Magazine Science & vie
J'ai écrit récemment une des parties d'un débat sur les organismes génétiquement modifiés. Il est paru dans Moins! un journal que vous ne connaissez peut-être pas et dont voici le site pour les personnes intéressées. Petit coup de pub: allez le lire, en version papier donc car c'est la seule qui existe, au moins pour le débat en question...
Mais pour ceux qui n'y auraient pas accès, je vais vous donner ma partie, avec quelques commentaires, en chapitres successifs. Surtout que dans le débat 'pour et contre' il y a toujours une part de trop simple. Car au fond, si la question n'était pas si mais comment?
Je vous ai mis la première partie il y a quelques temps, voici donc la deuxième partie:
Cette fois, la question est la suivante. Que vous inspire l'utilisation du génie génétique dans l'agriculture, dans le monde en général et en Suisse en particulier ?
"L’utilisation du génie génétique n’est qu’un moyen: les avantages et les inconvénients qui y seront liés dépendront forcément des buts poursuivis. Quels sont les avantages et les inconvénients de la métallurgie, ou de l’électricité? L’électricité peut servir aux transports publics comme à l'exécution des condamnés à mort, et entre ces deux buts tout change. Il est évident que légiférer sur ces deux buts séparément est une démarche plus intelligente que d’interdire l’électricité elle-même. Interdire l’électricité rendrait les transports publics moins efficaces, aurait des retombées écologiques négatives... et cela ne rendrait pas la peine de mort impossible.
Le génie génétique peut servir à accentuer des inégalités de pouvoir et de revenu, mais aussi à mettre dans les mains des paysans des plantes qui augmenteront leur sécurité ou leur santé. Là aussi entre ces deux buts tout change. Là aussi, interdire limiterait beaucoup les dimensions positives et n’empêcherait pas les négatives. Une discussion véritablement responsable ne devrait donc pas se demander si « le génie génétique » a plus d’avantages ou d’inconvénients, mais quels devraient en être les buts admis, dans quelles conditions ce moyen est sûr, ou encore, comment faire pour que ses bénéfices et ses risques soient équitablement répartis."
J'ai été très contente de voir un très bel exemple détaillé récemment dans un excellent message blog que vous trouverez intégralement ici. Voici l'extrait, il s'agit du Golden rice dont l'image ouvre ce billet:
"(...) une étude de 2009 a confirmé que le Golden Rice apporte bien des vitamines A aux humains qui en consomment. Ahhh ! Frankenstein ! Euh, c’est une enzyme qui existe déjà dans le riz, mais s’exprime dans les feuilles pas dans les graines. On prend la version d’une plante qui l’exprime dans des graines que l’on mange déjà (le maïs, vous suivez ?), et on le fait exprimer dans les graines de riz. Il n’y a pas de pesticides, rien de potentiellement plus dangereux que de prendre un complément de vitamine A avec son bol de riz.
Par ailleurs, les brevets sont gérés par une ONG, et les paysans n’ont aucun frais à payer (le riz est au même prix que du riz standard) jusqu’à une production de $10’000, ce qui couvre apparemment les 99% des paysans des zones pauvres visées. Après il faut payer pour l’exploitation commerciale. Mais dans tous les cas les paysans ont le droit de replanter."
Alors, le Golden rice, plutôt transports publiques ou plutôt exécution capitale? Vu comme ça, cela semblerait pourtant assez clair...Si on démocratisait les OGM? Il y aurait sans doute plus d'utilisations de ce type, et moins d'utilisations exploitatives. Il y aurait peut-être aussi plus de ce genre de brevet-là. Car c'est un bel exemple, non? Un brevet qui sert à maintenir le prix abordable, plutôt qu'à l'enfler...