L’empathie est bien là, mais ils ne parviennent pas à y recourir spontanément, souligne cette étude d’imagerie néerlandaise présentée dans l’édition du 25 juillet de la revue Brain. Car quand les chercheurs leur demandent de faire preuve d’empathie, ils sont alors capables de « l’activer ». En synthèse, les psychopathes sont avares d’empathie mais bien témoins de la souffrance de la victime, ce qui peut expliquer à la fois leur sensibilité et leur habilité sociale.
Pourquoi ces individus présentent-ils un risque pour les autres? Ce manque d’empathie reste mal compris, en particulier en raison de la difficulté de mener des études auprès de ces individus et de disposer des moyens d’imagerie, dans les quartiers de haute sécurité, pour analyser leur cerveau. Mais le Pr Christian Keysers, responsable du Social Brain Lab d’Amsterdam et auteur principal de l’étude, est parvenu à rapprocher de l’IRMf, des criminels psychopathes, en les transférant au Centre médical universitaire de Groningen (Pays-Bas).
L’étude menée auprès de 18 criminels psychopathes et un groupe de contrôle s’est déroulée en 3 étapes.
· Les participants ont d’abord visionné de courtes séquences vidéo présentant des interactions entre 2 personnes avec un zoom sur leurs mains. Les vidéo montraient une main touchant l’autre soit de manière affectueuse, soit violente, soit répulsive, soit neutre.
· Ensuite, les participants ont visionné à nouveau les mêmes vidéos avec la recommandation de faire preuve d’empathie vis-à-vis de l’un des acteurs du film. Ils devaient donc tenter de se mettre à la place des acteurs.
· Durant la troisième phase, les participants eux-mêmes ont été soumis à ces interactions, avec leurs propres mains donc, et dans le même temps examinés par IRMf. Les chercheurs voulaient savoir si des zones identiques du cerveau s’activent en situation d’acteur et de spectateur.
L’effet miroir : Les chercheurs expliquent que lorsque nous sommes en situation ou lorsque nous voyons d’autres personnes se déplacer, subir ou souffrir…les mêmes régions du cerveau sont activées. La situation de l’autre devient en quelque sorte notre problème. Cet effet miroir constitue une partie essentielle de notre capacité d’empathie et moins ce système fonctionne bien, moins l’empathie est forte. Il avait déjà été suggéré qu’un miroir cassé, chez les psychopathes, entraîne une diminution d’empathie avec les victimes.
L’expérience montre que les participants psychopathes ont un effet miroir moins efficace par rapport aux participants témoins. « Ils ne se ressentent pas la douleur, quand ils font mal à leurs victimes ».
Mais ce n’est pas tout. Les psychopathes n’utilisent pas ce système miroir spontanément, mais peuvent, en revanche, l’utiliser à la demande. Ici, lorsque les chercheurs le leur demandent explicitement.
Ainsi, la psychopathie n’est pas l’incapacité d’empathie, mais une propension réduite à l’empathie, combinée à une absence de spontanéité. Ainsi, écrivent les auteurs, lorsque les psychopathes font l’effort de comprendre, ils peuvent basculer en mode d’empathie. On entrevoit la conclusion, soit la possibilité thérapeutique de mettre à profit l’empathie sous-jacente chez ces criminels. Mais les auteurs n’expliquent pas comment.
Source: Brain 25 July, 2013: 136; 2550–2562Reduced spontaneous but relatively normal deliberate vicarious representations in psychopathy(Visuel@Royal Netherlands Academy of Arts and Sciences montrant des films présentés aux participants (à gauche) et l’activation du cerveau des participants sans instructions (derrière) et avec des instructions d’empathie (avant))
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