’herbe et compter les minutes avant le live de Phoenix, en écoutant de loin.
Direction la scène « Glenmor » où l’on pourra observer le live plat et sans réel intérêt de Busy P sur les écrans géants. Pedro Winter est sans aucun doute un excellent producteur mais il se contente ici de passer des morceaux sans réel apport : overdose de morceaux de l’écurie Ed Banger. L’avantage c’est qu’on ne regrette pas d’avoir préféré se réserver une place au premier rang pour les versaillais.
Attente nerveuse alors que Pedro joue avec des ballons géants devant des visuels épileptiques. 23h40 : la scène s’assombrit. On voit apparaitre alors les quatre musiciens, tous sourires au lèvre. Décollage immédiat avec l’enivrant Entertainment qui transporte instantanément la foule. L’atterrissage ne se fera qu’1h20 après. Tube après tube, un Lisztomania chanté par tous, un Trying to be cool survolté et un final sur If I Ever Feel Better conquièrent le public. Phoenix offre une performance ahurissant, parfait, emmené par un Thomas Mars de folie qui transmet avec une facilité déconcertante sa joie au public. Très souvent au contact des fans avant de finir par un slam qui rend fou la sécurité.
En résumé, on a été :
- emporté par l’énergie brute et pur de La Femme.
- déçu par un Busy P transparent et un Santana peu convaincant.
- blasté par le set génial de Phoenix qui s’impose comme la meilleur performance du weekend.
La force de ce festival, c’est le nombre de groupes qui y jouent : plus de 60 concerts sur trois jours. Si on craignait de devoir supporter les sets de bands auxquels on porte un intérêt proche du néant, on a toujours, ou presque, réussi à assister à un live sympa et intéressant. Découverte avec ces jeunes charrues prometteuses et grosses claques de la part des têtes d’affiches : que demander de plus ? Si je sais, des douches propres et plus nombreuses. On peut toujours rêver.
On remercie les organisateurs qui nous ont permis d’assister à ces 3 jours fous et notamment Pauline pour une com top avec les artistes.
Crédit Photos : Mathieu EZAN, Denoual COATLEVEN. Pour oubli de crédit ou demande de retrait me contacter.