Réformer ?

Publié le 23 juillet 2013 par Pierre

Après Sarkozy le réformateur autoritaire de l’immobilisme français, Hollande le réformateur qui concerte pour ré-enchanter le modèle français.

Depuis mai 2012, on peut dire que ça réforme à tout va : réforme du logement, réforme de la fiscalité des entreprises, réforme de la politique énergétique, réforme des retraites, réforme du droit du travail, réforme des banques, réforme de la formation professionnelle, etc.

Au-delà du flou dans les objectifs visés, Hollande préférant naviguer à vue plutôt qu’annoncer le cap, se pose un problème de méthode.

Depuis des décennies, les réformes successives ont ajouté des couches, des étages, des dispositifs spécifiques, des exceptions. Résultat, une organisation nationale et locale illisible, inefficace et très coûteuse.

Il suffit pour s’en convaincre de passer en revue différents secteurs clés :

•    La décentralisation a donné des compétences aux communes, aux départements et aux régions ; puis on a mis l’accent sur les intercommunalités car les communes étaient trop petites ; puis on développe encore des échelons intermédiaires : les « pôles ruraux d’aménagement et de coopération » (qui vont succéder aux Pays), les Schémas de cohérence territoriale… et encore si tout le monde avait des compétences claires ! Eh non, les compétences sont partagées, et c’est le foutoir.

•    La fiscalité est devenue totalement illisible, avec une somme d’exceptions, d’abattements et d’avantages en tout genre ;

•    Les aides aux entreprises constituent un maquis impénétrable, à force d’empiler les dispositifs plus complexes les uns que les autres ;

•    Dans la formation professionnelle, les dispositifs d’insertion et de retour à l’emploi : là encore, c’est le parcours du combattant pour comprendre qui fait quoi ;

•    Le logement est un monstrueux labyrinthe technocratique, dont les dispositifs d’aides et de subventions sont totalement incompréhensibles pour le non spécialiste ;

•    On pourrait également citer les domaines du transport (pas moins de 5 niveaux de collectivités gèrent chacun un bout de la compétence), du tourisme (même bordel), de la protection de l’environnement (n’en parlons pas), de l’urbanisme…

Au final, l’ensemble du système coûte excessivement cher : les dépenses publiques représentent en 2012 plus de 56% du PIB, ce qui situe la France au 7è rang mondial. Et pour des performances plutôt décevantes : taux de croissance, dette publique, niveau et durée de chômage, précarité sociale, dynamisme économique, niveau de production de logements, attractivité envers les investisseurs… les indicateurs sont moins bons que dans les autres pays européens, et ils se dégradent d’année en année.

Pourquoi ne jamais se préoccuper de cet étouffement du système qui, faute d’avoir été remis à plat une bonne fois pour toutes, est en train de s’effondrer sous le poids des étages qu’on lui ajoute réforme après réforme ?

Chaque nouveau dispositif ajoute de la complexité, avec une efficacité marginale toujours plus réduite. L’illisibilité ne profite qu’à ceux qui ont les moyens de la comprendre (défiscalisation pour les riches et les entreprises du CAC40). Les compétences et financements croisés créent de la lourdeur, font prospérer la bureaucratie, et incitent chaque structure à valoriser son action, souvent au détriment des besoins collectifs.

Faut-il attendre la paralysie complète de l’action publique, pour enfin avoir le courage de tout remettre à plat ? Refonder dans la justice un système illisible et inefficace, ne serait-ce pas un beau programme pour Hollande ?