Une étude publiée le 19 juillet 2013 à Accra, révèle que le changement climatique pourrait entraîner la perte de grandes quantités d’eau dans le bassin de la Volta. Précisément, les chercheurs de l’Institut international de gestion de l’eau (IWMI, International water management institute) et les autres centres impliqués dans le Programme de recherche sur le changement climatique, l’agriculture et la sécurité alimentaire(CCAFS) ont conclu que seul un tiers des besoins d’eau pour l’irrigation pourrait être satisfait. Les modèles climatiques montrent que les températures dans le bassin de la Volta vont augmenter jusqu’à 3,6°C, les cent prochaines années. Ce qui pourrait considérablement augmenter la quantité d’eau perdue par évaporation, alertent les scientifiques. Ils affirment aussi que les précipitations annuelles moyennes pourraient baisser d’environ 20%. Selon le responsable des recherches CCAFS en Afrique de l’Ouest, Robert Zougmoré, les flux d’eau dans la région de la Volta pourraient baisser de 24%, d’ici à 2050 et de 45%, d’ici à 2100, privant les pays riverains de l’eau dont ils ont besoin, pour faire tourner les turbines des centrales hydroélectriques et alimenter les fermes. Il a révélé que cette réduction d’eau risque de toucher la plus grande partie des petits producteurs qui vivent au jour le jour des productions maraîchères et autres en utilisant l’irrigation. L’étude de l’IWMI révèle que les nappes phréatiques seront plus difficiles à exploiter, « en particulier les nappes peu profondes » généralement utilisées dans les communautés rurales, alors que l’agriculture représente 40 % de l’activité économique du bassin.
Par ailleurs, le bassin de la Volta héberge l’énorme barrage d’Akosombo, qui a créé le lac Volta, le plus grand lac artificiel, et la quatrième plus grande réserve d’eau au monde. Sans oublier le projet de barrage controversé de Bui, qui est censé fournir 400 mégawatts à l’insuffisant réseau électrique ghanéen, et permettre l’irrigation de 30 000 hectares de terres agricoles. Mais l’étude prédit que ces projets et beaucoup d’autres prévus dans le bassin n’atteindront pas leur plein potentiel à cause du changement climatique.
Par exemple, l’étude explique qu’en 2050, les installations hydroélectriques ne pourront fonctionner à plus de 50% de leur potentiel, faute d’être alimentées suffisamment en eau. Et d’ici à la fin du siècle, elles ne pourront tourner qu’à 25 %. « Quand on connaît déjà les problèmes énergétiques que nos pays rencontrent, cela veut dire qu’il faut que les décideurs soient bien informés afin d’intégrer ces données dans la planification des investissements futurs », a prévenu le Dr Robert Zougmoré. Matthew McCartney, PhD, chercheur et hydrologue à l’IWMI, qui fait partie du CGIAR, un consortium international d’instituts de recherche agricole, prévient que les prédictions concernant les ressources en eau dans le bassin de la Volta ne sont pas certaines. Mais il explique que les données fournissent suffisamment de signaux d’alerte pour nécessiter une réflexion des décideurs politiques sur un panel d’options plus résilientes concernant l’agriculture et l’énergie afin de pouvoir affronter le changement climatique. Par exemple, l’étude suggère de réfléchir à un éventail plus large de sources d’énergies renouvelables, comme le vent et le soleil. Les options de stockage d’eau ne doivent pas être limitées aux projets utilisant de grands barrages, expliquent les chercheurs. Une égale considération doit être accordée aux systèmes alternatifs de stockage d’eau.
Selon M. McCartney, la solution pour les agriculteurs pourrait consister à améliorer les réserves d’eau des nappes phréatiques disponibles dans les zones rurales en « rechargeant » la nappe aquifère locale avec de l’eau prélevée dans les rivières ou les réservoirs. Cette pratique est de plus en plus courante dans les régions en situation de stress hydrique. L’étude appelle aussi à la poursuite des projets, relativement simples et à petite échelle, de stockage d’eau comme la construction de petits bassins dans les fermes rurales et l’utilisation de réservoirs avec des toits réduisant l’évaporation. Quant au Dr Robert Zougmoré, il a souligné qu’il est fondamental que les décideurs politiques de ces pays se retrouvent pour échanger et intégrer ces informations dans la planification futures des investissements dans la région. « Il faut s’accorder du comment gérer ce peu de ressources de manière durable, sans qu’il n’y ait des conflits, aussi bien au niveau des Etats qu’au niveau des communautés », a-t-il ajouté.
Le bassin de la Volta s’étend sur 402 000 kilomètres carrés, principalement situés au Ghana et au Burkina Faso, mais aussi au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Mali et au Togo. La population du bassin, 19 millions d’habitants en 2000, devrait atteindre les 34 millions, d’ici à 2015. La Volta et ses affluents sont la principale source d’eau pour près de 24 millions de personnes au Ghana, au Burkina Faso et dans quatre autres pays riverains.
Raphaël KAFANDO