Prendre un peu de distance est-il un bon moyen de préserver ou de bonifier son couple? Oui, si l’on en croit cette étude de chercheurs de l’Université de Hong Kong et de l’Université Cornell qui a suivi les interactions de couples séparés par la distance. Chat vidéo, mail, téléphone ou sms, cette étude révèle combien ces couples "à distance" vont « se révéler » et partager leur vie , parfois bien plus fort que des couples qui vivent ensemble. 2 facteurs expliquent la création de ces liens plus forts, le partage d’une intimité et l’idéalisation de l’autre. Et probablement le sentiment d’éloignement d’un des partenaires qui crée un besoin accru d’un lien à l’autre. Revue de la littérature et conclusions dans le Journal of Communication.
En raison de notre mobilité croissante et l’adoption généralisée des nouvelles technologies de communication, si les relations amoureuses sont généralement caractérisées par la proximité physique, la relation de couple passe aujourd’hui par des périodes de séparation et d’éloignement géographique en raison des études, des carrières professionnelles ou simplement du marché de l’emploi. Les auteurs précisent ainsi, qu’aux Etats-Unis, plus de 3 millions de couples vivent, à un moment t, séparés, pour des raisons autres que le divorce ou des problèmes relationnels. 25 à 50% des étudiants, selon les pays et les filières vont devoir se séparer de leur partenaire pour des impératifs de stages ou de cycle à l’étranger. Cette situation de séparation, assez peu étudiée sur ces effets sur la relation de couple, a priori jugée rare, anormale et vouée çà l’échec, va pourtant parfois créer des liens plus forts plus constants et plus profonds, que des relations dites normales. Les résultats des quelques études publiées sur le sujet sont d’ailleurs contradictoires, certaines mettent l’accent sur le recours à la jalousie et au stress chez ces couples, pour faire face à la séparation, d’autres plus récentes suggèrent que ce n’est pas forcément mauvais pour la qualité relationnelle.
Cristal Jiang (Hong Kong) et Jeffrey Hancock (Cornell) ont suivi les interactions –et leur contenus- à distance de 63 couples hétérosexuels, dont les partenaires étaient âgés en moyenne de 21 ans, dont 30 couples « longue distance (LD) » séparés en moyenne durant 17 mois, et 33 couples qui vivaient ensemble ou à proximité. Les interactions avaient lieu par tous les médias possibles, de la discussion en face à face au chat vidéo. Ils constatent, en analysant ces interactions, une bien plus grande intimité chez les couples à distance qui semblent surmonter ainsi « les contraintes médiatiques », écrivent les auteurs.
· 52% des participants étaient des utilisateurs de smartphones.
· 49,2% des participants ont considéré leur relation comme engagée avec un sentiment d’amour intense et des projets d’avenir,
· 31,7% ont l’ont décrite comme sérieuse, avec un sentiment de confiance, une attirance, de l’amour et une dépendance à l’autre,
· 15,1%, moyennement sérieuse,
· 4% superficielle.
La distance, un facteur d’intimité? Au total, ces participants ont « fourni » 3.024 interactions, dont 1.038 interactions en face à face, 557 appels téléphoniques, 101 chats vidéo, 1.090 textos, 202 messages instantanés, et 36 email, correspondant à 3,45 interactions par jour. Les principales conclusions sont les suivantes,
Si, en moyenne, les participants LD ont significativement moins d’interactions par jour que les couples de proximité, ils ont plus recours aux différents supports de communication (appels téléphoniques, chats vidéo, SMS).
Selon différentes échelle, les participants LD montrent
· plus d’intimité, et indépendamment de la qualité de la relation au départ,
· plus d’ouverture à l’autre (auto-révélation de soi-même à l’autre),
· une plus forte propension à idéaliser l’autre,
· une plus grande sensibilité à la réactivité du partenaire.
Les effets des médias de distance dans l’amélioration de l’intimité du couple « LD » sont liés à la propension accru d’idéalisation de l’ouverture de l’autre (Voir schéma ci-contre). Les auteurs décrivent quelles caractéristiques, pour chaque média, vont favoriser l’adaptation et l’idéalisation. En fin de compte les auteurs exploitent leurs résultats en espérant que les nouveaux médias, dans leur conception-même, tiennent compte, avec les nouvelles contraintes de mobilité de la société, de ce besoin d’entretenir la relation et l’intimité, « une gratification qui résulte d’une combinaison entre le temps, l’espace, et les contraintes sociales ».
Source: Journal of Communication 11 MAY 2013 DOI: 10.1111/jcom.12029 Absence Makes the Communication Grow Fonder: Geographic Separation, Interpersonal Media, and Intimacy in Dating Relationships (Visuel Fotolia)
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