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Quelques repères sur les retraites cc @CFDT

Publié le 29 juillet 2013 par Ivanberaud
Le 7 janvier 1407, soixante-dix ans après le début de la guerre de Cent Ans, Charles VI (1368-1422) édicte une ordonnance donnant droit à une pension "à ceux qui bien et longuement l'auraient servi" : 60 000 élus
Le 22 septembre 1673, Jean-Baptiste Colbert, (1619-1683), ministre de Louis XIV, met en place une caisse des invalides de la marine royale est destinée à secourir les marins blessés ou invalides. voir ici pour plus détail sur l'histoire sociale dans la marine
la Révolution élargit aux fonctionnaires titulaires la pension de retraite. Mais, faute d'être financée, la loi des 3-22 août 1790, votée par l'Assemblée constituante, ne sera guère appliquée. Plusieurs professions obtiennent ensuite un droit à la retraite : les mineurs d'Aniche, dans le Nord (1801), les employés de la Banque de France (1806), ceux de la Comédie-Française (1812), les militaires (1831).
Lire la description de la loi ici (ainsi que le régime de 1857)
La loi du 18 juin 1850, crée une caisse de retraite pour les salariés du secteur privé, à laquelle l'adhésion est "volontaire, spontanée et libre".
La loi du 9 juin 1853 institue un régime de pension uniforme pour les 158 227 fonctionnaires civils rétribués par l'Etat. Les émoluments des fonctionnaires font l'objet d'une retenue de 5%, destinée à financer les retraites.
Le 27 décembre 1895, que le président de la République Félix Faure promulgue une loi qui consacre un système de capitalisation pour les ouvriers et employés. Il y a là aussi un prélèvement de 5 % qui est convertie en rentes sur l'Etat, en valeurs du Trésor ou en obligations.

La CGT crie au Vol, elle le criera à nouveau en 1910. En fait elle démarre sa carrière de "coucou" des retraites : refuser chacune des réformes pour mieux se l'approprier ensuite en refusant la suivante.


Quelques repères sur les retraites cc @CFDT

Sur le financement, la CGT ne voulait dans sa majorité ni de cotisation ouvrière, ni de cotisation patronale !
"Lors de son congrès tenu à Toulouse en 1910 la CGT avait déclaré qu’elle ne se résoudrait pas à accepter le principe du versement que si la loi reposait sur le système de la répartition. Au congrès suivant, au Havre en 1912, malgré les importantes modifications apportées au texte du 5 avril 1910, notamment en ce qui concernait l’âge du départ en retraite, la confédération durcit encore son opposition. Elle appela à se mobiliser contre « l’escroquerie des retraites ». Entre temps, on s’était aperçu que la répartition exigeait le prélèvement sur les salaires au même titre que la capitalisation, et l’on ne voulait pas de ce prélèvement, assimilé à un vol.
D’où, ainsi qu’on vient de le voir, la revendication d’un recours au financement par l’impôt, pour user d’une expression moderne.
En attendant qu’on eût obtenu satisfaction sur ce point, il fallait continuer d’appeler les salariés au boycottage de la loi : l’assurance était obligatoire, mais les patrons ne pouvaient inscrire leurs salariés à une caisse et donc prélever 2% sur leurs salaires que si ces salariés donnaient leur consentement écrit on les appellerait à ne rien signer du tout.
A la vérité, il y avait une certaine dose d’hypocrisie dans cette attitude car un orateur fit remarquer qu’en dépit des interdictions confédérales, des militants « se soumettaient pour leur compte à la loi ».
La guerre qui a éclaté moins de deux ans après la mise en vigueur de la loi ne permet pas de dire si le mouvement d’adhésion à la loi aurait ou non renversé l’obstruction syndicale.
Toujours est-il que la CGT, une quinzaine d’années plus tard, acceptait le prélèvement ouvrier et la capitalisation inscrite dans la loi du 5 avril 1928 sur les assurances sociales, jusqu’à créer elles-mêmes ses propres caisses de capitalisation." (voir ici)
En 1910, le système de 1895 devient obligatoire.
Jaurès en disait ceci :
"J’ai tenu à rappeler, en cette heure de trouble et de confusion, les décisions si fermes et si claires du Parti. Elles ne furent pas improvisées et hâtives. Jamais question ne fut discutée avec plus de soin que ne l’a été la question des retraites ouvrières et paysannes au Congrès de Nîmes. Jamais parti n’eut, en les discutant, un sens plus élevé de ses responsabilités. C’est à ces résolutions, si réfléchies et si sages, que nous nous conformerons jusqu’au bout, par respect pour la volonté de notre Parti et par l’effet d’une ardente conviction personnelle. Devant la force du vrai, persévéramment démontré, les difficultés et les malentendus disparaîtront. Et si nous avons à souffrir quelque temps de préventions aveugles, ce n’est pas la première fois que nous en avons affronté le risque dans l’intérêt supérieur de notre cause.
Le Parti socialiste ne nous a pas donné mandat de renverser la loi, d’en combattre ou d’en ajourner le fonctionnement. Il nous a donné mandat, au contraire, d’en hâter et d’en assurer l’application, mais en la corrigeant et perfectionnant. Et il a pris soin de marquer les points essentiels sur lesquels doit se porter notre effort. Il nous a demandé surtout d’abaisser à 60 ans l’entrée en jouissance de la retraite pour l’ensemble des salariés, de l’abaisser au dessous de 60 ans pour les salariés des industries particulièrement insalubres ou épuisantes comme la verrerie et de compléter l’assurance contre la vieillesse par l’assurance contre l’invalidité sans condition d’âge. Il nous a demandé aussi de développer, au profit des assurés la contribution de l’Etat.
Ce mandat que lui a donné le Parti le groupe des élus socialistes l’a rempli fidèlement. Il a voté la loi, et si la loi est un vol et une escroquerie, nous sommes des voleurs et des escrocs. A peine la loi votée, nous nous sommes préoccupés de l’amender, de la perfectionner, sur les points marqués par le Congrès de Nîmes. Ainsi, au nom du groupe socialiste, Goniaux a déposé un projet de loi qui abaisse l’âge de la retraite pour tous, et plus fortement pour les industries les plus malsaines. Personnellement, j’ai proposé au nom du groupe et j’ai fait adopter par la Chambre, à l’unanimité, avec l’adhésion explicite de la Commission du budget et du ministère, un projet de résolution qui invite le gouvernement à abaisser, par un projet de loi, l’âge de la retraite à 60 ans, et à organiser l’assurance contre l’invalidité. C’est un engagement solennel que nous ne laisserons pas tomber.
De même, dès la prochaine loi de finances, nous soutiendrons des mesures déjà étudiées par nous et très pratiques, très réalisables, pour accroître la part contributive de l’Etat, immédiatement et durablement, dans la période transitoire et dans la période définitive.
Mais tout cela n’est possible que si la loi, entre sérieusement en application. Tous ceux qui s’appliquent à en compliquer et à en retarder la mise en train n’aboutiront qu’à retarder et à embarrasser le grand effort d’amélioration qui doit être tenté sans délai.
Mais nous prévenons les réactions, nous prévenons les groupements et journaux bourgeois qui triomphent si insolemment aujourd’hui des difficultés que l’opposition aveugle et imprudence d’une partie de la classe ouvrière suscite à la loi ; nous les avertissons que nous ne leur permettrons pas de rester dans l’équivoque. Il ne leur suffira pas, j’imagine, de faire besogne de destruction. Il ne leur suffira pas de dégorger leur fief sur la grande loi sociale détestée par eux. Il faudra qu’ils disent comment ils entendent la remplacer ou l’amender et quels sacrifices ils sont prêts à consentir.
Ah oui, c’est un beau spectacle de voir la joie impudente et déchaînée de toute la réaction sociale. Le Temps, les Débats, l’Eclair, la République française, l’Echo de Paris, le Figaro, le Gaulois, le Soleil, la Libre Parole, l’Autorité, la Patrie, tous les organes du capitalisme, du privilège et de l’aristocratie, tout ceux qui, sous prétexte de liberté économique, veulent que les faibles soient livrés à la puissance écrasante des forts, tous ceux, qui, sont les adversaires de toute législation protectrice et émancipatrice du travail, tous ceux qui redoutent les premières applications de ce principe de l’assurance sociale qui, étendu nécessairement à la maladie, à l’invalidité, au chômage, accroîtra la sécurité, la liberté, la force de revendication des prolétaires, tous les réacteurs fielleux et mielleux font éclater leur espérance. Ils exultent, ils ricanent. Ils ne parlent que de faillite, d’avortement, de four noir, ils prétendent que la loi est à terre ; ils la piétinent. Et ils se flattent de la pensée qu’ils ont tué en elle, comme un germe écrasé, toute la suite de l’assurance sociale, toute la politique d’intervention au profit du travail.
« Nous l’avions bien dit, murmurent aigrement et allègrement le Temps et les Débats, il est impossible de légifère en ces matières. »«  Quelle duperie pour les ouvriers, reprennent les journaux de droite : cotisation ouvrière, cotisation patronale ou impôt, c’est toujours le peuple qui paiera. Qu’on laisse, donc faire, sans contrainte légale, la bonne volonté des patrons. »
Voilà ce qu’ils veulent. Voilà ce qu’ils préparent : et ils sont trop heureux que l’erreur commise par un trop grand nombre de groupements ouvriers leur permettre de pousser leur jeu.
Et M. Jean Codet, sénateur radical de la Haute-Vienne, intervient à son tour. Il nous avertit clairement de ce qu’on médite. Il nous dit avec une louable candeur, ce que sera le lendemain si l’on réussit à ruiner la loi. M. Codet avait voté la loi des retraites. Mais il est de ceux qui se rebutent ou s’effarent aux premières difficultés et aux premiers malentendus.
Ayant pris peur, il a le courage d’avouer sa peur ; et il nous révèle ; avec une pleutrerie héroïque, quel est le système qui remplacera la loi dont il se hâte, le cher homme, de demander la disparition.
Dès la rentré des Chambres je vais demander au gouvernement de suspendre l’exécution de la loi actuelle et de déposer un projet de loi nouveau inspiré du système anglais qui a donnée de bons résultats. Il faudra supprimer tous les versements, causes de conflits, et les remplacer par un impôt qui pèsera sur tous. Ce seront des « centimes de solidarité », la loi des retraites n’étant pas une loi d’assistance, mais une véritable loi de solidarité. C’est d’ailleurs le système de l’assistance aux vieillards de soixante-dix ans qu’il s’agit d’étendre, les communes dresseront la liste des retraites éventuelles, et pour qu’elles n’en proposent pas un nombre excessif, elles contribueront pour leur petite part à la retraite.C’est délicieux, délicieux, et voilà où l’on nous mène. De la magnifique idée d’assurance sociale, qui crée pour tous les salariés un droit certain, intangible, sans humiliation, sans condition, nous retombons à une loi d’aumône et d’arbitraire, où le bon plaisir des autorités distribuera quelques miettes à des pauvres choisis.
Mais tout cela n’aboutira pas. Les affolés en seront pour la honte de leur panique. Les réacteurs en seront pour la honte de leurs espérances. La loi sera maintenue et améliorée et ceux qui affectent de croire qu’ils en ont fini avec elle, commettent une double erreur : erreur matérielle, erreur morale."
Devant le congrès de la SFIO, à Nîmes, le 7 février 1910, Jean Jaurès défend la réforme : voyant dans le versement ouvrier, récusé par la CGT, l'émergence d'une retraite ayant"vraiment un caractère d'assurance", le tribun socialiste s'enflamme :"Aujourd'hui, quand l'ouvrier de 40 ans voit passer à côté de lui un vieux de 60 ans sans abri, sans retraite, mendiant, importun et méprisé, [il] se voit d'avance, comme dans un miroir sinistre, dans la figure flétrie de ce pauvre homme et il se dit : c'est comme cela que je serai dans quelques années. (...) Dès demain, par le vote immédiat de la loi (...) , tous les vieux relèveront le front, et tous les jeunes, tous les hommes mûrs se diront du moins que la fin de vie ne sera pas pour eux le fossé où se couche la bête aux abois."
La loi du 27 février 1912 abaisse l'âge légal à 60 ans. Puis celle du 5 avril 1928, créant des assurances sociales. Elles sont complétées par la loi du 30 avril 1930, qui garantit au retraité une pension s'élevant à 40 % du salaire moyen, à partir de 60 ans et de trente années d'affiliation. En 1937, le patronat et les syndicats mettent en place des régimes de retraite privés dans les branches professionnelles. Le 14 mers 1941, c'est le passage à répartition confirmé à la libération avec les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945

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