Ces histoires sont du genre de celles que j’aime. Même s’ils fonctionnent sur les mêmes ressorts que les contes de fée traditionnels, ils prennent une tournure plus sombre. Parfois, c’est le quotidien qui se retrouve investi d’une ambiance à la fois onirique et dérangeante. La maison, trop vide, devient oppressante; la pluie qui devait nous confiner à l’intérieur finit par attirer dehors; la maladie qui guette le couple devient une bête dont personne ne se méfie. Parfois, on retrouve un univers complètement imaginaire qui pourtant se laisse gagner par des malaises bien tangibles: mère Nature n’hésite pas à faire payer dans le sang les méfaits que les hommes lui ont infligés, des créatures inconnues gagnent la confiance des gens avant de se révéler prédateurs, le rêve d’une vie éternelle devient le pire crime commis car la vieillesse pèse quand la mort ne vient pas. Ce subtil mélange d’imaginaire et de cruauté réaliste est ce qui fait l’originalité et le charme de ces petites histoires.
Quant au style, lui aussi entretient ce flottement. Quelques-unes de ces nouvelles refusent d’apporter une réponse franche à ce qui s’est réellement passé, comme avec cette mystérieuse pluie par exemple. Plusieurs s’arrêtent soigneusement juste avant la catastrophe finale, ce qui laisse dans une forte impression de fatalisme très efficace. Et ça fonctionne: chacune laisse sur un suspens souvent très marquant. Toutefois, j’ai parfois regretté quelques phrases finales qui voulaient fournir une explication inutile qui tombaient un peu à plat : il vaut mieux parfois nous laisser avec nos hypothèses. Mais pour le reste, concilier univers du conte et une part de cynisme onirique m’a beaucoup plu.
La note de Mélu:
Un petit livre pour de grands effets.
Un mot sur l’auteur: Emilie Cartier est une auteure française. D’autres de ses œuvres sur Ma Bouquinerie:
catégorie “sentiment”