Le trottoir au soleil - Philippe Delerm ***

Publié le 21 mai 2013 par Philisine Cave

Rares sont les livres au cours desquels je pense à une personne au moment de ma lecture. Je dois dire que Le trottoir au soleil fait partie de ces exceptions et la personne en pensée, Bonheur du Jour dont le blog offre un concentré de moments précieux (avec publication tous les deux jours).

Philippe Delerm profite de scénettes marquant l'instant présent, le fameux carpe diem latin, avec parfois un soupçon de nostalgie. Dans la même veine que La Première Gorgée de bière et autres plaisirs minuscules, Le trottoir au soleil se déguste sans modération mais sans ardeur non plus. Quelques perles savoureuses, une écriture pointilleuse et précise, une profonde sagesse sur l'existence se dégagent de ce recueil : 21 mars, le printemps (à l'aube de la vieillesse), On n'est pas invité ! (loin de nous, les carcans maritaux), la figue mûre à déguster, une envie d'Italie, la fêlure et l'empathie de Je fais la vaisselle,le salut comme vecteur de liaison dans Passez une bonne après-midi, la rencontre avec une lectrice de Je suis dans la foule serpentine, la transmission et la Deuxième vie qu'offre le troc, la mère telle La passagère, un baba comme modèle infantile, un peu de je et beaucoup de on(avec hommage appuyé dans la dernier récit), le fameux trottoir au soleil etc.

Philippe Delerm est un esthète du style (chaque mot soupesé, chaque phrase travaillée), pour la pureté de la langue, sa musicalité aussi, pour la précision de la scène enfin. De ses contemporains, peu de hargne, juste quelques vains constats, une réalité décortiquée au scalpel. Une écriture fine, celle des détails et des menus gestes, celle du quotidien aux anecdotes réjouissantes, une respiration (qui parfois manque d'émotion).

page 117
" Il est cependant un domaine où le plaisir de l'autre compte davantage que le sien. Ce plaisir-là restera toujours un mystère. C'est pour cela qu'on fait l'amour. "

page 104
" Aller au nord, c'est tailler à l'infini la route d'une intime vérité. On est toujours au bord, juste à côté, le long des courbes des canaux, des joncs à peine blonds séparent du ciel gris... on marche à l'infini, on se sait attendu. On est au cœur de soi."

Editions Gallimard

Ce billet fait l'objet d'une lecture commune avec Fersenette

et un de plus pour le challenge de Sharon