La fin d’une époque.
Lundi dernier, en Inde, le dernier service de télégraphe du monde en activité s’arrêtait de fonctionner après 162 années de service derrière lui.
De New Delhi à Allahabad, en passant par Calcutta, les Indiens se servaient toujours du service de télégraphe pour envoyer de petites missives de papier à travers tout le pays. Le télégraphe indien avait été informatisé depuis belle lurette ; et il était même possible d’envoyer un télégraphe depuis internet. Et, en Inde, 5000 télégrammes étaient encore envoyés quotidiennement.
Mais, face à la concurrence d’internet et des technologies mobiles comme le SMS, le service de télégraphe le plus populaire du monde ne pouvait plus résister. En 1980, pourtant, les bureaux étaient encore pleins ; sur une photo, on peut voir des dizaines d’employés du bureau d’Hyderabad réceptionner et dispatcher les télégrammes de leurs clients. A cette époque, c’étaient 60 millions de missives qui étaient envoyés chaque jour.
A Allahabad, on utilisait encore des tampons de l’époque coloniale pour écrire les messages. Les coursier, à bicyclette, continuaient à livrer les messages des uns et des autres ; comme si, après avoir envoyé un sms, un facteur venait toquer à la porte de notre correspondant pour lui lire le message. On demandait des nouvelles de proches, des livraisons ; un mari demande à sa femme de lui ramener son déjeuner ; on envoie des faire-part de mariage, ou de naissances ; ou des avis de décès.
1844 – le premier télégramme envoyé par Samuel Morse, « What hath God Wrought ». Victor Hugo, qui envoie à son éditeur un simple « ? » pour demander comment se portent les ventes de son nouveau roman – et qui reçoit, en guise de réponse, un « ! ». Le premier ministre égyptien qui, en 1938, félicite Hitler de son élection en lui disant : « Votre nom restera dans l’histoire comme celui du chef d’Etat qui a sauvé la civilisation de la destruction ».
Il y a quelque chose de désuet ; un petit parfum de mélancolie, dans cette technologie qui prend fin et qui a profondément marqué l’histoire de la presse écrite. Un voyage qui n’a pas été fait, un télégramme qui n’a pas été envoyé ; l’impossibilité de pouvoir dire : « moi aussi, j’ai utilisé le télégraphe ! ».
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