Les polyhandicapés

Par Alaindependant

Non, cela n’arrive pas qu’aux autres

Qu’arrive-t-il à 18 ans, aux personnes handicapées lourdement dépendantes ? C’est l’une des indignités de notre société. Cette population disparaît du radar sociétal car notre vie a évolué d’une manière qui ne mixe plus, n’intègre plus ou très difficilement les personnes polyhandicapées, souffrant d’autisme, dans nos univers. Cachez ces handicapés adultes que nous ne saurions voir ? Cette phrase est terriblement choquante. Mais nous devons reconnaître qu’elle correspond pour beaucoup à la réalité. Et pourtant, ces adultes-là ont plus que jamais besoin de soins, d’activités, de lieux d’hébergement, d’affection. Par ailleurs, leur durée de vie, comme la nôtre, s’allonge. Qui se soucie de leur sort et de celui de leurs familles ?

Car la prise en charge de cette population repose souvent sur leur entourage. Toute personne qui connaît ces familles le sait : la perspective du passage à l’âge adulte de leur enfant ou parent les affole. L’ex-ado leur est renvoyé, à charge pour eux de trouver la solution qui, souvent, n’existe pas ou est insuffisante. Démarre alors un véritable chemin de croix. Garder le membre lourdement handicapé de grande dépendance à la maison est très problématique, voire impossible. Les parents vieillissent et sont très vite incapables d’assumer physiquement, moralement et souvent financièrement cet accompagnement. L’angoisse de leur mort va croissant, non tant par rapport à eux-mêmes, que par rapport à leur enfant et à son devenir. Cette vie « après » serait d’autant plus envisageable pour eux, que l’adulte de grande dépendance aurait déjà appris à vivre « autonome », sans ses proches, via une institution.

C’est tout cela que reconnaît le Comité européen des droits sociaux en condamnant la Belgique sans appel pour le manque de places d’hébergement et de solutions adaptées pour ces adultes handicapés lourdement dépendants. Donnant aussi la possibilité aux familles d’obtenir par la voie judiciaire ce que la prise de décision politique ne leur octroie pas. Cette condamnation est vertueuse. La crise, même si elle est réelle et pèse sur les budgets, ne peut être évoquée comme excuse à l’imperfection des solutions apportées à un problème qui existe depuis de nombreuses années. L’Europe force le politique à accélérer les choses. La société dans son ensemble doit entendre le message, elle aussi, assumant sa part solidaire de ce qui n’arrive pas qu’aux autres.